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2ème Document d’orientation stratégique Genre et développement 2013-2017

Vendredi 23 août 2013

Le Gouvernement a adopté une nouvelle stratégie "genre et développement" pour la période 2013-2017. Selon le relevé de décision de la réunion du Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID) du 31 juillet 2013, l’objectif est de « mettre les droits des femmes au coeur de la politique de développement ». Pour cela, la nouvelle stratégie « prévoit une prise en compte systématique d’un objectif transversal "genre" dans les procédures d’élaboration, de suivi et d’évaluation des projets : cette approche intégrée passera dans les partenariats différenciés, en particulier dans les pays pauvres, par une révision de tous les instruments du développement ainsi que par le renforcement des capacités des agents et le soutien à la recherche. La nouvelle stratégie, mise en oeuvre par l’ensemble des ministères traitant de politique de développement et tous les opérateurs, sera évaluée annuellement par le Haut Conseil à l’Egalité entre les femmes et les hommes (HCE). »
Texte du nouveau DOS genre 2013 - 2017 ci-dessous et en téléchargement pdf.


TABLE DES MATIERES

I. Préface

II Introduction

III Genre et développement

IV La « Boussole » de l’égalité

V Contexte et Enjeux
→ 1) Les droits des femmes et l’égalité femmes-hommes : une priorité de l’action extérieure de la France, en conformité avec ses engagements internationaux
→ 2) Les femmes et les filles ne bénéficient toujours pas à part égale des politiques de développement
→ 3) La mobilisation contre la montée des conservatismes : un enjeu essentiel des prochaines conférences internationales

VI Cohérence et implication des acteurs
→ 1) L’inscription dans les cadres européens et internationaux
→ 2) L’alignement sur les priorités nationales et le dialogue avec la société civile

VII Objectifs et principes d’action
→ 1) Nos objectifs
→ 2) Nos Principes d’actions
- (a) L’approche par les droits
- (b) L’approche par l’efficacité
- (c) l’autonomisation, l’émancipation ou la prise de pouvoir
- (d) Cibler les adolescentes et adopter une approche par cycle de vie
→ 3) Les axes d’intervention : mieux prendre en compte les enjeux de genre dans toutes les actions de développement
- (a) Renforcer la prise en compte du genre dans tous les instruments de financement du développement
- (b) Organiser la formation interne en genre et développement et la coordination de correspondant(e)s genre
- (c) Valoriser et soutenir les travaux de recherche, notamment de recherche opérationnelle, et soutenir l’expertise française et francophone en genre et développement
- (d) Défendre l’égalité femmes-hommes dans le dialogue bilatéral, dans les instances européennes et internationales et dans notre engagement multilatéral
- (e) Améliorer la redevabilité et la traçabilité de l’aide consacrée à l’égalité femmes-hommes

VIII Déclinaisons sectorielles
→ 1) La santé sexuelle et reproductive des femmes
→ 2) Autonomisation économique, accès aux ressources économiques et productives, sécurité alimentaire
→ 3) Droits à une éducation complète et de qualité et à la formation professionnelle
→ 4) La lutte contre toutes les formes de violences basées sur le genre, l’accès à la justice et aux droits
→ 5) Gouvernance démocratique et participation politique
→ 6) Environnement et changement climatique
→ 7) Droits culturels et accès aux médias
→ 8) Accès aux services et infrastructures, eau et assainissement

IX Suivi-évaluation et cadre logique
→ 1) Le suivi-évaluation de la stratégie
- (a) Le suivi annuel du Haut conseil à l’
- (b) Le rôle de la plateforme « genre et développement »
→ 2) Le cadre logique


I. PREFACE

Le nouveau souffle de l’égalité

Par M. Pascal Canfin, Ministre délégué chargé du développement

La promotion des droits des femmes et l’égalité entre les femmes et les hommes est une priorité du gouvernement. Dès le 30 novembre 2012, lors de la première conférence interministérielle pour l’égalité, le Ministère des Affaires étrangères s’est engagé, ainsi que tous les autres ministères, en adoptant une « Feuille de route pour l’égalité » qui couvre à la fois le domaine de l’égalité professionnelle et salariale des agents de l’Etat mais également la politique extérieure de la France. La nouvelle stratégie « genre et développement » est un des volets de cette Feuille de route.

Depuis mon arrivée, en tant que Ministre délégué chargé du développement, j’ai fait, avec Laurent Fabius, de la promotion des droits des femmes et de l’égalité entre les femmes et les hommes un enjeu incontournable de la politique de développement.

Soutenir la prise en compte du genre dans les politiques de développement, c’est d’abord regarder le monde en face. C’est reconnaître que les inégalités de genre sont une composante structurante de la pauvreté. Au-delà des statistiques que vous lirez dans ce document, c’est écouter celles et ceux qui, du Nord au Sud, vous racontent la réalité des violences, des interdits, des vies brisées, mais aussi des réussites et des espoirs. C’est entendre les mots terribles de Julienne Lusenge, responsable d’une ONG en RDC, lorsqu’elle vous dit « ici le corps des femmes est le champ de bataille des hommes ». C’est permettre à des jeunes filles maliennes d’accéder à des formations professionnelles en mécanique, et pas simplement en couture ou en cuisine, dans les centres financés par l’Agence Française de Développement. C’est également assister à un discours du Président de la République devant l’Assemblée nationale sénégalaise qui compte 50% de femmes parlementaires.

Soutenir la prise en compte du genre et de l’égalité dans les politiques de développement c’est renforcer l’efficacité de notre aide, parce que l’accès des femmes et des jeunes filles est un facteur évident de réussite pour nos actions, qu’elles se situent dans le cadre bilatéral ou dans le cadre multilatéral.

Soutenir la prise en compte du genre et de l’égalité dans les politiques de développement c’est aussi affirmer notre tradition française de défense des droits universels dans les instances internationales et auprès de nos partenaires.

Soutenir la prise en compte du genre et de l’égalité dans les politiques de développement c’est se mettre en ordre de marche pour que chaque projet de développement soit pensé dès sa conception au regard de l’égalité.

Soutenir la prise en compte du genre et de l’égalité dans les politiques de développement, c’est par exemple s’assurer que lorsqu’une école est financée par l’aide française les questions du transport des filles, des sanitaires différenciés, de la lutte contre les violences en milieu scolaire ont été pensés en amont, c’est s’assurer que les femmes et les jeunes filles auront un accès simple aux centres de santé financés par l’aide française.

Issue d’une large concertation avec la société civile et d’une évaluation du texte antérieur pilotée par le Haut Conseil à l’égalité entre les Femmes et les Hommes et la Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme, la nouvelle stratégie genre crée une nouvelle dynamique politique au service de l’égalité. En engageant un processus ambitieux de réforme de nos procédures de financement visant à une meilleure prise en compte du genre et de l’égalité, en assurant une formation des agents du MAE dans ce domaine, en soutenant la recherche, en impliquant l’ensemble des opérateurs dans ce nouveau souffle, en renouvelant le dialogue avec les sociétés civiles et les partenaires du sud et du nord, nous créons les moyens du changement aux services de nos convictions. Ce changement sera mesuré chaque année afin de faire vivre et de renforcer le réflexe de l’égalité dans l’ensemble de nos actions de développement.

Le pari est immense, notre mobilisation est totale.


SIGLES

AEFE : Agence pour l’enseignement français à l’étranger
AFD : Agence française de développement
APD : Aide publique au développement
BM : Banque mondiale
CAD-OCDE : Comité d’aide au développement de l’Organisation pour la coopération et le développement économique
CFI : Canal France international
CNCDH : Commission nationale consultative des droits de l’Homme
FSP : Fonds de solidarité prioritaire
FSD : Fonds sociaux de développement
HCE : Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes
IF : Institut français
MAE : Ministère des Affaires étrangères
ONU Femmes : Entité des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes
OSIM : organisations de solidarité internationale issues de la migration
SCAC : Service d’action et de coopération culturelle


II. INTRODUCTION

En décembre 2007, la France s’est dotée d’un premier Document d’orientation stratégique « Genre et développement », fixant le cadre de l’action de la France dans le domaine de l’égalité femmes-hommes et des droits des femmes dans sa politique de développement.

En 2011-2012, le Haut Conseil à l’Egalité [1] et la Commission nationale consultative des droits de l’Homme ont mené le processus d’évaluation de la mise en œuvre de la stratégie, en concertation avec un groupe de travail composés d’expert-e-s, de représentant-e-s de la société civile et de parlementaires.

Le rapport d’évaluation, qui a été remis au Ministre délégué chargé du Développement le 10 janvier 2013 reconnaît l’action de la France en faveur de la défense des droits des femmes et de l’égalité femmes-hommes dans les enceintes internationales. Il souligne également l’intérêt des programmes spécifiques de réduction des inégalités, comme le projet sur « l’autonomisation économique des femmes en Afrique » financé par le Fonds de solidarité prioritaire (FSP), les programmes de scolarisation des filles portés par le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) en Afrique de l’Ouest, le partenariat avec ONU Femmes sur les violences faites aux femmes et les programmes de santé sexuelle et reproductive menés dans le cadre des engagements du G8 de Muskoka, sur la lutte contre la mortalité maternelle et infantile.

Le rapport souligne cependant la faiblesse de la prise en compte transversale des questions de genre dans la politique de développement de la France, ainsi que le manque de moyens et de visibilité. Il rappelle l’importance de la formation des agents, de la mise à disposition d’outils méthodologiques adaptés et de la réforme des procédures d’instructions, de suivi et d’évaluation des projets et des programmes, afin d’assurer une véritable intégration des objectifs d’égalité entre les femmes et les hommes dans la politique française de développement.

Enfin, il rappelle la nécessité pour la France de mieux utiliser le marqueur genre de l’Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE) qui permet d’évaluer la part de l’aide publique au développement (APD) française consacrée à la réduction des inégalités liées au sexe.

L’évaluation fait écho aux conclusions de l’examen par les pairs mené par le Comité d’aide au développement de l’OCDE en 2013, qui recommande que la France adopte une nouvelle stratégie à même de renforcer les capacités des agents, de réformer les procédures d’instruction et de suivi de projets, de mettre à disposition les outils méthodologiques et les ressources financières adéquats [2].

Pour répondre à ces enjeux, le Ministre délégué chargé du Développement, M. Pascal Canfin, a lancé le processus d’actualisation de la stratégie française de « genre et développement ».

La dynamique a permis d’associer l’ensemble des acteurs et actrices du développement : le Ministère des Affaires étrangères et ses opérateurs, l’Agence française de développement, France expertise internationale, l’Institut Français, Canal France international, l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, Campus France, ainsi que les ONG françaises regroupées notamment au sein de Coordination Sud, et les représentant(e)s de la coopération décentralisée et de la recherche.

Les réflexions se sont organisées autour de deux journées de travail, le 30 avril et le 7 juin 2013, qui ont permis d’enrichir les différents axes de la stratégie, à partir des orientations et des priorités d’action de chacun(e).

La présente stratégie genre et développement est ainsi le fruit de cette collaboration. Elle définit les priorités de la France dans le domaine de la promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes et constitue un cadre d’action pour tous les partenaires du développement.

Adoptée en Comité interministériel pour la Coopération internationale et le développement, le 31 juillet 2013, elle prendra effet en août 2013 pour une période de 4 ans. Elle sera évaluée annuellement par le Haut Conseil à l’Egalité.


III. GENRE ET DEVELOPPEMENT

« On ne naît pas femme, on le devient ». (Simone de Beauvoir, « Le deuxième sexe » 1949)

L’approche genre part du constat que les inégalités entre les femmes et les hommes sont construites par les sociétés. Ces inégalités résultent des rôles masculins et féminins assignés sur la base de différences biologiques. L’approche genre remet en cause les processus de hiérarchisation des individus en fonction de leur sexe et les discriminations qui en découlent.

L’approche genre à pour objectif final l’égalité des droits entre les femmes et les hommes ainsi qu’un partage équitable des ressources et des responsabilités entre les femmes et les hommes. En tant que méthodologie, elle produit une analyse comparée des situations des femmes et des hommes et favorise une meilleure prise en compte des inégalités dans tous les secteurs du développement.

L’approche genre défend l’universalité des droits et l’égal accès à la justice. L’approche genre et développement vise l’autonomisation des femmes. C’est un processus d’acquisition « de pouvoirs » au niveau individuel et collectif. Il désigne la capacité d’agir de façon autonome, la capacité à faire des choix et à prendre des décisions pour sa vie et sa société.

A terme, elle est un des facteurs qui engendre une aide au développement juste, équitable et durable.


