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2016, année la plus chaude ?

Mercredi 7 décembre 2016, par Yveline Nicolas

L’ambition de limiter le réchauffement climatique à 1,5°C implique une réduction des émissions de gaz à effet de serre de près de 80% % d’ici à 2100. Il devient urgent d’agir : 2016 sera probablement l’année la plus chaude depuis le début des relevés des températures mondiales à partir de 1880 - après le précédent record de 2015. Si l’Accord de Paris adopté en décembre 2015 est mis en oeuvre de toute urgence par l’ensemble des pays, il pourrait contribuer à ralentir le réchauffement climatique.


 La COP22 : concrétiser l’Accord de Paris sur le climat

La 22ème session de la Conférence des Parties de la Convention-Cadre des Nations unies sur les changements climatiques (« COP22 ») s’est tenue au Maroc du 7 au 18 novembre 2016.

S’inscrivant dans la continuité de l’Accord de Paris sur le climat, la COP22 visait à définir les modalités de la mise en œuvre de l’objectif adopté en décembre 2015 : contenir la hausse de la température moyenne sur la planète « nettement en dessous de 2° C » en 2100 par rapport aux niveaux préindustriels, en « poursuivant des efforts » pour « limiter cette hausse à 1,5° ».

L’Accord sur le climat entre en vigueur une fois ratifié par au moins 55 pays représentant 55% des émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES). La Chine et les Etats-Unis, à eux deux émetteurs de 40% des émissions de GES, ont annoncé leur ratification, assortie d’un mécanisme d’harmonisation de leurs politiques en matière de contrôle des subventions aux énergies fossiles en vue de leur suppression progressive. L’Inde qui émet 6% des GES a ratifié, ainsi que la Russie (5%). L’Union européenne (11% des émissions) risquait le discrédit en se faisant attendre, les Etats membres n’arrivant pas à se mettre d’accord, du fait notamment qu’ils continuent à utiliser du charbon, comme la Pologne. Finalement une autorisation de ratifier a été votée par le Parlement le 4 octobre, sans attendre les procédures individuelles de chaque Etat membre.

Au 4 octobre 2016, 74 Etats représentant 58,82% des émissions mondiales de gaz à effet de serre avaient ratifié l’Accord de Paris, ce qui lui a permis d’entrer en vigueur un mois plus tard, soit le 4 novembre.

La COP22 se voulait « la Conférence de l’action » avec comme priorités l’atténuation du changement climatique et l’innovation en matière d’adaptation. Beaucoup de pays ont déjà publié leur "contribution déterminée au niveau national" (les "NDC" en anglais), stratégies pour la diminution des émissions de gaz à effet de serre. Il s’agit de les inciter d’une part à renforcer ces engagements nationaux, qui sont en l’état insuffisants pour avoir un réel impact sur l’atténuation du changement climatique, d’autre part à accélérer leur mise en oeuvre dès maintenant, pour pouvoir passer à des contributions encore plus ambitieuse en 2020. Les pays du Sud, qui font maintenant partie de l’Accord sur le climat, attendent la concrétisation des engagements financiers pris par les pays riches responsables du dérèglement climatique, pour aider à l’adaptation au changement climatique et au renforcement des capacités (100 milliards de dollars d’ici 2020).

A la COP22 à Marrakech, la société civile était également présente, dans un espace dédié avec différentes thématiques : jeunes, femmes, territoires et développement durable, agriculture, universités et recherche, environnement, migrations. Notre article sur les événements de la COP22.

- Bilan de la COP22

 Les engagements de la France

Au niveau français, la politique climatique se traduit par le document de « Programmation pluriannuelle de l’énergie » (PPE) prévu par la Loi relative à « la transition énergétique pour la croissance verte ». En phase de consultation publique lancée le 15 septembre 2016, la PPE porte sur deux périodes successives de respectivement trois et cinq ans (2016-2018 et 2019-2023). Elle "exprime les orientations et priorités d’action des pouvoirs publics pour la gestion de l’ensemble des formes d’énergie sur le territoire métropolitain continental". C’est donc un document essentiel qui donnera un cadre concret pour le développement des renouvelables, les économies d’énergie, la diminution du nucléaire, etc. Mais ce programme manque d’ambition et de cohérence, particulièrement dans le domaine de la rénovation thermique et énergétique des bâtiments (alors que la précarité énergétique touche 20 % de la population), du développement des transports collectifs, des lignes de train intercités, du vélo et du fret ferroviaire (le transport est responsable en France de 30% des émissions de gaz à effet de serre).

Selon le Réseau Action Climat, en matière d’énergies renouvelables « la France reste le mauvais élève de l’Union Européenne », alors qu’une étude de l’ADEME a montré « que 900 000 emplois nets seraient créés avec un scénario 100 % renouvelable pour l’électricité en 2050 et que cette option permettrait d’obtenir une baisse de la facture énergétique des ménages ». Un mauvais signe : les émissions de gaz à effet de serre dues aux transports routiers sont reparties à la hausse depuis l’année dernière après avoir baissé en moyenne de 0,7% par an depuis 2004. Et comme toujours les objectifs restent flous sur l’arrêt de centrales nucléaires, alors que le gouvernement s’était engagé à diminuer la part du nucléaire à 50 % de la production d’électricité en 2025.

