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Mémorandum en faveur du Sommet Mondial pour le Développement DurableMercredi 10 décembre 2008 Intitulé encore "L’équité dans un monde fragile", ce "Mémo’ de Jo’burg" a été publié par la Fondation Heinrich Böll dans la perspective du Sommet de Johannesburg, puis réactualisé et réédité ensuite en 2002. Ecrit par de nombreux experts sollicités par la Fondation, « le Mémorandum soulève la question centrale, mais souvent oubliée, suivante : "D’accord pour le développement, mais quel type de développement et pour qui ?" Ses recommandations sont solidement
fondées sur les principes de l’écologie soutenable et
l’équité. » |
C’est à la Conférence de l’ONU sur l’Environnement et le Développement de Rio en 1992 que le terme « développement durable » a été lancé comme nouvelle définition du progrès. L’idée s’est répandue au plan international, mais les résultats jusqu’à aujourd’hui restent mitigés. Dix ans plus tard, en août 2002, Le Sommet Mondial de Johannesburg pour le Développement Durable sera l’occasion d’une réflexion, d’un réajustement. A cette occasion, la communauté internationale tentera d’affronter les défis posés par une pauvreté chronique et par une richesse avide de ressources.
Ce Mémorandum propose un agenda en faveur de l’équité et de l’écologie pour la prochaine décennie. Il a été rédigé par un groupe de 16 militants indépendants, des intellectuels, des dirigeants, des politiciens réunis par la Fondation Heinrich Böll en vue de contribuer au débat global en partant d’une perspective de société civile. Il ne s’agit ni d’une plate-forme politique ni d’une analyse d’experts mais bien d’un « mémorandum » dans le vrai sens du terme ; il tente d’exposer ce qui nous semble important de ne pas oublier.
Les pays du Sud – à commencer par le pays hôte l’Afrique du Sud – envisagent Johannesburg comme un sommet sur le développement plutôt que sur l’environnement. Ceci est pleinement justifié étant donné la négligence systématique des notions d’équité et de justice par le monde politique. Mais il s’agirait d’une forme de régression, un retrait par rapport à Rio si cet état de fait devait résulter en une négligence future de l’état de la Biosphère. Ce Mémorandum, au contraire, argumente qu’il est grand temps pour le Sud (de même pour que les économies en transition) d’embrasser la cause de l’environnement. Le souci de l’environnement est crucial pour assurer aux groupes marginalisés des habitants de la planète, les moyens d’existence et l’accès à la santé. En fait, il ne peut y avoir d’éradication de la pauvreté en dehors de l’écologie. En outre, une stratégie de l’environnement est indispensable pour dépasser l’ombre hégémonique du Nord, pour faire un saut au-delà des modes de développement basés sur les combustibles devenus historiquement obsolètes.
Ce chapitre évalue les dix années qui se sont écoulées depuis la Conférence de Rio. Il souligne le paradoxe entre le fait que le processus de Rio a initié de nombreuses procédures institutionnelles avec succès sans toutefois produire des résultats globaux tangibles. En particulier, la mondialisation économique a largement balayé les gains obtenus au niveau local en propageant à travers le monde une économie d’exploitation et en exposant les ressources naturelles au Sud et en Russie à la traction du marché mondial.
Cette partie identifie quatre thèmes de fond qui devraient être sous-jacents à tous les débats se déroulant au Sommet. Avec par dessus tout, la question des plus critique de la signification de l’équité dans un espace environnemental limité. D’un côté la justice appelle à un élargissement des droits des pauvres à leur habitat, alors que de l’autre elle exige de réduire l’accès des riches aux ressources naturelles. La nécessité des communautés locales au maintien de leurs moyens d’existence, se heurtent souvent aux intérêts des classes urbaines et ceux des sociétés commerciales à augmenter la consommation et les profits. Ces conflits de ressources ne s’atténueront pas, à moins que la richesse économique du globe ne s’appuie sur des modes productifs de ressources basés sur la production et la consommation.