IV. LA « BOUSSOLE » DE L’EGALITE

Objectif principal : Mettre l’égalité femmes-hommes de façon transversale au coeur de la politique française de développement

Objectifs secondaires Résultats attendus Indicateurs de résultats Calendrier de réalisation
Prendre en compte le genre dans tous les instruments de financement du développement Tous les instruments de financement du développement intègrent le genre dans leurs procédures. La moitié des projets sont instruits, mis en oeuvre, suivis et évalués en prenant en compte le genre. En 2017, 100% de l’APD est évaluée selon le marqueur genre de l’OCDE. Au moins 50% des projets et programmes financés reçoivent la note 1 ou la note 2, à l’exception des financements apportés sous forme d’aide budgétaire globale ou sectorielle ou de ligne de crédit non affectée. 30% en 2014
40% en 2015
45% en 2016
50% en 2017

reçoivent les notes 1 ou 2
Renforcer les capacités des agents sur les questions de genre et développement Des sensibilisations et des formations en genre sont organisées à destination des agents du développement En 2017, 90% des rédacteurs/trices, chefs de pôle, et sous directeurs/trices de la DGM ; des chefs de projets et des managers de l’AFD ont reçu une formation ou une sensibilisation sur le genre 30% en 2014
50% en 2015
75% en 2016
90% en 2017
Mobiliser et soutenir la recherche sur le genre et le développement pour définir des objectifs et des indicateurs communs par secteur de développement Les travaux de recherche sur le genre et le développement sont développés dans de nouveaux domaines de développement En 2015, un colloque national est organisé

En 2017, des objectifs et des indicateurs communs au MAE et à l’AFD sont définis dans chacun des secteurs de la coopération
Evolutif
Mettre la question de l’égalité femmes - hommes et des droits des femmes au coeur du dialogue bilatéral Améliorer le dialogue politique sur le genre avec les ministères des femmes et les organisations de la société civile dans les pays partenaires Une rencontre annuelle est organisée avec les ministres et les organisations de la société civile Chaque année
Continuer de promouvoir l’égalité dans les enceintes européennes et multilatérales La France joue un rôle leader de la France dans la défense et la promotion des droits des femmes et de l’égalité entre les femmes et les hommes La France est représentée à Haut niveau lors de la Commission sur le statut des femmes et participe activement aux négociations Chaque année
Garantir la redevabilité des engagements pris dans le cadre de la stratégie « genre et développement » L’APD consacrée au genre est disponible et mesurée, la mise en oeuvre de la stratégie genre et développement est accompagnée et évaluée annuellement Publication annuelle des données sur l’aide au développement française consacrée au genre, y compris l’évaluation de la stratégie « genre et développement » Chaque année


V. CONTEXTE ET ENJEUX

1 - Les droits des femmes et l’égalité femmes-hommes : une priorité de l’action extérieure de la France, en conformité avec ses engagements internationaux

La France a ratifié en 1983 la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDEF). En 1994, elle a adopté le Plan d’Action du Caire sur la population et le développement, puis le Plan d’action de Pékin, en 1995, lors de la conférence mondiale des femmes.

La conférence de Pékin a permis le passage d’une approche appelée « femme et développement », qui visait uniquement à satisfaire les besoins pratiques des femmes sans remettre en question les inégalités basées sur le sexe, à une approche dite « genre et développement », dont l’objectif final est la réduction des inégalités et une plus grande autonomisation des femmes. L’atteinte de cet objectif est permise par une remise en cause des rapports de pouvoirs et de domination existants entre les femmes et les hommes ainsi qu’un accès universel aux droits.

Active pour la défense et de la promotion des droits des femmes dans les enceintes internationales, la France participe annuellement à la Commission sur la condition de la femme des Nations unies. Depuis 2006, elle présente tous les deux ans avec les Pays Bas, à l’Assemblée générale des Nations unies, une résolution sur l’intensification de l’action menée pour éliminer toutes les formes de violence à l’égard des femmes.

Elle a contribué à l’adoption des résolutions « Femmes, paix et sécurité » (résolutions 1325, 1820, 1888, 1889, 1960) du Conseil de sécurité qui appellent les Etats à renforcer la protection des femmes pendant les conflits et à renforcer la participation des femmes aux négociations de paix et aux processus décisionnels. En octobre 2010, elle a adopté un plan national d’action pour la mise en œuvre de ces résolutions. Elle soutient l’action menée par la Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations unies chargée de la lutte contre les violences sexuelles dans les conflits et la désignation de conseillers chargés de la protection des femmes au sein des Opérations de maintien de la paix.

La France a soutenu la création d’ONU Femmes. En mai 2012, elle a renforcé son partenariat avec la signature d’un accord-cadre de coopération autour de sept axes d’intervention communs : la participation des femmes dans les espaces décisionnels, notamment dans les situations de transition politique, la lutte contre toutes les formes de violences faites aux femmes, la lutte contre les discriminations faites aux femmes dans la loi et dans la pratique, l’autonomisation économique des femmes, l’implication des femmes dans les processus de paix et de sécurité, la planification et la budgétisation nationales, la santé sexuelle et reproductive. Cet accord prévoit également la tenue de consultations annuelles de haut niveau.

La France a activement participé à l’élaboration de la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, dont elle est l’un des premiers signataires (mai 2011) et dont la procédure de ratification est en cours.

La première conférence interministérielle pour l’égalité, le 30 novembre 2012, a permis l’adoption par tous les ministères du gouvernement de « Feuilles de route pour l’égalité » qui couvrent à la fois les domaines de l’égalité professionnelle et salariale et les politiques publiques. La nouvelle stratégie « genre et développement » est un des volets de la Feuille de route adoptée par le Ministère des Affaires étrangères.

2 - Les femmes et les filles ne bénéficient toujours pas à part égale des politiques de développement

Douze ans après l’adoption des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) en 2000, les femmes et les filles font face à des difficultés spécifiques liées à leur statut dans la société et à des discriminations de genre, dans tous les domaines du développement.

- La majorité des pauvres dans le monde sont des femmes. Les femmes travaillent principalement dans le secteur informel et non rémunéré, en particulier lorsqu’elles vivent en milieu rural. Elles assurent 2/3 des tâches domestiques non rémunérées et non comptabilisées dans le calcul du produit intérieur brut.
- 33 millions de filles ne vont pas à l’école. Alors que la part des filles non scolarisées a reculé de 58 % à 53 % en dix ans dans les pays en développement, elles sont encore 32% à ne pas achever un cycle complet d’éducation. Elles sont confrontées à de nombreux obstacles : la pauvreté, les coûts de scolarisation, l’insécurité, les mariages et les grossesses précoces.
- 800 femmes meurent chaque jour de complications liées à la grossesse et à l’accouchement. En Afrique sub-saharienne, le risque de mourir en couches est de 1 sur 39, comparativement à 1 sur 3800 dans les pays en développement. C’est la principale cause de décès chez les adolescentes dans la plupart des pays en développement.
- Près de 17 millions de femmes vivent avec le VIH dans le monde. Les jeunes femmes âgées de 15 à 24 ans sont particulièrement vulnérables, avec des taux d’infection deux fois plus élevés que chez les jeunes hommes.
- Les femmes sont les premières victimes de la raréfaction des ressources naturelles. Leur défaut de participation dans les instances décisionnelles locales ne permet pas de véritablement prendre en considération leurs besoins.
- Les femmes sont sous-représentées dans les espaces décisionnels. Elles détiennent seulement 19,3 % des sièges des chambres uniques ou basses de tous les parlements du monde, bien loin de la parité.
- Une femme sur 6 est victime de violence dans le monde, 60 millions de filles sont mariées avant l’âge de 15 ans et 100 millions sont victimes de mutilations génitales féminines.

3 - La mobilisation contre la montée des conservatismes : un enjeu essentiel des prochaines conférences internationales

Au niveau international, les débats sont marqués par la montée des conservatismes et la remise en question des acquis internationaux relatifs aux droits des femmes.

Les dissensions portent sur la reconnaissance des droits sexuels et reproductifs, l’accès aux services de planification familiale, l’éducation à la sexualité, les pratiques culturelles néfastes et le concept de genre. Plus largement, c’est le caractère universel des droits des femmes qui est remis en cause au nom du relativisme culturel.

Dans ce contexte, les célébrations des anniversaires des 20 ans des Plans d’action du Caire sur la Population et le développement en 2014, et de Pékin sur les Femmes et le développement en 2015 revêtent une importance stratégique particulière.

La France y défend le droit des femmes à disposer de leur corps et l’universalité des droits.

Le Genre dans le nouvel agenda pour le développement « Post 2015 »

Le respect de l’égalité entre les femmes et les hommes est également au cœur de la réflexion sur le nouvel agenda pour le développement, appelé agenda « Post 2015 », dans la continuité des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) et des objectifs de la conférence de Rio sur le développement durable.

La France soutient l’inclusion du genre comme un principe directeur du développement durable. Seul le maintien d’un objectif spécifique en faveur de l’autonomisation des femmes et de l’égalité femmes-hommes qui couvre tous les enjeux du développement, et notamment celui de la lutte contre toutes les formes de violences faites aux femmes, permettra de faire avancer l’égalité. De façon complémentaire, des cibles et des indicateurs spécifiques devront être définis de façon transversale.


VI. COHERENCE ET IMPLICATION DES ACTEURS

La présente stratégie « genre et développement » s’inscrit dans le cadre des engagements européens et internationaux. Elle répond aux priorités nationales des pays partenaires en matière d’égalité femmes- hommes et favorise le partenariat et le dialogue avec les organisations de la société civile.

1 - L’inscription dans les cadres européens et internationaux

La France a soutenu l’adoption du Plan d’action Genre et développement de l’Union européenne présenté en 2010, pendant la Présidence espagnole de l’Union européenne. Le Plan d’action encourage les Etats membres de l’Union européenne à améliorer leurs pratiques en faveur du genre, dans le domaine du plaidoyer politique, de la formation des agents et de l’intégration du genre dans tous les domaines du développement. Il soutient également une meilleure traçabilité des fonds dédiés à la promotion de l’égalité.

Chaque année, les Etats membres et la Commission rendent compte de la mise en œuvre du Plan d’action européen. Leur contribution est rendue publique dans un rapport publié par la Commission européenne.

La France soutient les travaux menés par le Réseau du Comité d’aide au développement de l’Organisation pour la coopération et le développement économique (CAD de l’OCDE) sur l’égalité femmes-hommes (GENDERNET) qui rassemble les experts en genre et développement des ministères et des agences de développement membres du CAD. Elle était membre du Bureau du Réseau entre 2011 et 2013 et a contribué au suivi des travaux dans de nombreux domaines, tels que l’autonomisation économique des femmes, notamment en milieu rural, l’agenda sur l’efficacité de l’aide, le suivi des financements consacrés à l’égalité et récemment la prise en compte du genre dans le nouvel agenda pour le développement « Post 2015 ».

LE GENDERNET travaille sur une série d’initiatives relatives à la mise en œuvre de la Déclaration de Paris sur l’efficacité de l’aide (2005), le Programme d’action d’Accra (2008) et le Partenariat de Busan pour un développement efficace de la coopération (2011). Le travail du réseau a contribué à l’inclusion d’engagements spécifique sur l’égalité femmes-hommes dans le « partenariat de Busan pour une coopération efficace au service du développement » et l’intégration d’un indicateur de genre dans le cadre du suivi des engagements de Busan.

L’exemple de l’agence belge de développement (CTB)

La CTB a adopté une stratégie genre pour la période 2010-2015. Elle a pour objectif d’assurer la prise en compte du genre dans le fonctionnement interne de l’agence et dans toutes les interventions de coopération. Elle prévoit qu’avant 2015, tous les agents contribuent à la promotion du genre et intègre la dimension du genre dans son travail quotidien de manière structurelle et systématique. Dans cette optique, la CTB a mis en place une réforme des procédures de financement, des formations internes et un accompagnement méthodologique pour les porteurs de projets.

Au Bénin, par exemple dans le cadre de sa coopération sectorielle avec les ministères de l’agriculture et de l’éducation, la CTB a soutenu l’élaboration d’une programmation conjointe sur la base d’un diagnostic qui a mis en exergue les situations différenciées vécues par les femmes et les hommes. La CTB a favorisé la mise en place d’un partenariat avec le ministère du genre du Bénin qui sera renforcé et assurera un accompagnement technique des autres ministères dans le domaine du genre. Renforcer les moyens et les compétences des ministères dédiés à la promotion du genre et de l’égalité est un moyen efficace de soutenir l’expertise nationale dans le domaine.

2 - L’alignement sur les priorités nationales et le dialogue avec la société civile

La stratégie « genre et développement » soutient les politiques nationales de promotion de l’égalité. Elle est mise en œuvre en partenariat avec les ministères en charge de l’égalité femmes-hommes, des droits des femmes et/ou du genre.

Elle répond également aux priorités portées par les organisations de femmes et repose sur un dialogue étroit avec toutes les organisations de la société civile.

La France travaille d’ores et déjà en partenariat avec les ministères chargés du genre, de l’égalité et des droits des femmes, dans chacun des pays partenaires. Dans le cadre de la nouvelle stratégie, un dialogue annuel entre ces ministères et les Ambassadeur/drices de France est institué, qui permettra de renforcer le partenariat.

De la même manière, une réunion annuelle sera également organisée dans chaque pays partenaire avec les associations locales de défenses des droits des femmes. Au niveau local, les Ambassades de France et les Services de coopération et d’action culturelle (SCAC) sont à l’écoute des actions menées par les associations. De nombreux projets sont soutenus par les SCAC et par l’Agence française de développement.