 Le climat se dérègle, les émissions de GES augmentent

Il devient urgent d’agir : après plusieurs records ces dernières années, 2016 sera probablement l’année la plus chaude depuis le début des relevés des températures mondiales à partir de 1880. En juillet, la température moyenne globale au-dessus des terres et à la surface des océans a été de 16,67 degrés, soit 0,87°C au-dessus de la moyenne du 20ème siècle. Publié en août, le rapport annuel de l’Agence américaine d’observation océanique et atmosphérique (NOAA) sur l’état de la planète documente une hausse des catastrophes naturelles en 2015, une accélération de la montée du niveau des mers et de l’acidification, le recul des glaciers, etc. Le cap d’une hausse de 1° C des températures mondiales par rapport à l’ère pré-industrielle a été franchi en 2015, année où la concentration de CO2 dans l’atmosphère a été la plus élevée depuis 800 000 ans selon une étude du Global Carbon Project, qui estime que les émissions devraient baisser de 0,9 % par an jusqu’en 2030 pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris.

D’après le rapport "Emissions Gap Report 2016" du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), publié le 3 novembre 2016, "même dans le cas d’une mise en oeuvre intégrale des engagements pris à Paris, les émissions prévues d’ici à 2030 entraîneront une hausse des températures mondiales de 2,9 à 3,4 ℃ d’ici la fin du siècle". Elles dépasseront de 12 à 14 gigatonnes les niveaux fixés pour limiter le réchauffement à 2°C (sachant qu’une gigatonne correspond en gros aux émissions annuelles des transports dans l’Union européenne, aviation comprise).

L’ambition de limiter la hausse à 1,5°C implique une réduction des émissions de gaz à effet de serre de 70 à 85 % d’ici à 2100. Or l’augmentation moyenne des émissions de CO2 (principalement dues la combustion d’énergie : pétrole, gaz, production de ciment) sur la période 2004-2013 a été de 2% par an. Selon le Global Carbon Project, ces émissions ont stagné en 2015 et 2016. Le recul du charbon en Chine et aux Etats-Unis serait le facteur principal.

C’est l’ensemble du mode de production, de consommation et de commercialisation qui doit évoluer rapidement, notamment en matière de transports et dans le domaine agricole et alimentaire. Dans le secteur des énergies renouvelables, des avancées ont lieu : ainsi en 2015 selon le PNUE, 53% des nouveaux investissements dans les capacités de production d’électricité sont allés aux énergies renouvelables, notamment le solaire, dont le prix baisse, ce qui augmente sa rentabilité.

 Compensation ou réduction des émissions de gaz à effet de serre ?

Les négociations climatiques s’efforcent de plus en plus d’impliquer les collectivités locales, qui organisent un sommet climatique le 14 novembre à Marrakech, mais aussi les grandes entreprises et le secteur de la finance dans le mot d’ordre de la transition vers une "économie à bas carbone", voire "décarbonée".

Ainsi, le secteur de l’aviation civile, qui jusqu’à présent était en dehors des accords climatiques, bien qu’il contribue à plus de 2% des émissions mondiales de gaz à effet de serre, a adopté le 6 octobre 2016 le système CORSIA de compensation de ses émissions (Carbon Offset and Reduction Scheme for International Aviation). Une bourse d’échange permettra aux compagnies aériennes d’acheter des "crédits carbone" à d’autres secteurs économiques. D’abord expérimental puis volontaire de 2021 à 2026, le système deviendra obligatoire en 2027 et jusqu’en 2035. L’objectif est que, en se fixant comme base les niveaux d’émissions de CO2 de 2020, l’augmentation des émissions soit entièrement compensée.

Des ONG et chercheurs rappellent que la compensation carbone (déjà prévue dans le "Mécanisme de développement propre" du Protocole de Kyoto) et les "marchés carbone" comme le marché instauré dans l’Union européenne, n’ont jamais permis de diminuer les émissions de gaz à effet de serre, voire ont créé des spéculations financières, de la corruption et des projets néfastes pour les populations locales, notamment dans le domaine de l’agriculture et des forêts. Le secteur de l’aviation est en plein boom ; à une telle échelle, comment générer autant de projets de compensation ? Plutôt que de continuer à polluer en achetant des certificats de réduction d’émissions de GES à d’autres opérateurs qui eux sont censés diminuer leurs émissions dans une autre partie du monde (souvent au "Sud"), la seule solution est de réduire l’empreinte carbone. Par exemple, ne pas construire ou agrandir des infrastructures inutiles.

Ressources

- Notre article de bilan de la COP22 >>>>
- Notre article d’analyse COP21 >>>>
- Informations sur la COP 22 >>>>
- Notre article sur le changement climatique >>>>

- Suivi des ratifications de l’Accord de Paris >>>>
- Rapport annuel du PNUE sur l’écart entre les besoins et les perspectives en matière de réduction des émissions ; Téléchargement du rapport (en anglais)

- Position des ONG françaises pour la COP22 (pdf 23 p.)

- Chiffres-clé climat, ministère du DD, Edition 2017 (pdf 80 p.)

- Consultation publique sur la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) >>>>
- Texte du projet de PPE >>>>
- avis du CNTE : >>>>
- Avis de l’autorité environnementale >>>>
- argumentaires du Réseau Action Climat : >>>> et >>>>

- Etude Stratégie nationale bas carbone : une évaluation macroéconomique, novembre 2016 >>>>
- Edition juillet 2016 de la brochure « La loi de transition énergétique pour la croissance verte » >>>>
- Dossier législatif « Energie : transition énergétique pour la croissance verte » >>>>

- Rapport de l’Ademe : 100% énergie renouvelables >>>>

- Pétition "le secteur aéronautique doit réduire ses émissions, pas les compenser !"

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