Ce chapitre va à l’encontre de la prudence conventionnelle qui énonce que l’éradication de la pauvreté est en opposition avec le souci de l’environnement. Au contraire les moyens d’existence ne peuvent être maintenus sans un accès sécurisé à la terre, aux semences, aux forêts, aux pâturages, aux zones de pêche et à l’eau. De plus, la pollution de l’air, des sols, de l’eau et de la nourriture affecte, de manière chronique, la santé des pauvres, tout particulièrement dans les villes. La protection de l’environnement par conséquent, n’est pas en contradiction avec l’élimination de la pauvreté mais elle en est sa condition. En ce qui concerne les pauvres, il ne peut y avoir d’équité sans écologie. Etant donné que la conservation des ressources s’appuie sur le renforcement des droits de la communauté, l’inverse est également vrai il ne peut y avoir d’écologie sans équité.
Ce chapitre met l’accent sur le fait que la diminution de la pauvreté est indissociable de celle de la richesse. L’espace environnemental mondial est divisé de manière inégale. Obtenir davantage de droits pour les sous-consommateurs dans le monde sur les ressources naturelles implique de réduire les revendications des sur-consommateurs sur celles-ci au Nord et au Sud. Le nanti devra se déplacer vers des styles de richesse qui s’accommodent de ressources légères.
Ceci n’est pas qu’une question d’écologie mais de justice ; sans quoi la majorité des citoyens du monde sera privée de sa juste part du patrimoine naturel. Comme chacune des conventions sur le climat et la biodiversité le suggère, en ce qui concerne les nations, il ne peut y avoir d’équité sans écologie. Et inversement, il ne peut pas y avoir d’écologie sans équité parce que les accords n’aboutiront pas à moins d’être vus comme justes.
Cette partie propose des changements dans les infrastructures institutionnelles au niveau international pour renforcer l’intendance de l’environnement et les droits aux moyens d’existence.
Les Droits. Démocratiser les systèmes de gouvernance est la meilleure façon de protéger l’environnement.
Une convention cadre, sur les droits aux ressources pour les communautés locales, consoliderait les droits pour les habitants des zones riches en ressources, dont les moyens d’existence sont menacés par l’exploitation des mines, du pétrole, du bois et autre industrie extractive. En outre, les droits environnementaux – y compris le droit à une information complète, les droits du consommateur et les principes de précaution, de prévention et du pollueur-payeur – doivent être entérinés par la loi à tous les niveaux.
Le Prix des Structures. Les prix du marché doivent mieux refléter la vraie nature des coûts environnementaux.
La prise en compte des coûts totaux exige la suppression des subsides pervers à l’environnement et une réforme de l’impôt, dans laquelle les taxes sont transférées de la valeur du travail vers la consommation des ressources, la pollution et les déchets. Cette prise en compte des coûts totaux exige également un prix d’utilisation des biens communs mondiaux, comme en particulier l’atmosphère, le ciel et les mers. La fixation des prix totaux devra assurer que les décisions économiques soient prises en fonction d’un impact minimum sur l’environnement.
La gouvernance du marché. Les régimes de commerce international ne devraient pas seulement favoriser l’efficacité économique mais aussi la durabilité et l’équité.
De ce point de vue, une libéralisation du marché comme celle préconisée par l’OMC menace la cohérence sociale, ébranle la sécurité alimentaire et met en danger les écosystèmes un peu partout. Ce n’est pas de libre échange dont le Nord et le Sud ont besoin mais d’échange équitable.
Le libre échange doit être au service des causes plus grandes comme celles des droits de l’homme et de la viabilité. Ce qui signifie que les nations devraient avoir plus d’occasions de réglementer le commerce en vue de protéger le bien public. Cette démarche exige que les traités concernant l’environnement aient la priorité sur les accords de libre échange.
Par ailleurs, les relations commerciales ainsi que la conduite des agents économiques doivent être ajustées pour promouvoir l’idée des droits de l’homme et celle de la durabilité. En plus du code de conduite vérifiable des sociétés commerciales, il serait nécessaire d’avoir un cadre de production socialement responsable dont les principes s’appliqueraient à toutes les activités commerciales.
Pour terminer, l’architecture financière globale devrait être remaniée tout comme une taxe sur les taux de change spéculatifs, l’allégement de la dette et le commerce électronique accru d’échanges transfrontaliers.
Les Innovations Institutionnelles. Un nouvel agenda historique devrait être scellé dans de nouvelles institutions.
- Tout d’abord, le PNUD doit être élevé au rang d’Organisation Mondiale de l’Environnement.
- En second lieu, l’Agence Internationale de l’Energie Renouvelable, organisée de manière décentralisée, devrait être mise sur pied.
- Enfin, le Mémorandum se bat en faveur d’une Cour d’Arbitrage
Internationale.