En France, les associations partenaires sont soutenues dans le cadre de la Commission genre de Coordination Sud qui rassemble des ONG françaises de développement. La commission genre a pour mission de :

- faciliter des échanges de pratiques et d’expériences sur la question de l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes et sur la mise en œuvre de l’approche genre dans les projets de développement, d’éducation au développement, de plaidoyer, des ONG françaises ;
- sensibiliser le milieu des ONG françaises à l’approche genre ;
- proposer des actions de plaidoyer pour l’intégration du genre dans les politiques de développement et dans les campagnes d’opinion menées par les ONG françaises.

Des initiatives sont également menées en partenariat avec les organisations de solidarités internationales issues de la migration (OSIM).

Le partenariat avec les Organisation de solidarité internationale issue de la migration (OSIM)

La France soutient la spécificité et la valeur ajoutée des diasporas dans la mise en œuvre de projets relatifs à l’autonomisation des femmes.

En 2012, un appel à projets a permis de soutenir des initiatives contribuant à aider les femmes dans leur parcours d’insertion économique et sociale. Mis en œuvre dans 13 pays, 16 projets financés à hauteur de 600 000€ visent à l’amélioration des conditions de vie des femmes et à leur autonomisation. Le libre et égal accès à l’éducation et à la formation ainsi qu’à l’emploi, à l’entreprenariat, à la terre et aux ressources, à l’espace public et aux espaces décisionnels, y sont systématiquement encouragés.

En 2013, un nouvel appel à projets concernant les jeunes filles et jeunes femmes de 10 à 25 ans a été lancé. Des thématiques telles que la lutte contre les violences de genre, dont les mariages forcés, la scolarisation des filles et l’accès aux services de planification familiale et de santé reproductive, y sont traités.



Enfin, la coopération décentralisée sera également mobilisée pour l’intégration du genre dans la préparation, l’instruction, le suivi et l’évaluation de ses propres projets de coopération. Dans cette logique, les appels à projets du ministère des Affaires étrangères en soutien à la coopération décentralisée comporteront une thématique spécifique égalité femmes-hommes et droits des femmes. Le genre sera généralisé comme critère d’évaluation et de notation dès la préparation et l’instruction des projets. Le ministère des Affaires étrangères incitera en outre les collectivités à mieux intégrer l’approche genre dans leur action internationale. Un groupe de travail entre l’Etat et les collectivités territoriales sera mis en place pour préparer un guide des bonnes pratiques.

En République démocratique du Congo, entre 2008 et 2013, un Fonds social de développement (FSD) porté par l’Ambassade de France a financé 20 associations pour le développement d’initiatives portées par des femmes dans le domaine du développement agricole, pour un montant total de 1M€. Un nouveau FSD consacrera 500 000€ à des projets de prise en charge des enfants des rues, avec une approche de genre. Dans ce cadre, un partenariat a été signé avec le Ministère du genre, de la famille et de l’enfant, qui est pleinement associé au processus.


VII. OBJECTIFS ET PRINCIPES D’ACTION

1 - Nos objectifs

L’approche genre permet de rendre visibles des inégalités qui sont le résultat des rapports de pouvoirs entre les femmes et les hommes. Sa prise en compte en amont des politiques permet de mettre l’égalité entre les femmes et les hommes au cœur de notre stratégie de développement, en répondant aux besoins spécifiques des femmes à tous les âges de la vie.

La stratégie « genre et développement » a pour objectif principal de changer les réflexes de travail au sein du ministère des Affaires étrangères afin que dans chacune des interventions françaises d’aide au développement, les femmes et les hommes puissent bénéficier également des fruits du développement. L’introduction de l’approche genre permet d’améliorer la qualité, l’efficacité et la pertinence des projets et des programmes de développement car elle engendre une prise en compte plus large et détaillé des déterminants structurants de la pauvreté.

Par exemple, le Fonds de solidarité prioritaire « genre et autonomisation économique des femmes en Afrique », lancé et 2009 et clôturé en 2013 a permis de faire évoluer des projets d’accompagnement économique à des projets « d’autonomisation » économique. En adoptant une approche genre, les ONG partenaires n’ont plus simplement mené des activités purement économiques et techniques dont l’objectif visait une meilleure rentabilité des activités et une augmentation des revenus. Elles ont questionné l’environnement dans lequel évoluaient ces femmes et la façon dont elles bénéficiaient des fruits de leur travail.

Ainsi, elles ont permis de mettre à jour que : les femmes travaillent 17h par jour contre 10h pour les hommes, qu’elles n’ont pas accès aux meilleures terres, qu’elles ne maîtrisent pas les machines qu’elles utilisent, que la plupart du temps les organisations paysannes et professionnelles sont dirigées par des hommes et que leurs priorités n’y sont pas reflétées, que leurs activités se situent au maillon le moins valorisé de la chaîne de production, que l’augmentation des revenus de la femme pouvait entraîner une baisse des revenus du conjoint. Cette prise de conscience collective a permis de réorienter ou d’impulser de nouvelles activités favorables à une meilleure répartition des tâches, des ressources et des bénéfices.

Nos objectifs :

- l’émancipation des filles et des femmes et le renforcement de leurs capacités à faire des choix, à la fois dans leur vie privée (accès aux moyens de contraception, choix du conjoint.) que dans leur vie professionnelle et publique ;
- le libre et égal accès des femmes et des filles aux droits et à la justice, et la protection contre toutes formes de violences ;
- le libre et égal accès aux services, notamment les services sociaux de base, tels que l’éducation, la santé et la santé sexuelle et reproductive ;
- l’accès et le contrôle des ressources productives et économiques, l’accès à l’emploi décent et l’égalité professionnelle et salariale ;
- la participation des femmes aux espaces de décisions économiques, politiques et sociaux.

2 - Nos Principes d’actions

La France envisage sa démarche d’intégration du genre à travers 4 principes d’actions essentiels.

(a) L’approche par les droits

« Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. [...] Chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés proclamés dans la présente déclaration, sans distinction aucune notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou de toute autre opinion, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation. [...] Tous ont droit à une protection égale contre toute discrimination qui violerait la présente déclaration et contre toute provocation à une telle discrimination. » Déclaration universelle des droits de l’Homme - 1948

Le respect des droits des femmes, l’égalité entre les femmes et les hommes et le refus de toutes les formes de discrimination fondées sur le sexe sont au cœur de la Déclaration universelle des droits de l’Homme. Ces principes sont un fondement de la politique extérieure de la France et de sa politique de développement.

L’approche par les droits est également un puissant accélérateur du développement. Les travaux du centre de développement de l’Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE), montrent qu’il existe une corrélation forte entre la réduction des discriminations de genre et l’amélioration des principaux indicateurs du développement. Par exemple, la participation des femmes à l’emploi formel augmente avec l’élimination des discriminations juridiques et la réduction des mariages précoces.

Autre exemple, comme l’indique le graphique, la probabilité que les filles adolescentes soient infectées par le VIH est deux fois plus élevée que pour les garçons dans les pays où il n’y a pas de loi contre la violence domestique.

Illustration 1 : Corrélation entre l’infection au VIH et l’existence de lois contre les violences basées sur le genre. Source CAD-OCDE

Pour travailler durablement sur le développement d’un pays, la réforme des codes de la famille discriminatoires, la lutte contre les violences de genre, la réduction des inégalités dans l’accès aux ressources économiques et le soutien à la participation des femmes aux espaces décisionnels sont des leviers d’action prioritaires.

L’approche par les droits signifie également que les populations concernées, y compris les femmes, connaissent leurs droits. En ceci, l’approche par les droits est liée au principe d’empowerment.

Il existe très souvent un décalage entre « les droits formels » et « les droits réels ». Ainsi, si les principes d’égalité sont inscrits dans la constitution ou les textes législatifs nationaux ou internationaux, leur application se révèle souvent lacunaire et les normes sociales perdurent au détriment des lois. C’est pourquoi il importe de travailler également sur les coutumes religieuses et les traditions.

Pour cela, il est nécessaire d’agir sur les trois dimensions du changement - le niveau individuel, le niveau socio-économique ou communautaire (famille, école, communautés) et le niveau institutionnel - pour obtenir des changements pérennes dans les conditions de vie et la position sociale des femmes.

(b) L’approche par l’efficacité

La prise en compte du genre permet d’améliorer les résultats des politiques de développement. L’organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) [3] estime que si les femmes avaient un accès égal aux ressources productives (terres, intrants, crédits, formations, technologies), elles produiraient 20 à 30% de plus, suffisamment pour épargner 100 à 150 millions de personnes de la faim dans le monde. De la même manière, l’accès des femmes à des postes d’enseignantes, de médecins et de policiers a un impact positif sur la scolarisation [4] des filles, la fréquentation des centres de santé et le nombre de plaintes déposées pour violences sexuelles .

En particulier, les filles constituent un levier incontournable et puissant de développement [5]. Comme l’attestent de nombreuses études, notamment le rapport sur le développement de 2012 de la Banque Mondiale [6], investir dans le potentiel des filles et des jeunes femmes a un effet bénéfique dans l’élimination de la pauvreté - non seulement pour les filles elles-mêmes, mais aussi pour leurs communautés et pour des pays entiers. Une fille éduquée se mariera en général plus tard, aura moins d’enfants, ses enfants seront en meilleure santé et seront mieux éduqués. Ainsi, à titre d’exemple, il a été démontré qu’une année d’école primaire en plus augmente les revenus futurs des jeunes filles de 10 à 20%, une année de plus d’école secondaire de 15 à 25% [7].

La mise en œuvre de l’approche genre est une condition de l’efficacité et de la viabilité des actions de développement, mais son objectif politique et de transformation sociale va bien au-delà d’un simple utilitarisme économique. L’approche et l’analyse de genre permettent l’accès à l’empowerment.

(c) l’autonomisation, l’émancipation ou la prise de pouvoir

Le concept d’autonomisation désigne le renforcement des personnes, des femmes, en termes de pouvoir sur leur propre vie et sur leur environnement. Il porte l’idée de changer les rapports de pouvoir.

C’est un processus de prise de pouvoir qui comporte, d’une part, une dimension individuelle, par rapport au pouvoir que l’individu peut avoir sur sa propre vie, sa capacité de décider, la perception de son statut, la confiance en soi et les compétences individuelles ; et, d’autre part, une dimension collective, dans son rapport au sein du groupe, dans une vision collective de changement social et politique.

La notion d’autonomisation des femmes est plurisectorielle : elle se retrouve aussi bien dans le champ des droits reproductifs et sexuels (contrôle des naissances, choix du conjoint, capacité de dire « non » face aux violences.) que dans celui de l’économie (autonomie financière, accès et contrôle des ressources) ou encore dans la sphère juridique et politique (accès aux droits, participation aux espaces de décision, prise de parole publique). [8]

Ce processus dynamique et interactif entre les dimensions individuelle et collective de l’autonomisation engendre une véritable conscientisation et une amélioration à la fois du statut des femmes et la réduction des inégalités.

(d) Cibler les adolescentes et adopter une approche par cycle de vie

Aujourd’hui, plus d’un quart de la population des pays en voie de développement sont des adolescentes et des jeunes femmes âgées de 10 à 24 ans, soit 600 millions de personnes. L’adolescence est un âge durant lequel les facteurs de vulnérabilité sont concentrés : violences de genre à l’école, déscolarisation, mariages et grossesses précoces, travaux domestiques, etc. Pour cette raison, les adolescentes doivent faire l’objet d’une attention particulière. Les programmes de développement doivent leur permettre d’acquérir et de développer les atouts nécessaires à une transition réussie vers leur vie d’adulte.

Afin de lancer une réflexion française sur le sujet, le ministère des Affaires étrangères a créé un groupe de travail dédié à cette question.

Le rapport « Adolescentes, jeunes femmes et développement » publié par le groupe de travail souligne l’importance de privilégier une approche par cycle de vie qui permet de repérer les risques et opportunités, obstacles et atouts, les besoins et priorités, propres à chaque âge. Par exemple, les risques d’une fille à la naissance ne sont pas les mêmes qu’à 10-14 ans. A cet âge-ci, plusieurs risques peuvent se présenter : risque d’être déscolarisées, d’être mariées, de migrer, d’être enceinte très précocement, d’être infectée au VIH. dont il faudra tenir compte dans les solutions proposées. A la naissance, il s’agira plutôt de risques de malnutrition, ou encore d’infanticide : les réponses ne seront donc pas les mêmes.

