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Violences de genre en milieu scolaire en Afrique subsaharienne francophone : visibiliser et mener un plaidoyerMinistère des Affaires étrangères et européennes Mercredi 1er décembre 2010 |
Initiative du Groupe de travail sur les violences de genre en milieu scolaire en Afrique subsaharienne francophone.
En mai 2011, le groupe de travail international sur les violences de genre en milieu scolaire et leurs impacts sur la scolarisation des filles a été crée. Il est composé de partenaires tels que : UNESCO, UNICEF, l’Initiative des Nations Unis pour la scolarisation des filles, PLAN International, le Forum des femmes éducatrices africaines (FAWE), l’Organisation internationale de la francophonie (OIF), l’Observatoire international des violences à l’école, l’Agence française de développement, le Centre International pour l’Education des Filles et des Femmes en Afrique de l’Union Africaine (CIEFFA) et le Réseau Genre en Action. Le Secrétariat est assuré par le Ministère des Affaires Etrangères et Européennes français.
identifier et visibiliser les phénomènes de violences de genre en milieu scolaire et leurs impacts sur la scolarisation des filles
mener un plaidoyer en direction des Etats, des acteurs de l’éducation et des bailleurs pour une meilleure prise en compte de ces violences comme facteurs de déscolarisation des filles au sein des programmes et politiques d’éducation pour Tous.
Les violences scolaires frappent de nombreux enfants partout dans le monde, notamment sur le continent africain. En 2006, le rapport du Secrétaire Général des Nations Unies sur la violence à l’encontre des enfants fait état de nombreuses violences subies dans le cadre scolaire, tels que les châtiments corporels, les brimades, les mauvais traitements et les violences sexuelles.
Parmi celles ci, les violences de genre en milieu scolaire revêtent des formes diverses : viols, sévices sexuels, harcèlement sexuel, utilisation d’un langage humiliant envers les élèves, assignation des filles à des tâches domestiques à l’école, mais également le sexe économiquement forcé ou transactionnel qui s’apparente au phénomène d’exploitation sexuel des enfants. Par ailleurs les mariages forcés et les grossesses précoces contribuent largement à exclure les jeunes filles de l’école alors qu’elles sont en plein cursus scolaire.
Les filles sont les premières victimes de ce type de violences qui sont des obstacles à leur scolarisation. La reconnaissance des violences de genre comme facteur de déscolarisation des filles est souvent insuffisante et peu prise en compte dans les politiques et les programmes d’Education pour Tous.
En Côte d’Ivoire, le ministère de l’éducation national a relevé que 37% des filles abandonnaient l’école suite à une grossesse non désirée et que dans la majorité des cas, ce sont les enseignants qui en étaient les auteurs. Des recherches menées en Ouganda ont montré que 8% des garçons et des filles interrogés avaient eu des rapports sexuels avec leurs enseignants et 12% avec le personnel auxiliaire. Au Bénin, 75% des filles du secondaire et 40% des filles du primaire ont déclaré avoir subies des pressions pour accepter des relations sexuelles et respectivement 50% et 60% déclarent des attouchements inappropriés.
En 2006, le Ministère des Affaires Etrangères et Européennes a publié une étude sur les violences de genre en milieu scolaire en Afrique subsaharienne, qui a été suive d’un colloque à l’UNESCO en 2006. L’ONG Plan International a lancé depuis 2008, la campagne « Apprendre sans peur » de lutte contre les violences en milieu scolaire. Des études ont été menées au Ghana et au Togo et d’autre sont en cours au Mali et au Cameroun et devraient être lancées en Sierra Leone, au Sénégal et en Guinée Conakry. L’UNESCO a mis en ligne un forum de discussion sur les questions liées à la scolarisation des filles qui fait état de nombreuses préoccupations liées à la gestion des violences sexuelles en milieu scolaire ; au Burkina Faso, le Forum des femmes éducatrices africaines (FAWE) travaille en collaboration avec les ministères de l’éducation et de la promotion féminine à l’élaboration d’une loi qui pénalise le harcèlement sexuel à l’école. Des initiatives similaires ont été mise en œuvre au Mali et au Ghana qui ont abouti à l’adoption d’une loi de pénalisation.