L’ampleur du problème en quelques chiffres :

- Les filles doivent faire face à des discriminations même avant leur naissance - on estime à 100 millions le nombre de filles manquant à l’appel en raison des pratiques du foeticide féminin, en Inde et en Chine principalement.
- 75 millions de filles n’ont pas accès à l’école primaire et au premier cycle du secondaire.
- Une fille sur trois dans le monde n’a pas accès à l’enseignement secondaire.
- Une fille sur 5 en âge d’être scolarisée en premier cycle de secondaire ne va pas à l’école.
- 50% des victimes d’agressions sexuelles sont des mineures de moins de 15 ans.
- Dans les pays en voie de développement, 1 fille sur 7 se marie avant l’âge de 15 ans, et 38% avant 18 ans.
- 14 millions de filles âgées de 15 à 19 ans accouchent chaque année dans le monde entier ; or les complications liées à la grossesse constituent la première cause de mortalité chez les filles âgées de 15 à 19 ans dans le monde.
- En Afrique sub-saharienne, chez les 15-24 ans, les nouvelles infections de VIH touchent en moyenne 8 filles pour un garçon.

(extrait d’Adolescentes, jeunes femmes et développement, rapport 2013 du groupe de travail, PLAN et MAEE)

3 - Les axes d’intervention : mieux prendre en compte les enjeux de genre dans toutes les actions de développement

Les axes d’intervention privilégiés dans la nouvelle stratégie « genre et développement » visent au renforcement des moyens et des capacités en faveur d’une meilleure intégration des enjeux de genre dans toutes les actions et dans tous les secteurs de la coopération.

a) Renforcer la prise en compte du genre dans tous les instruments de financement du développement

La réorientation de notre aide publique au développement vers une plus grande égalité entre les femmes et les hommes implique un changement dans les pratiques, dans les modalités d’élaboration, de suivi et d’évaluation des projets et des programmes financés par la France.

Afin de répondre à ces enjeux, l’actualisation de l’ensemble des instruments d’instruction et de suivi de projets et de programmes est nécessaire. Celle-ci concerne les procédures d’écritures et d’instruction des différents types de Fonds de solidarité prioritaire (dont les Fonds sociaux de développement) gérés par le Ministère des Affaires étrangères. Elle couvre plus largement toutes les procédures de financement utilisées par l’Agence française de développement (projets, subventions aux ONG et prêts), les modalités utilisées par les autres opérateurs (CFI, IF, Campus, AEFE et FEI), ainsi que les modalités d’octroi de subventions dans le cadre des appels à projets destinés aux partenaires de la coopération décentralisée (collectivités et associations locales, réseaux régionaux multi-acteurs). Elle concerne également le financement des projets portés par les organisations de solidarités issues des migrations (OSIM).

Les nouvelles procédures impliquent que chaque nouveau projet présente une analyse des enjeux de genre dans le domaine d’intervention, en utilisant des données désagrégées (sexo-spécifiques) et des éléments relatifs aux statuts et aux droits des femmes et/ou des filles dans la zone d’intervention, à la répartition des tâches et des ressources entre les femmes et les hommes, à l’accès et la participation aux espaces de décision.

Afin de répondre aux enjeux de genre, les projets doivent prendre en considération les intérêts stratégiques des femmes et des hommes, dans une logique d’émancipation et de prise de pouvoir. Ils présentent, dans la mesure du possible, des activités spécifiques permettant d’alimenter la réflexion et la prise de conscience sur les stéréotypes de genre et les inégalités qui en découlent.

Ils doivent utiliser des indicateurs qui permettent le plus possible de connaître l’impact différencié des projets sur les femmes et les hommes, et des indicateurs spécifiques liés à l’amélioration du statut des femmes et à la réduction des inégalités de genre.

Les projets peuvent recourir à une expertise internationale ou locale en genre et développement afin de définir la stratégie genre la plus pertinente possible. Il est recommandé de réserver un budget spécifique pour le financement d’activités spécifiques sur le genre.

Les comités chargés de la sélection des projets et de l’octroi des financements du ministère des Affaires étrangères, et de tous ses opérateurs, utilisent désormais une grille d’évaluation et de notation sur le genre qui permet d’évaluer la prise en compte du critère de genre. Des recommandations sont formulées de façon spécifique par les comités de sélection des projets afin de faire évoluer les pratiques. A terme, en 2017, 50% des projets et programmes financés [9] (à l’exception des aides apportées sous forme d’aide budgétaire globale et les lignes de crédit non affectées) auront pour objectif spécifique ou secondaire l’amélioration de l’égalité entre les femmes et les hommes.

Afin de rendre possible cette évolution, des outils méthodologiques adaptés à chaque instrument seront développés par le MAE et ses opérateurs, sous forme de vademecum et de liste de questions. Ces nouveaux outils seront mutualisés.

Le cadre d’analyse d’Harvard

Le cadre développé par l’Institut du développement international de Harvard permet de définir les profils d’activités des hommes et des femmes à chaque étape du cycle de vie et de mieux connaître les différences dans l’accès et le contrôle des ressources. Le premier tableau sur l’analyse des rôles sociaux, permet de savoir « qui fait quoi » dans les trois domaines : reproductif (soins, travail domestique), productif (activité économique rémunérée) et communautaire (actions publique, culturelles, sociales comme les mariages). La plupart du temps, les hommes occupent des rôles productifs et publics visibles et les femmes cumulent les trois rôles de façon moins visible. L’utilisation des enquêtes de « budget-temps » permet de mettre en évidence les temps de travail de chacun dans les trois domaines. Le second tableau permet de savoir qui a accès et qui contrôle les ressources à la fois dans les domaines économiques (terres, machines, techniques, main d’œuvre), sociopolitiques (instructions, représentation décisionnelle, crédibilité/autorité) et les bénéficies de ces ressources (revenus, biens matériels, pouvoir politique, statut social et juridique.). Le troisième tableau permet d’identifier les facteurs qui influent sur la division sexuelle du travail et la répartition des ressources, et d’identifier des leviers d’action.

b) Organiser la formation interne en genre et développement et la coordination de correspondant(e)s genre

Le renforcement des capacités des agents dans le domaine du genre et développement, à la fois dans ses dimensions théoriques et opérationnelles, est un axe incontournable de l’amélioration des pratiques.

La nouvelle stratégie genre permet d’accélérer les efforts de formation des agents sur les questions de genre et développement. Le MAE et chacun de ses opérateurs et partenaires sont responsables de la mise en place d’une offre de formation pérenne et mutualisée, qui répond aux besoins des agents et à leur niveau de connaissance sur le genre, au siège et dans les pays partenaires. D’ici à 2017 : 90% des rédacteurs/trices, chefs de pôle, et sous directeurs/trices de la DGM ; des chefs de projets et des managers de l’AFD auront reçu une formation et/ou une sensibilisation sur le genre. Une offre de formation technique et/ou sectorielle sera développée. Des modules sur le genre seront également intégrés aux plans de formation interne et dans les formations des nouveaux partants. Enfin, une offre de formation en genre et développement est mise à disposition des partenaires du développement (ONG françaises, OSIM, collectivités locales...).

La création d’un réseau de correspondant(e)s genre et développement, au sein du MAE et de chacun de ses opérateurs et partenaires, a pour objectif d’assurer une véritable réflexion transversale dans tous les secteurs. Des correspondant(e)s genre sont désignés dans toutes les sous-directions et pôles sectoriels et techniques, en fonction de la pertinence. Un temps de travail spécifique leur est donné afin d’assurer les missions définies collectivement.

Les correspondant(e)s genre bénéficient de formations techniques sur le genre qui leur permettent de devenir des relais dans leur domaine de compétence. Ils/elles jouent à la fois un rôle de veille et de conseil afin d’assurer que le genre est une dimension prise en compte de façon transversale dans les activités de leur équipe.

Le réseau des correspondant(e)s genre est animé en interne par les agents responsables des questions de genre et développement. Une réunion annuelle de travail et d’échange de bonnes pratiques est organisée par le ministère des Affaires étrangères.

c) Valoriser et soutenir les travaux de recherche, notamment de recherche opérationnelle, et soutenir l’expertise française et francophone en genre et développement

Alors qu’ils sont essentiels à l’avancée de la réflexion française dans le domaine, les travaux de recherche sur le genre et le développement sont peu nombreux, peu valorisés et manquent de visibilité.

Afin de répondre à ces enjeux, la nouvelle stratégie s’attache, d’une part, à mieux valoriser et communiquer sur les travaux de recherche existants et soutient, d’autre part, le lancement de nouveaux travaux de recherche sectoriels dans des domaines insuffisamment explorés, comme par exemple le genre et l’environnement, le changement climatique, la sécurité alimentaire et le développement agricole, les enjeux de gouvernance, de gestion de crise et de sortie de crise, la santé des femmes et la santé sexuelle et reproductive.

Ces travaux sont menés en partenariat avec les Instituts de recherche français spécialisés dans le développement, tels que l’Institut de recherche pour le développement (IRD), le Centre international de recherche agronomique pour le développement (CIRAD), l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM), l’Institut national d’études démographiques (INED), la Fondation pour les études et la recherche sur le développement international (FERDI), l’Institut du développement durable et des relations internationales (IDDRI), le département de recherche de l’AFD, l’Ecole d’économie de Paris, ainsi que les 27 Instituts français de recherche à l’étrangers dont le réseau est animé par le ministère des Affaires étrangères. De nouveaux partenariats peuvent être envisagés avec des programmes de recherches spécialisés sur les questions de genre et d’égalité entre les femmes et les hommes tels que le Programme de recherche et d’enseignement des savoirs sur le genre (PRESAGE) porté par Sciences Po Paris, ou le Centre d’enseignement de documentation et de recherche pour les études féministes (CEDREF).

La stratégie permet également de soutenir des travaux de recherche-action qui s’intègrent dans le cadre de la mise en œuvre de projets opérationnels. Cette technique proche du terrain permet de collecter des informations qualitatives et de capitaliser sur les expériences innovantes. Elle est complémentaire des travaux de recherche classique et permet d’associer l’expertise des organisations de la société civile.

L’expertise française et francophone dans le domaine du genre et développement est de plus en plus importante. La stratégie permettra d’améliorer le recensement des expertes et des experts, de valoriser cette expertise dans le cadre des réponses aux appels à projets et de créer une base documentaire et méthodologique adaptée aux besoins des acteurs français et francophones.

Des réflexions sont lancées dans les différents secteurs du développement afin de définir, d’ici 2017, des objectifs et des indicateurs communs dans chaque secteur.


- L’Association Genre en Action a été créé en 2003.

Elle est soutenue par le ministère des Affaires étrangères. Sa mission est de recenser et diffuser de l’information sur les questions de genre et développement, en français et dans l’espace francophone, d’identifier et de mettre en réseau les expert(e)s et de stimuler la prise en compte des expériences et expertises francophones dans les processus et politiques de développement, notamment au niveau international. Elle dispose d’un portail d’information http://www.genreenaction.net et d’une base d’expert(e)s, basés au Nord et au Sud.

- L’Observatoire des transformations sociales dans le monde arabe

Dans le cadre du Fonds de solidarité prioritaire « Genre, génération et cohésion sociale », qui débute en septembre 2013 pour une période de trois ans, le Ministère des Affaires étrangères finance le lancement de l’Observatoire des transformations sociales dans le monde arabe (OTMA) porté par l’IRD et l’INED, en partenariat avec l’Institut français de recherche Jacques Berque du Maroc, l’Institut de Recherche sur le Maghreb contemporain de Tunisie et le Centre d’Études et de Documentation Économiques, Juridiques et Sociales d’Egypte. Le projet permettra de soutenir la production de données et de recherche nécessaire à une meilleure appréhension des changements sociaux à l’œuvre dans le monde arabe, en accordant une attention particulière à l’évolution du statut des femmes et des filles et des rapports de pouvoirs entre les femmes et les hommes dans leur société, particulièrement dans la population jeune.

d) Défendre l’égalité femmes-hommes dans le dialogue bilatéral, dans les instances européennes et internationales et dans notre engagement multilatéral

La question de l’égalité entre les femmes et les hommes et des droits des femmes doit être au cœur du dialogue politique, bilatéral et multilatéral.

La stratégie encourage la mise en place d’un dialogue bilatéral plus systématique avec les partenaires du développement, et particulièrement avec les ministères en charge des droits des femmes et de l’égalité et les organisations de la société civile dans les pays partenaire. Elle soutient l’inclusion d’un point sur ce sujet dans l’agenda des discussions lors d’autres rencontres politiques. Pour ce faire, l’égalité femmes-hommes apparaîtra de façon systématique dans le plan d’action des Ambassades et dans les instructions faites aux nouveaux Ambassadeurs et nouvelles Ambassadrices.

Les bureaux de l’AFD entretiendront également un dialogue sur les questions de genre avec leurs partenaires institutionnels.

La stratégie « genre et développement » réaffirme le rôle « leader » de la France dans la défense des droits des femmes et des droits sexuels et reproductifs dans les enceintes internationales, particulièrement lors des sessions de la Commission population et développement et de la Commission de la condition de la femme où elle est représentée à un niveau ministériel et participe activement aux négociations internationales.

La France travaille en concertation avec les organisations de la société civile. Elle défend les droits des femmes et l’égalité femmes-hommes dans toutes les autres instances internationales et européennes, telles que l’Assemblée générale des Nations Unies, le Conseil de Sécurité, le Conseil des droits de l’Homme, le Conseil de l’Europe, mais aussi dans d’autres enceintes comme le G8 et le G20 et dans le débat sur le nouvel agenda pour le développement, « Post 2015 ».

La réaffirmation de cet engagement revêt une importance particulière dans la perspective de la célébration des anniversaires des 20 ans de l’adoption des Plans d’action du Caire sur la population et le développement, en 2014 et du Plan d’action de Pékin sur le genre et le développement en 2015 ; et dans un contexte international marqué par la montée des conservatismes.

A partir de 2014, la stratégie recommande que la France joue un véritable rôle d’influence en faveur d’une meilleure prise en compte du genre au sein des fonds multilatéraux qu’elle finance et administre.

Les représentant(e)s français(e)s soutiennent la prise en compte du genre lors des réunions des conseils d’administration, des comités exécutifs et/ou des comités techniques financier, budgétaire et administratif des organisations internationales que la France soutient. Dans les pays partenaires, les représentant(e)s français(e)s favorisent la prise en compte du genre dans l’élaboration des demandes-pays et l’instruction, le suivi et l’évaluation des projets financés par le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme et le Partenariat mondial pour l’Education.

En tant que second contributeur du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, la France joue un rôle moteur dans l’adoption de la nouvelle stratégie du Fonds sur le genre et la lutte contre les inégalités. Elle fera de même pour les autres fonds multilatéraux.

La France soutient les efforts de la Banque mondiale dans le domaine du genre. Celle-ci a mis en œuvre un plan d’action sur le genre (2007-2012). Suite à la publication du rapport sur le développement de 2012 dont le thème portait sur le genre, l’égalité femmes-hommes et le développement, la Banque mondiale a adopté un plan d’action qui vise à opérationnaliser les recommandations du rapport. Il s’articule autour de cinq axes : 1) la diffusion d’information sur le genre et le dialogue politique dans les pays partenaires, 2) le soutien à la mise en œuvre d’un diagnostic genre dans chaque pays, dans les domaines d’intervention de la Banque mondiale, 3) l’augmentation des moyens alloués aux secteurs de la santé des femmes et des enfants, de la scolarisation des filles, de l’accès des femmes à l’emploi et à l’entreprenariat, 4) le soutien à la collecte de données désagrégées et des bonnes pratiques dans le domaine du genre, 5) le partenariat avec ONU Femmes, le secteur privé et les organisations de la société civile.

La commission de la condition de la femme

Lors de la 57ème session de la Commission de la condition de la femme (mars 2013), la délégation était présidée par la Ministre déléguée des Droits des femmes et Porte-Parole du Gouvernement. Des réunions préparatoires entre les ministères des Affaires étrangères et des Droits des femmes, avec les partenaires européens et francophones, et avec les représentants de la société civile française ont permis d’élaborer une stratégie de négociation en faveur de la défense des droits des femmes et des droits sexuels et reproductifs. La collaboration avec ONU Femmes, qui assure le secrétariat de la Commission de la condition de la femme, a également facilité l’adoption d’un texte de conclusions ambitieux.

e) Améliorer la redevabilité et la traçabilité de l’aide consacrée à l’égalité femmes-hommes

Depuis 2010, la France déclare le pourcentage d’Aide publique au développement qui favorise l’égalité entre les femmes et les hommes, en utilisant le « marqueur genre » du Comité d’Aide au développement de l’Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE).

La stratégie engage la France à améliorer l’utilisation du marqueur genre du CAD de l’OCDE afin de refléter de façon plus spécifique les efforts menés dans le domaine de la lutte contre les inégalités de genre.

Elle encourage une révision des modalités de notation et la rédaction d’un vademecum permettant une meilleure utilisation du marqueur. Ceci permettra également d’évaluer la prise en compte du genre dans de nouveaux secteurs tels que le secteur privé, le développement agricole, l’eau et l’assainissement, les infrastructures et le changement climatique.

Conformément aux instructions du comité interministériel sur l’égalité du 30 novembre 2012, le Ministère des Affaires étrangères retranscrira les actions menées en faveur de l’égalité et utilisera des indicateurs de performance sexués dans le Document de politique transversale sur l’égalité, annexé au projet de loi de finance, à partir de 2014.

Le marqueur genre du CAD de l’OCDE permet de noter les projets et programmes de développement de la façon suivante :

0 : le projet ne prend pas en compte le genre
1 : le projet a pour sous-objectif significatif ou secondaire l’amélioration de l’égalité entre les femmes et les hommes ou la lutte contre les inégalités de genre
2 : le projet a pour objectif principal l’amélioration de l’égalité entre les femmes et les hommes ou la lutte contre les inégalités de genre

Cette notation est fournie par le Ministère des Affaires étrangères et l’Agence française de développement sur la base des indications données par les responsables de projets et de programme.

Le dernier rapport montre que l’aide qui vise l’amélioration de l’égalité entre les femmes et les hommes (marqueurs 1 et 2) représente 31% de l’aide globale, soit 25,3 milliards de USD en 2009-2010 et qu’elle est dédiée à plus de 50% aux secteurs de l’éducation et de la santé.

En 2011, la France a déclaré que 39% de son aide visait la réduction des inégalités de genre, soit un total de 1,9 milliards de USD. Aucun projet ne plaçait le genre comme objectif principal [10].

Objectif : en 2017 au moins 50% des projets et programmes financés reçoivent la note 1 ou bien la note 2


VIII. DECLINAISONS SECTORIELLES

Les problématiques de genre se déclinent de façon spécifique dans chaque secteur du développement. La nouvelle stratégie soutient la mise en place de réflexions sectorielles, en concertation avec les centres de recherche et les partenaires du développement. En 2017, des objectifs et des indicateurs communs seront définis dans tous les secteurs du développement.

1 - La santé sexuelle et reproductive des femmes

Malgré les importants progrès réalisés au cours des dernières décennies, les sociétés ne parviennent toujours pas à répondre aux besoins de soins de santé des femmes à des moments décisifs de leur vie, en particulier au cours de leur adolescence. Tel est le constat dressé par le rapport de l’Organisation mondiale de la santé de 2009 sur la santé des femmes.

Bien que l’espérance de vie des femmes soit supérieure à celle des hommes dans la plupart des pays, un certain nombre de facteurs sanitaires et sociaux font que les femmes ont une moins bonne qualité de vie. Parmi ces facteurs, les restrictions dans l’accès aux services de santé, mais aussi en matière d’éducation, de revenu et de pouvoir de décision, pèsent sur la santé des femmes. Ainsi les femmes pauvres en milieu rural sont surexposées à la mortalité maternelle (le risque est multiplié par 450 dans les pays du Sahel par rapport aux pays développés). Les conséquences des mariages et grossesses précoces sur la santé des jeunes femmes sont désastreuses : elles multiplient par 4 le risque de complications obstétricales et donc de mortalité maternelle, et entraînent des fistules vaginales qui engendrent des formes d’exclusion sociale. Les besoins en planification familiale, y compris pour l’accès aux moyens contraceptifs et à l’avortement, se heurtent à des tabous culturels et sociétaux. Les violences faites aux femmes dans la sphère communautaire et domestique affectent leur santé génésique (mutilations, abus sexuels), mais aussi mentale (dépressions, suicides). Cette violence sexo-spécifique est exacerbée en situation de conflit.

Au niveau mondial, les femmes représentent 53% des personnes vivant avec le VIH, et près de 80% d’entre elles vivent en Afrique subsaharienne. Les chiffres globaux cachent des différences considérables quant à ce que la maladie implique pour les hommes et les femmes. Si les femmes sont plus vulnérables à la transmission du VIH pour des raisons biologiques, leur vulnérabilité résulte également des inégalités de genre et de normes définies par la société qui influent sur leurs capacités à se protéger ou à dire « non » face à la violence et aux relations sexuelles forcées.

Les femmes sont également plus vulnérables aux autres infections sexuellement transmissibles : syphilis, papillomavirus (associé au cancer du col de l’utérus), etc. Certaines maladies chroniques touchent aussi de manière disproportionnée les femmes défavorisées : bronchopneumonies obstructives liées à la pollution intérieure, hypertension artérielle liée à la surcharge pondérale, etc. Si le développement est généralement associé à une baisse de la surmortalité infantile des fillettes, on constate parallèlement une hausse des comportements à risques chez les jeunes filles (tabagisme, consommation épisodique massive d’alcool, mauvaise alimentation, sédentarité etc.). Parce qu’elles vivent généralement plus longtemps que les hommes, les femmes représentent une proportion croissante des personnes âgées. Le manque d’adaptation des systèmes de santé à cette réalité démographique accentue la vulnérabilité des femmes en fin de vie.


Leviers d’actions :

- plaider dans chacune des organisations internationales et fonds verticaux en santé pour l’intégration systématique d’une approche soucieuse d’équité entre les sexes dans leurs programmes et activités, assortie de moyens adéquats pour former le personnel et mesurer l’impact sur la santé des femmes ;
- intégrer l’approche genre comme un critère d’évaluation des demandes de financement dans le cadre du nouveau modèle de financement du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme ;
- soutenir le projet de réseau d’alerte des violations des droits des femmes parmi les principaux partenaires de la gouvernance mondiale en santé ;
- accélérer la féminisation des instances de gouvernance des organisations internationales en santé en fixant l’objectif de parité dans les postes à responsabilité d’ici 2015.


- Former 15 000 sages-femmes africaines pour réduire de 25% la mortalité maternelle en Afrique subsaharienne : l’expérience de l’AMREF avec « Stand Up for African Mothers »

Depuis 2011, l’ONG AMREF a lancé une campagne internationale, soutenue par le MAE, pour la formation de sages-femmes africaines. L’organisation souhaite ainsi participer activement à l’Objectif du Millénaire pour le Développement (OMD) numéro 5, qui cible la mortalité maternelle.

Ce programme permet aux sages-femmes de faire face aux accouchements difficiles et aux complications. Les formations sont adaptées aux contextes locaux. L’e-learning, associé à des stages pratiques, permet au personnel de santé de se remettre à niveau tout en continuant à exercer.

- Muskoka : Les engagements de la France pour la santé des femmes et des enfants

Lors du sommet G8 de Muskoka en 2010, la France s’est engagée à augmenter sa contribution financière en faveur de la lutte contre la mortalité maternelle et infantile de 500M€ pour la période 2011-2015. Cette nouvelle contribution est en mise en œuvre par plusieurs agences des Nations unies et l’Agence française de développement dans 16 pays prioritaires en Afrique de l’Ouest, en Haïti et en Afghanistan.

2 - Autonomisation économique, accès aux ressources économiques et productives, sécurité alimentaire

La reconnaissance du travail des femmes, leur participation à la vie économique et leur accès à une certaine autonomie financière sont des éléments essentiels de la croissance et du développement. Or dans la plupart des pays du monde, les femmes sont discriminées dans l’accès au marché du travail, et occupent majoritairement les secteurs les moins valorisés. En Afrique subsaharienne, 56,9 % des femmes travaillent pour 79,7 % des hommes. Parmi celles-ci, 8 femmes 1sur 10 travaillent dans des conditions vulnérables [11] , c’est à dire soit comme travailleuses familiales non rémunérées, soit comme travailleuses indépendantes, ce qui implique qu’elles gagnent peu d’argent ou pas du tout, ne bénéficient pas d’une protection sociale ni de contrats formels. Dans la région Afrique du Nord et Moyen Orient, les femmes ne sont que 21 % à avoir accès au marché du travail contre 76 % des hommes [12].

Dans l’agriculture, les hommes et les femmes occupent des rôles différenciés. Les femmes rurales ont des responsabilités multiples dans la culture, l’élevage, la pêche, la foresterie et la transformation alimentaire. Pourtant, elles occupent très souvent les segments les moins rémunérateurs de la chaîne de production. Au Togo, par exemple, les femmes assurent l’élevage des porcs, et les hommes le débit et la vente. D’autre part, elles sont particulièrement investies dans le commerce informel des denrées alimentaires (transport, transformation et vente au détail des produits alimentaires). De plus, elles sont responsables en grande partie de la production vivrière nécessaire à l’alimentation quotidienne des familles, ce qui les amène à cultiver un autre champ en sus du champ familial. Ajoutée aux activités domestiques (cuisine, transports du bois et de l’eau), il est fréquent que les femmes travaillent deux fois plus que les hommes.

Les femmes contribuent de façon essentielle à l’économie rurale dans tous les pays en développement et représentent en moyenne 43% de la main-d’œuvre agricole. Selon la FAO [13], la réduction des inégalités entre les femmes et les hommes dans l’accès aux ressources productives permettrait d’augmenter les rendements de 20 à 30%, suffisamment pour réduire le nombre de personnes sous alimentées de 100 à 150 millions.

Malgré cela, elles ont toujours moins de droits que les hommes : elles ont moins facilement accès aux ressources telles que la terre, le bétail, les intrants, la main-d’œuvre agricole, mais également à l’instruction, aux services de vulgarisation, aux crédits et à la technologie. Sans droits garantis sur la terre, les agriculteur/trices n’ont pas les garanties nécessaires à l’accès au crédit. Enfin, la sous-représentation des femmes dans ces instances et organisations paysannes et professionnelles limite leur aptitude à faire entendre leur point de vue auprès des décideurs.