Ainsi de nombreuses initiatives se conjuguent en faveur d’une plus grande reconnaissance et d’un meilleur traitement des violences de genre à l’école.
Les violences de genre peuvent être définies comme « une série de comportements causant des torts physiques, sexuels ou psychologiques qui met en jeu la dimension des rapports sociaux entre les hommes et les femmes, des inégalités de pouvoirs entre les sexes et qui frappent particulièrement les filles. »
En effet, les rapports reconnaissent que dans les sociétés où les femmes ont un statut inférieur et où des pratiques comme l’infanticide, l’excision et les crimes d’honneur existent, les filles risquent plus de souffrir de violences sexuelles à l’école . Si les garçons sont également touchés par les violences sexuelles, les jeunes filles sont nombreuses à déclarer des cas d’abus, tels que la charge de la corvée d’eau pour la classe, l’accomplissement de tâches domestiques chez l’enseignant, le harcèlement sexuel et le viol. Dans les deux cas, les rapports sociaux de sexes et les identités de genre sont des enjeux incontournables.
Pour Thymée N’Dour , les violences tenant au genre à l’école mettent en jeu des dimensions multiples : économiques ( cas du sexe transactionnel) ; socioculturelle ( tabou sur l’éducation à la sexualité et inégalités entre les femmes et les hommes) ; et sanitaires ( faibles utilisation du préservatifs et de la contraception entraînant une transmission des maladies sexuellement transmissibles, du VIH-SIDA ainsi que des grossesses non désirées) qui s’articulent avec deux autres dimensions : une dimension qui concerne la violence d’enseignants envers les élèves ; et une dimension de genre qui concerne la violence masculine envers les élèves filles, voire les enseignantes. Les relations de violences mettent également en jeu des relations de pouvoir . Le sexe transactionnel qui désigne le fait d’avoir une relation sexuelle en échange d’argents ou de cadeaux montre bien la relation asymétrique entre des enseignants qui marchandent des bonnes notes contre des faveurs sexuelles et des élèves qui souhaitent terminer leurs études. Au Burkina Faso, elle est connue sous le nom de MST (Moyenne sexuellement transmissible). Les élèves et les adultes dans les établissements scolaires reconnaissent que c’est une pratique courante .
Les conséquences des abus sexuels sont à la fois sanitaires et éducatives. Les viols entraînent des traumatismes psychologiques, une exposition aux maladies sexuellement transmissibles y compris le VIH/SIDA et des grossesses non désirées qui entraînent des exclusions quasiment systématiques.
Au niveau éducatif, les violences entraînent un stress, l’incapacité de se concentrer sur le travail scolaire et une opinion négative de soi. Beaucoup de filles quittent momentanément ou abandonnent l’école par peur que leurs agresseurs continuent d’abuser d’elles. Au Botswana, 67 % des filles déclarent avoir subi du harcèlement sexuel de la part d’enseignants, majoritairement au début du secondaire, parmi celles-ci 11% déclaraient envisager sérieusement de quitter l’école.
De plus, les violences d’enseignants envers les élèves ont des conséquences directes sur l’environnement scolaire et sur le comportement des élèves garçons envers les élèves filles en véhiculant le préjugé que la réussite scolaire dépend de faveurs sexuelles.
L’engagement des Etats et la responsabilisation des enseignants sont identifiés comme des éléments clés de la lutte contre les violences de genre à l’école. Parmi les solutions identifiées par les acteurs impliquées sur ces sujets, on peut relever :
La formation des enseignants sur les questions de genre à l’école et la révision du matériel pédagogique
la création de systèmes de signalement et de gestion de la violence en milieu scolaire (signalement ; prise en charge sanitaire et sociale,..)
l’adoption par les ministères de l’Éducation de plans de lutte contre les violences à l’école, de codes de conduite pour les enseignants et de directives pour la prise en charge et le traitement des violences,
la pénalisation des actes de violence et la poursuite systématique de leurs auteurs,
la mise en place de services pour les victimes,
l’implication des chefs de communautés et des parents d’élèves sur ces questions.
Plus largement, le traitement de la violence de genre à l’école doit s’articuler avec les politiques en faveur de la scolarisation des filles et en faveur du respect des droits des femmes et de l’égalité des sexes dans les sociétés et de la reconnaissance des femmes comme actrices de développement.