C’est pourquoi les enjeux se situent au niveau du droit foncier et de l’héritage, de l’accès au crédit, de l’accès aux intrants agricoles, de l’accès aux services d’éducation, de formation et de vulgarisation, de l’accès à la prise de décision.


Leviers d’actions :

- Poursuivre un programme de soutien à l’autonomisation économique des femmes ;
- Cibler l’aide alimentaire programmée sur les plus vulnérables, dont les femmes et les enfants ;
- Plaider pour l’égalité des droits fonciers, notamment dans le cadre de la mise en œuvre des Directives volontaires pour une gouvernance foncière responsable adoptées par le Comité de la sécurité alimentaire mondiale (CSA) en mai 2012 ;
- Sensibiliser et mobiliser le groupe interministériel sur la sécurité alimentaire (GISA) regroupant les acteurs français travaillant sur cette thématique (ONG, administrations, recherche, opérateurs), pour une meilleure prise en compte des questions de genre.

Une expérience pilote pour l’autonomisation économique des femmes en Afrique subsaharienne

Le Fonds de solidarité prioritaire « genre et autonomisation économique des femmes en Afrique » a mobilisé 14 ONG françaises et leurs 30 partenaires du Sud, dans 7 pays d’Afrique de l’Ouest. Grâce à la création d’un « pôle d’expertes en genre » au Nord et au Sud, le programme a permis de faire évoluer les pratiques des associations partenaires et des bénéficiaires. Au travers de la mise en place d’audits organisationnels de genre, d’enquêtes et d’ateliers de formation, il a permis de remettre en cause les rapports de pouvoirs entre les femmes et les hommes dans la sphère économique, de mieux comprendre les enjeux tels que la répartition des tâches domestiques, l’accès à la terre, aux machines et aux marchés, la gestion des revenus, l’accès aux espaces de décision et de réorienter certaines activités vers une plus grande égalité.

Ce Fonds de solidarité prioritaire a permis de dégager des nouvelles méthodologies de travail sur la prise en compte du genre dans les programmes, dans le domaine économique disponible dans un document de capitalisation. Le film documentaire « La part des femmes », réalisé par Imageo, retrace les parcours de 5 femmes bénéficiaires du projet.

3 - Droits à une éducation complète et de qualité et à la formation professionnelle

Le cadre d’action pour l’Education pour Tous, adopté à Dakar en 2000, ainsi que les Objectifs du millénaire pour le développement 2 et 3, ont fixé l’objectif d’éliminer les disparités entre les sexes dans l’enseignement primaire et secondaire d’ici à 2005 et d’instaurer l’égalité de genre à tous les niveaux d’enseignement d’ici à 2015. Pourtant, en 2012, dans les pays en développement, un trop grand nombre de filles sont exclues de l’école et privées de leur droit fondamental à l’éducation. 32% des filles n’achèvent pas un cycle complet d’éducation, 39 millions des 11-15 ans sont déscolarisées et les deux-tiers des analphabètes du monde sont des femmes.

La présence des filles à l’école diminue à mesure qu’elles gravissent les échelons de la scolarité. L’adolescence concentre de nombreux facteurs de vulnérabilité : déscolarisation, violences, mariages et grossesses précoces, travaux domestiques. Des études montrent pourtant l’impact de la scolarisation des filles sur la santé, notamment maternelle, le recul des mariages précoces et forcés et la limitation de la propagation du VIH. Les adolescentes qui terminent un cycle secondaire ont quatre fois moins d’enfants que les jeunes filles non scolarisées.

D’un point de vue économique, l’éducation permet aux femmes d’exercer des activités rémunératrices et d’acquérir une autonomie économique et sociale. Une année de scolarisation supplémentaire peut augmenter les revenus d’une femme de 15% à 20%.

Ainsi, l’accès à l’éducation permet aux filles de faire des choix personnels éclairés et de contribuer à améliorer la santé et le niveau de vie de la génération suivante, ce qui favorise le bien-être économique et social d’un pays tout entier.

Pour lutter contre le décrochage scolaire des filles, il convient de prendre en compte différents types de barrières :

- culturelles : stéréotypes culturels attribuant la responsabilité des tâches domestiques aux femmes et aux filles, mariages et grossesses précoces ;
- financières : coût de la scolarisation, entrainant un arbitrage souvent défavorable aux filles ;
- liées aux infrastructures : distance entre le domicile et l’école qui induit un risque de sécurité supplémentaire pour les filles, absence de sanitaires séparés, garantie d’un environnement sain et sûr ;
- au sein du système scolaire : la qualité de l’éducation, le contenu des manuels qui présentent des stéréotypes de genre, l’éducation à l’égalité et à la sexualité, les violences et le harcèlement sexuel de certains enseignants.

La maîtrise de la langue française est partie intégrante des problématiques liées à l’amélioration des systèmes éducatifs, en particulier pour les pays de la famille francophone. Le français est en effet une voie d’accès aux savoirs, à l’enseignement supérieur, à la recherche et à l’emploi.


Leviers d’action :

- Augmenter la scolarisation féminine et améliorer l’égalité avec les garçons, notamment dans le secondaire ;
- Inciter vigoureusement les pays en développement partenaire à intégrer des stratégies pour la promotion de l’égalité hommes-femmes dans leurs plans d’éducation, en leur apportant également l’appui technique nécessaire ;
- Se doter d’un expert technique international spécialiste du genre auprès du secrétariat du Partenariat mondial pour l’éducation à Washington ;
- Soutenir une meilleure prise en compte des besoins en formation professionnelle des jeunes femmes défavorisées ;
- Faire des violences de genre en milieu scolaire une thématique phare des efforts pour l’éducation des filles dans l’agenda international en 2013-2015 ;
- Encourager une réflexion sur les stéréotypes de genre dans les contenus éducatifs et pédagogiques.


- La France mobilisée dans la lutte contre les violences de genre en milieu scolaire

Dans de nombreux pays, les données disponibles révèlent que les jeunes filles sont victimes de formes de violences autour ou au cœur de leur établissement scolaire. Cela nuit à leur bonne scolarisation et les pousse parfois à abandonner l’école. Les violences de genre en milieu scolaire mettent en jeu des dimensions multiples : économique, socioculturelle (tabou sur la sexualité, absence d’éducation à la sexualité, inégalités de genre) et sanitaire. Elles sont perpétrées par des personnels enseignants, des écoles, des adultes autour de l’école, mais aussi par des élèves masculins. Banalisées, elles restent fréquemment un sujet « tabou », ce qui rend difficile leur identification, leur reconnaissance et leur prise en charge.

A l’initiative du MAE, un groupe de travail spécifique sur ce thème a été créé, et a débouché sur la publication d’un rapport : « violences de genre en milieu scolaire et leur impact sur la scolarisation des filles ».

Le MAE traduit cet engagement sur le terrain en soutenant quatre programmes de scolarisation des filles et de lutte contre les violences de genre mis en œuvre par le Fonds des Nations unies pour l’enfance (UNICEF) au Burkina Faso, en Côte d’Ivoire, au Mali et au Niger (3,3 millions d’euros en 2012-2014).

- La langue française, langue de l’émancipation : le rôle de la Mission de la langue française et de l’éducation

Afin de répondre aux enjeux de l’égalité d’accès en matière d’éducation et d’employabilité, la Mission de la langue française et de l’éducation du Ministère des Affaires étrangères vise à orienter l’enseignement du et en français vers le monde professionnel et ses exigences et soutient la production de contenus pédagogiques adaptés aux réalités locales (enseignement en contexte multilingue, décrochage des filles et ré-alphabétisation). Elle prête attention aux valeurs véhiculées par ses outils d’enseignement et de diffusion de la langue française et notamment aux stéréotypes de genre. En Tunisie, elle soutient un programme de formations en français dans les quartiers populaires.

4 - La lutte contre toutes les formes de violences basées sur le genre, l’accès à la justice et aux droits

Les violences faites aux femmes désignent « tout acte de violence sexiste qui cause ou est susceptible de causer à la femme une atteinte à son intégrité ou une souffrance physique, sexuelle ou psychologique, y compris la menace d’un tel acte, la contrainte et la privation arbitraire de liberté, que ce soit dans la vie publique ou dans la vie privée » [14]. Les violences faites aux femmes sont multiples, elles existent aussi bien dans la sphère privée (violences domestiques, conjugales, mariages précoces et forcés, mutilations génitales féminines) que publique (viol, harcèlement sexuel, traite, prostitution). Les violences sexuelles deviennent dans certains contextes des armes de guerre et le corps des femmes un enjeu politique.

La lutte contre les violences faites aux femmes constitue l’un des douze domaines d’intervention du programme d’action de Pékin, adopté en 1995. En dépit des efforts considérables déployés par de nombreux pays pour lutter contre la violence à l’égard des femmes, cette violation fondamentale des droits des femmes persiste. Une femme sur sept est victime de violences dans le monde [15], 100 millions de filles ont subi des mutilations génitales et 60 millions de filles sont mariées avant l’âge de 15 ans. Plusieurs États enregistrent depuis 2005 une augmentation du nombre de cas signalés de violence à l’égard des femmes. Certains groupes de femmes, notamment les femmes autochtones, jeunes, rurales ou appartenant à une minorité ethnique, demeurent vulnérables à des formes particulièrement graves de violence.

Partout, la persistance d’attitudes et de comportements perpétuant les stéréotypes de genre et les inégalités fondées sur le sexe entraîne des violences envers les femmes. Elles se traduisent souvent par la stigmatisation des victimes et des survivantes, notamment par leurs proches.

Au-delà de la lutte contre les stéréotypes, d’autres enjeux sont identifiables :

- L’accès aux droits, l’application des lois et la protection des victimes : les lois internationales punissant les violences basées sur le genre sont rarement appliquées, elles sont le premier pas dans la prévention et la lutte contre ces violences ;
- L’accès à la justice : la complexité et le coût des procédures, la lenteur du système et le processus judiciaire constituent un véritable labyrinthe et un parcours du combattant pour les victimes de violences ;
- Prise en charge des victimes : les stéréotypes de genre traversent nos sociétés et n’épargnent pas les institutions policières ni les services hospitaliers. Les femmes sont stigmatisées par les personnes mêmes qui devraient les accompagner ;
- Les violences en milieu scolaire : ces violences sont souvent impunies et se perpétuent dans les lieux d’enseignement et d’éducation entre enseignants et enseignés mais aussi entre enseignés ;
- Les violences via les nouvelles technologies de l’information et de la communication (TIC) sont aujourd’hui un réel enjeu (sur internet et via les téléphones portables).


Leviers d’actions :

- Soutenir l’abrogation des textes discriminatoires, l’adaptation des législations nationales aux dispositions internationales ratifiées et l’élaboration de décrets d’application ;
- Renforcer la justice de proximité et l’assistance judiciaire gratuite pour les femmes victimes ;
- Former des professionnel-le-s : en particulier, ceux et celles qui prennent en charge ces violences : médecin, policier-ère ou gendarme, magistrat-e, enseignant-e, travailleur-euse social(e) ;
- Sensibiliser sur les violences basées sur le genre en langue locale : milieu scolaire, élu-e-s, leaders communautaires, groupements de femmes,...

Lutte contre les violences faites aux femmes au Mali, à Bamako et Kayes

Le MAE met en œuvre un projet financé par le Fonds de Solidarité prioritaire « lutte contre les violences faites aux femmes » et investit 1,5M€ de 2011 à 2013 dans six pays (Algérie, Cameroun, Jordanie, Mali, Maroc, Niger).

Au Mali, le projet été mené en coordination avec le Ministère de la Promotion de la Femme, de l’Enfant et de la Famille (MPFEF), ONU FEMMES et des acteurs de la société civile locale. Il a soutenu la réalisation de campagnes de sensibilisation et de formations notamment sur la pratique de l’excision, relayées au travers de films documentaires, d’émissions de radio, de pièces de théâtres et de diffusion à la télévision nationale. Des actions complémentaires ont été menées sur la participation des femmes à la vie politique à travers la formation de 40 femmes leaders (députées, anciennes ministres et responsables du cadre de concertation des femmes des parties politiques) en leadership, lobbying et technique de préparation des élections.

5 - Gouvernance démocratique et participation politique

Comment parler de représentation démocratique, là où plus de la moitié de la population est sous- représentée dans les espaces de décision ? La participation politique des femmes dans les espaces de gouvernance est un enjeu à tous les niveaux : local, national, régional et mondial. La cible 3 de l’OMD 3 vise à augmenter la représentativité des femmes dans les parlements nationaux. Les Nations unies fixent au minimum à 30% le pourcentage de femmes nécessaires à une véritable prise en compte de leurs besoins dans la définition des politiques publiques.

A la fin janvier 2011, les femmes représentaient 19,7 % des parlementaires au niveau mondial, ce qui représente une augmentation de 75 % depuis 1995. Les femmes représentent 20 % des parlementaires en Afrique subsaharienne et 11% en Afrique du Nord. Le nombre des femmes parlementaires avait vu son nombre chuter de 12,7 % à 2 % [16] en Egypte sous le dernier gouvernement.

La sous-représentation des femmes dans les espaces de décision s’explique par de nombreux facteurs liés aux rôles socio-culturels des femmes qui les cantonnent aux espaces privés, mais aussi à certaines cultures parlementaires, aux usages des partis politiques et aux règles de fonctionnement dans les espaces de décision (systèmes de cooptation).

Les progrès réalisés ces dernières années sont le résultat de la mise en œuvre de politique des quotas qui ont fait leurs preuves comme par exemple au Sénégal, où les femmes occupent 43 % des sièges de l’Assemblée nationale. La participation des femmes peut être soutenue à travers des réformes des modes de scrutin et par des politiques qui les incitent à s’engager. Les médias ont un rôle à jouer dans la diffusion d’une image positive des femmes dans la politique et dans les espaces de décision.

La participation des femmes aux espaces de gouvernance passe également par une présence accrue dans le système judiciaire et au sein de la police.

Dans son dernier rapport [17], ONU Femmes souligne que les femmes représentent 9 % des effectifs de police et 27 % des juges dans le monde. Il existe une corrélation entre la féminisation de la justice et l’amélioration du traitement des plaintes des femmes, notamment dans le domaine de la prise en charge des violences de genre.

Enfin, dans les pays en conflits, les femmes sont sous représentées dans les processus de paix officiels, même si elles contribuent de façon informelle à la résolution des conflits. Aucune femme n’a jamais été nommée médiateur en chef ou chef de file dans les négociations de paix parrainées par l’ONU. Cette exclusion conduit invariablement à un défaut de prise en considération des préoccupations des femmes dans la reconstruction post conflit.


Leviers d’actions :

- Soutenir la réforme des scrutins, l’inscription de la parité dans la constitution, l’adoption de quotas et la pénalisation des partis qui ne les respectent pas ;
- Renforcer les capacités des femmes dans la prise de parole et la confiance ;
- Soutenir la participation des femmes aux effectifs de police et aux effectifs judiciaires.

La formation « femmes et leadership » de l’Ecole nationale d’administration

L’Ecole nationale d’administration organise, dans le cadre des « Cycles internationaux de l’administration publique », une formation sur le « leadership et le management au féminin » à destination de femmes en situation des responsabilités. Cette formation annuelle vise le renforcement des capacités dans les domaines de la gestion, de la communication, des négociations et de la mise en réseau. La formation met en question également les inégalités et les stéréotypes de genre qui entravent l’accès des femmes aux espaces décisionnels et favorisent une prise de conscience collective de ces questions.

6 - Environnement et changement climatique

Les femmes sont directement concernées par le changement climatique en raison du rôle qu’elles jouent dans la gestion de la famille et de la sécurité alimentaire. La réduction de l’accès aux besoins alimentaires de base (nourriture, eau, bois de chauffe) représente une charge supplémentaire de travail et l’adoption de stratégies d’adaptation.

L’exemple de l’économie forestière et agricole est parlant. Les femmes occupent un rôle central dans la gestion de la biodiversité et de la sécurité alimentaire. En Afrique, 80 % des petits exploitants agricoles sont des femmes et travaillent généralement sur les terres les moins importantes et de moins bonne qualité [18].

Cette activité est très sensible aux variabilités climatiques, de pluviométrie ou encore d’érosion des sols. Les conséquences du changement climatique alourdissent leur charge productive, alors même que leurs tâches de reproduction continuent de peser sur une double journée de travail.

Des études montrent que les femmes sont particulièrement vulnérables aux conséquences du changement climatique en raison de normes culturelles qui limitent leur mobilité et leur capacité de décision et donc leur capacité de réaction aux crises climatiques.

Alors qu’elles sont également des actrices de la lutte pour un environnement durable, leur participation aux décisions liées au changement climatique reste parcellaire. Pourtant, les exemples sont nombreux du rôle des femmes dans la lutte contre la déforestation, dans le développement de l’agriculture biologique [19], ou encore en matière de maintien de la biodiversité locale et de cultures adaptées, comme des variétés de riz résistantes à la sécheresse. Les savoirs traditionnels et techniques leur permettent de mettre en œuvre des stratégies adaptées.


Leviers d’action :

- Promouvoir la féminisation des instances de gouvernance des trois Conventions environnementales. (La Conférence de Doha fixe comme objectif un « équilibre entre hommes et femmes dans les organes créés en vertu de la Convention Cadre des Nations unies sur les Changements Climatiques »).
- Mieux adapter les politiques de lutte contre le changement climatique aux besoins des femmes en favorisant une compréhension commune de l’approche genre
- Promouvoir les associations agricoles féminines et leurs réseaux
- Former les femmes à l’adaptation aux impacts du changement climatique

7 - Droits culturels et accès aux médias

La culture

La prise en compte du genre dans le champ culturel est stratégique car il est un puissant vecteur de représentations.

En France, les femmes représentent 47% des salariés dans le domaine de la culture, mais elles occupent moins de 20% des postes de direction. Dans le domaine de la coopération culturelle menée par la France, un travail de collecte de données doit être entrepris afin de mieux connaître la façon dont sont promus les artistes féminines et les travaux sur le genre.

Les inégalités des chances et des salaires dans ce secteur ont un impact en termes d’images et de représentations. Ne pas voir de femmes créatrices sur les scènes, dans les galeries d’art ou sur les écrans, ne pas entendre de femmes s’exprimer en tant qu’expertes, ou sur les questions relatives à l’égalité entre les femmes et les hommes contribue à rendre invisible le rôle des femmes dans leur propre société. Ces inégalités existent au Nord comme au Sud. Cette prise de conscience nécessite une action politique forte, tant au niveau national que dans notre action internationale.

L’UNESCO, dans un objectif de réduction de ces disparités, propose d’agir tant sur les politiques et pratiques liées à la conservation du patrimoine culturel et immatériel, ou encore d’augmenter le nombre de femmes dans la gestion des musées et des industries culturelles et créatives, par des formations et des projets spécifiques sur les questions liées au genre.

De la même façon, le réseau culturel français doit continuer à porter une attention particulière à la prise en compte et à la représentation des femmes dans les actions et projets culturels mis en place, qu’il s’agisse de promouvoir les femmes artistes, commissaires d’exposition, auteures, intellectuelles, directrices d’institutions culturelles, ou encore de débattre de questions relatives au genre lors de débats d’idées, d’expositions ou de projections de films.

Les médias

De manière générale dans les médias, la problématique de l’égalité femmes-hommes est double et concerne, d’une part, la représentation des femmes dans les contenus produits par les médias et la lutte contre les stéréotypes ainsi que, d’autre part, la représentation des femmes en tant que professionnelles des médias au sein des entreprises médiatiques et la lutte contre les discriminations.

Les médias ont un rôle central dans la formation des perceptions, des idées, des attitudes et des comportements de la société : ils constituent un puissant vecteur des changements structurels, notamment en matière d’égalité femmes-hommes. L’action dans ce secteur est donc particulièrement importante de par l’impact qu’elle peut avoir sur la société toute entière.

Dix ans après la Conférence de Pékin, la Commission de la condition de la femme a constaté que les objectifs fixés dans le domaine de l’égalité dans les médias n’avaient pas été pleinement atteints. Les femmes sont très rarement le sujet central d’un reportage (3 % des reportages sur l’économie et 8 % des reportages sur la politique, 10 % sur le plan mondial mais 17 % des thèmes « légers » comme les nouvelles sur les célébrités, les sports ou les thèmes sociaux). Pour faciliter la réalisation de ces objectifs, l’Unesco a publié en décembre 2012 un cadre d’indicateurs utiles intitulé "Indicateurs d’égalité des genres dans les médias".

Projet « Femmes et médias dans le monde arabe » soutenu par Canal France International (CFI)

Canal France International soutient le développement d’un « Réseau de femmes journalistes syriennes » (Network of Female Syrian Journalists) qui regroupe des journalistes de différents médias travaillant à l’intérieur et à l’extérieur du pays. Le réseau a comme objectif à la fois de promouvoir la place et les carrières des femmes journalistes en Syrie et de soutenir un nouveau traitement médiatique des questions de genre. A cette fin, CFI appuie le réseau pour développer une plateforme internet ainsi qu’un blog multimédia. Il organise des ateliers de formation autour des thématiques liées à la lutte contre les stéréotypes de genre dans les médias ainsi qu’à la promotion des droits des femmes.

Les Technologies de l’Information et de la Communication (TIC)

Les TIC et internet ont révolutionné le monde de l’information et de la communication. L’accès inégal est flagrant, frappant en tout premier lieu, dans les pays du sud, les populations rurales et en particulier les femmes, qui savent moins lire, et n’ont pas accès aux formations techniques de l’informatique.


Leviers d’actions :

- Systématiser le recensement statistique des inégalités, utiliser et améliorer les indicateurs existants ;
- Promouvoir l’égalité hommes/femmes : valoriser et promouvoir la place des femmes artistes, écrivaines, intellectuelles, commissaires d’expositions, directrices d’établissements culturels, journalistes et cadres des médias ;
- Sensibiliser les publics, les élus et les responsables d’administration ;
- Intégrer cette dimension dans la formation des professionnels des secteurs culturels et audiovisuels ;
- Développer des ateliers de renforcement des capacités en matière de TIC et la possibilité d’apprentissage tout au long de la vie.

Accès aux services et infrastructures, eau et assainissement

La dimension du genre est particulièrement pertinente dans le secteur de l’eau et l’assainissement, et notamment en milieu rural où ce sont majoritairement aux femmes et jeunes filles qu’incombent les tâches liées au puisage, au transport, au stockage et à l’usage de l’eau. Une étude [20] montre que chaque femme transporte en moyenne chaque année, selon les pays, l’équivalent de 10 à 40 tonnes d’eau et de bois de chauffage sur un kilomètre, soit 3 à 7 fois plus que la charge de transport dévolue aux hommes. Ce sont également elles qui assument la plupart des tâches liées à l’entretien des ouvrages d’assainissement et l’éducation à l’hygiène. Mais si leur rôle est aujourd’hui largement reconnu en tant qu’usagères, elles sont encore insuffisamment associées aux processus de décision et de gestion des ouvrages. De ce fait, il apparaît comme indispensable de promouvoir leur pleine participation dans les projets d’eau et d’assainissement.

En outre, la scolarisation des filles est impactée par deux éléments : la mobilisation de la force de travail des filles pour les corvées domestiques, notamment le transport de l’eau et du combustible, et le manque de sanitaires séparés et adéquats.


Leviers d’actions :
- S’assurer que les points d’eau ne sont pas trop éloignés des habitats (moins de 30 minutes aller- retour, file d’attente comprise) et/ou assurer l’accès aux services à l’habitat (OMD 7C) ;
- Systématiser la séparation par genre des toilettes publiques (écoles, centres de soins) ;
- Systématiser la participation des femmes aux associations d’usagers et prendre en considération les différences sociales et d’âge ;
- Renforcer les capacités des femmes dans les secteurs de compétence de l’eau et l’assainissement ;
- Intégrer l’approche genre dans les projets de solidarité internationale.

Les expériences de l’AFD en matière d’alimentation en eau potable et en assainissement ont montré que l’implication des différentes composantes d’une population dans les projets augmentait leurs chances de réussite et de pérennisation. L’intégration d’une approche genre dans les projets eau et assainissement implique de veiller à ce que les besoins et intérêts des différents groupes sociaux soient pris en compte. Cela passe souvent par la mise en place d’équipes d’animation constituées d’un binôme homme-femme (mixité). Ils travaillent ensemble ou se répartissent le travail sur le terrain suivant la nature des activités. Les animatrices sont plus facilement accueillies dans les concessions. Elles peuvent ainsi plus librement discuter avec les femmes sur des thèmes délicats, comme ceux touchant à la santé, à l’hygiène, aux sources de revenus. Cette approche est mise en œuvre dans l’ensemble des projets d’hydraulique villageoise financés par l’AFD (exemple : projet eau potable et assainissement dans la région du Centre Nord, au Burkina Faso, 7 M€).


IX. SUIVI-EVALUATION ET CADRE LOGIQUE

1 - Le suivi-évaluation de la stratégie

(a) Le suivi annuel du Haut conseil à l’égalité

Installé le 3 janvier 2013, par décret du Président de la République, le Haut Conseil à l’Égalité entre les femmes et les hommes (HCE) a pour mission « d’assurer la concertation avec la société civile et d’animer le débat public sur les grandes orientations de la politique des droits des femmes et de l’égalité ».

Présidé par Mme Danielle Bousquet, cette nouvelle instance consultative associe 72 personnalités, représentant(e)s des associations et personnes morales de droit public ou privé, élu(e)s nationaux et locaux, personnalités qualifiées, chercheur(e)s et expert(e)s, représentant(e)s de l’Etat, membres de droit, dont les 14 hauts fonctionnaires en charge de l’égalité des droits auprès des ministres.

Le HCE contribue à l’évaluation des politiques publiques qui concernent l’égalité entre les femmes et les hommes, il assure l’évaluation des études d’impact des lois, règlements, documents d’évaluation des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale. Il recueille et diffuse les analyses, études et recherches françaises, européennes et internationales relatives à l’égalité entre les femmes et les hommes, formule des recommandations, des avis et propose des réformes au Premier ministre.

Le HCE peut être saisi de toute question par le Premier ministre ou la Ministre chargée des Droits des femmes. Il peut se saisir de toute question de nature à contribuer aux missions qui lui sont confiées.

Sa commission « Droits des femmes et enjeux internationaux et européens » assurera le suivi annuel de la mise en œuvre de la stratégie « genre et développement ».

Chaque année, à la date d’anniversaire de l’adoption de la stratégie, le Ministère des Affaires étrangères remettra un rapport de suivi de la mise en œuvre de la stratégie sur la base du cadre logique annexée à la stratégie. Le HCE organisera une série d’auditions de représentant(e)s de haut niveau du Ministère des Affaires étrangères et de ses opérateurs, notamment de l’Agence française du développement et de France expertise internationale, ainsi que du Ministère de l’Economie et des finances et de membres de la plateforme « genre et développement ». Enfin, il publiera un rapport d’évaluation annuel qui sera diffusé à l’ensemble des membres de la plateforme « genre et développement », au Parlement, dans les administrations centrales ainsi que dans les postes diplomatiques et les agences de l’AFD.

Il pourra le cas échéant émettre un avis et des recommandations sur le suivi de la stratégie « genre et développement ».

(b) Le rôle de la plateforme « genre et développement »

La plateforme « genre et développement » a été créée en 2006. Elle rassemble des représentant(e)s de la société civile, des institutions, de la recherche et des parlementaires. C’est un cadre privilégié de concertation de l’ensemble des acteurs et actrices qui travaillent sur les questions de genre et développement.

Dans le cadre de la nouvelle stratégie, le rôle de la plateforme est réformé. Sa mission principale sera d’assurer l’accompagnement et le suivi de la mise en œuvre de la nouvelle stratégie « genre et développement », en complémentarité avec le Haut Conseil à l’égalité.

Elle pourra, d’une part, organiser des groupes de travail et des réunions d’échanges d’expériences et de bonnes pratiques tout au long de l’année. Elle sera d’autre part responsable de la transmission d’informations au Haut conseil à l’égalité afin de lui permettre d’assurer son rôle d’évaluation.

Son secrétariat sera assuré par le Ministère des Affaires étrangères, en concertation avec des représentants nommés par la société civile, le secteur de la recherche, des ministères, des institutions internationales et des parlementaires. Un budget sera mis à disposition et géré par le Ministère des Affaires étrangères, destiné à l’animation des groupes de travail et la publication de rapports techniques et méthodologiques.

(c) le Conseil national du développement et de la solidarité internationale

Le Conseil National du développement et de la solidarité, qui rassemble à parité femmes et hommes, sera informé chaque année des résultats de l’évaluation des résultats de la présente stratégie. La thématique du genre fera partie intégrante des sujets qui pourront être traités par le Conseil.

2 - Le cadre logique

Sous forme de tableau, le cadre logique reprend les objectifs, actions, résultats attendus, indicateurs, et dresse la liste des services concernés et des échéances. Cette matrice servira de support à l’évaluation de la mise en œuvre de la stratégie « genre et développement ».

Le cadre logique définit des activités et des indicateurs de résultats globaux pour le Ministère des Affaires étrangères les opérateurs et partenaires du développement : l’Agence française de développement, France Expertise international, Canal France International, l’Institut français, Campus France, l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, Coordination Sud, les acteurs de la coopération décentralisée et de la recherche.



- Prise en compte du genre dans tous les instruments de financement du développement

OBJECTIF : introduire des mécanismes de prise en compte du genre dans les procédures d’élaboration, de suivi et d’évaluation des projets afin que d’ici 2017, tous les projets et programmes de l’aide publique au développement française prennent en compte l’analyse genre à toutes les étapes : préparation, instruction, mise en œuvre, évaluation.

INDICATEUR : En 2017, 100% des projets et programmes financés sont notés selon le marqueur genre de l’OCDE (pour l’AFD dans les Etats étrangers) et au moins 50% reçoivent la note 1 ou 2 (l’amélioration de l’égalité entre les femmes et les hommes est respectivement objectif secondaire ou principal), à l’exception des financements apportés sous forme d’aide budgétaire globale ou sectorielle ou de ligne de crédit non affectée.

Activités Résultats attendus / indicateurs Services concernés Echéance
1 Développer, pour chaque instrument de financement du développement (FSP/FSD, programmation des SCAC, AFD, financement des ONG, projets de coopération décentralisée), un outil d’aide à la prise en compte du genre à destination des porteurs de projet. Publication, dès 2014, de la totalité des outils d’aide à la prise en compte du genre. DGM/DBM/SAH, DGM/DPR/RES, DAECT, Commission nationale de coopération décentralisée (CNCD) opérateurs du MAE / AFD, FEI Dès 2014
2 Réviser les procédures d’instruction des projets pour qu’elles prennent en compte systématiquement les questions de genre. Les procédures d’écriture et d’instruction de chaque instrument de financement du développement, ainsi que celles des opérateurs et de la coopération décentralisée, sont révisées dès 2014. Les nouvelles procédures impliquent une analyse des enjeux de genre, la définition d’activités spécifiques et transversales et l’utilisation d’indicateurs de genre. Le genre est ainsi pris en compte de façon transversale dans tous les nouveaux appels à projets. DGM/DPR, DAECT, Commission nationale de coopération décentralisée (CNCD) Opérateurs du MAE / AFD, FEI Dès 2014
3 Faire de la prise en compte du genre un critère d’octroi des financements. Pour chaque instrument de financement du développement, une grille d’évaluation et de notation sur le genre est développée et utilisée lors des comités d’examen et de sélection des projets. DGM/DPR, DAECT, Commission nationale de coopération décentralisée (CNCD) Opérateurs Dès 2014
4 Renforcer et améliorer l’utilisation du marqueur genre de l’OCDE. Rédaction d’un vademecum détaillé sur le marqueur genre afin d’assister les porteurs de projet. AFD MAE (DGM/BPM/DEV) A partir de 2014
5 Intégrer le genre dans les contrats d’objectifs et de moyens des principaux opérateurs, au fur et à mesure de leurs révisions. L’ensemble des contrats d’objectifs et de moyens révisés d’ici 2017 comprennent une approche genre (Agence française de développement, France expertise internationale, Canal France international, Institut Français, Agence pour l’enseignement français à l’étranger, Campus France, Fondation Alliance française). Services chargés de la tutelle des opérateurs : DGM/DBM/DEV, DCUR, DGM/DPR, cabinets Finalisation en 2017


- Appropriation des questions de genre par les agents et les services

OBJECTIF : Sensibiliser les agents du Ministère et ses opérateurs aux enjeux de genre et développement, développer les modules genre dans les plans et guide de formation interne.

INDICATEURS :
→ 30% des rédacteurs/trices, chefs de pôle, et sous directeurs/trices de la DGM ; des chefs de projets et des managers de l’AFD ont reçu une formation ou une sensibilisation sur le genre en 2014, 50% en 2015, 75%, en 2016, 90% en 2017.
→ Elargissement progressif de l’indicateur aux autres opérateurs.

Activités Résultats attendus / indicateurs Services concernés Echéance
6 Sensibiliser les personnes en situation de responsabilités au MAE et à l’AFD aux enjeux de genre de développement Des sensibilisations au genre sont organisées pour les responsables d’administration centrale et du réseau du MAE et de l’AFD concernés par la thématique
L’AFD pourrait s’engager à sensibiliser 50% des managers en 2015 et 90% en 2017.

Un module sur cette thématique est programmé dans le cadre du stage des nouveaux partants du réseau DGM ainsi que dans le cursus de formation des nouveaux cadres A du MAE au sein de l’Institut diplomatique et consulaire (IDC).
MAE : DGA/DRH

AFD

DGM/DPR et Institut français (pour ce qui concerne le stage des nouveaux partants du réseau DGM)

Dès 2014
7 Former les personnes chargé-e-s du suivi des projets et des financements du développement au Département et à l’AFD. formation d’une journée serait mise en oeuvre avec pour objectif de former 90 % des chefs de projets en 2017. MAE : DGA/DRH
AFD
Dès 2014
8 Généraliser les modules sur le genre dans les guides de formation interne du MAE et de l’AFD Des modules sur le genre sont intégrés au guide de formation interne et dans les formations des nouveaux partants. MAE : DGA/DRH
AFD
Dès 2014
9 Nommer des correspondants genre dans toutes les directions du Département où cela est pertinent et définir leurs missions. Un mandat et des missions sont clairement définis pour les correspondants genre. Ils bénéficient d’une formation spécifique. Ils remettent annuellement un 1 court rapport d’activités. MAE : DGM/BPM/SAH et chaque sous directions Opérateurs du MAE Dès 2013
10 Nommer des correspondants genre dans le réseau diplomatique et définir leurs missions. Des correspondants genre sont désignés dans tous les postes. Ils sont formés à leur départ en poste. Ils fournissent un rapport annuel de bilan de leur action. Un séminaire des correspondants genre est organisé pendant les journées du réseau. Postes
(pilotage DGM/BPMSAH)
Dès 2014
11 Nommer des correspondants genre dans tous les services des opérateurs où cela est pertinent et définir leurs missions. Un mandat et des missions sont clairement définis pour les correspondants genre. Ils bénéficient d’une formation spécifique proposée par les opérateurs Tous les opérateurs Dès 2014
12 Animer, au-delà de la plateforme genre déjà existante, un réseau « élargi » des correspondants genre (Département, réseau, opérateurs, autres ministères, coopération décentralisée, recherche). Réunion annuelle du réseau des principaux acteurs de la stratégie « genre et développement » MAE : DGM/ DBM/SAH Dès 2014


- Renforcement de la recherche sur le thème « genre et développement »

OBJECTIF : Encourager l’essor de projets de recherche sur le genre afin d’améliorer les pratiques de développement.

||||| ||Activités|Résultats attendus / indicateurs|Services concernés|Echéance| |13|Recenser les travaux existant sur le thème « genre et développement » au sein des organismes de recherche français, notamment IRD, CIRAD, CNRS, INSERM, INED. Identifier les experts de ce thème au sein des institutions françaises.|Une liste des travaux existant sur genre et développement, précisant les dernières publications, est mise à disposition. Un réseau de chercheurs sur « genre et développement » est créé.|DGM/ DCUR, DGM/DBM|A partir de 2014| |14|Encourager, soutenir et valoriser les travaux de recherche sur « genre et développement ».|Demander aux instituts de recherche sous tutelle (ex : CIRAD) ou autorité du MAE (ex : instituts français de recherche) de développer des programmes de recherche sur « genre et développement ». Encourager l’ensemble du monde de la recherche à investir c

Notes

[1Anciennement « Observatoire de la parité entre les femmes et les hommes » (OPFH)

[2CAD-OCDE, Examen des politiques et programme de la France en matière de coopération et de développement, projet de principales conclusions, 27 mai 2013.

[3FAO, rapport annuel 2011, « Les femmes, clé de la sécurité alimentaire. »

[4ONU Femmes, rapport sur les progrès des femmes dans le monde, « En quête de justice », 2011-2012

[5Adolescentes, jeunes femmes et développement, rapport 2013 du groupe de travail, PLAN et MAEE

[6Banque mondiale, Rapport sur le développement, sur le genre, l’égalité et le développement, 2012

[7Retours sur investissement dans l’éducation, George Psacharopoulos et Harry Anthony Patrinos, Banque Mondiale, 2002

[8Genre et empowerment, Les essentiels du genre n°10, Le monde selon les femmes, 2009

[9Pour l’AFD, cela ne concerne que les projets et programmes financés dans les Etats étrangers

[10CAD-OCDE, Aide à l’appui de l’égalité hommes-femmes et de l’autonomisation des femmes

[11L’emploi vulnérable est un concept développé par le BIT pour calculer les personnes qui sont employées selon des modalités précaires, (rémunérations, contrats formels, avantages sociaux, protection sociale), à l’instar des travailleurs familiaux

[12Chiffres de la Banque Mondiale, 2012

[13FAO, Situation Mondiale de l’alimentation et de l’agriculture

[14Plan d’action francophone sur les violences faites aux femmes et aux filles, mars 2013

[15Rapport du Secrétaire général des Nations Unies sur les violences faites aux femmes, à l’occasion de la 57ème Commission sur le statut des femmes, mars 2013

[16Rapport des Nations Unies sur les Objectifs du millénaire pour le développement, 2012

[17ONU Femmes, rapport annuel sur les progrès des femmes dans le monde, 2011-2012

[18Conseil pour le développement de la recherche en sciences sociales en Afrique

[19Genre et changement climatique, bulletin de Bridge N°22, 2011

[20Eau, genre et développement durable, Expériences de la coopération française en Afrique subsaharienne, collection Études et Travaux, Éditions du Gret, Ministère des Affaires étrangères, AFD

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