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Synthèse de l’étude Agendas 21 / action internationale des collectivités

Quelles articulations ?

décembre 2009, par Yveline Nicolas

Parution de la synthèse de l’étude menée par Adéquations et Equinoxe Conseil pour l’ARENE Ile-de-France, Agence française de développement, Conseil régional Ile-de-France sur les articulations entre les agendas 21 et les actions internationales des collectivités. Ces premiers éléments ont été mis présentés lors d’une journée d’échanges et de débats le 23 novembre 2009 au Conseil régional d’Ile-de-France, qui a accueilli 17 intervenant-tes et 180 participant-es. Une publication intégrant les résultats de l’étude et les débats de cette journée paraitra d’ici la fin du premier trimestre 2010. Par ailleurs, Adéquations a complété sa rubrique de ressources sur "Développement durable, action territoriale, action internationale". (Cf. lien en bas du texte).


 Introduction

L’ARENE Ile-de-France a mené, avec l’Agence française de développement et la Région Ile-de-France, une étude sur la thématique des articulations entre agendas 21 et actions internationales des collectivités, essentiellement dans le cadre de la coopération décentralisée avec les pays du Sud . Cette étude, confiée à l’association Adéquations et au cabinet Equinoxe Conseil permet d’alimenter les débats des 4èmes Rencontres des acteurs de la coopération et du développement durable le 23 novembre 2009 au Conseil régional d’Ile de France.

Une démarche d’agenda 21 a pour objectif de réinterroger les politiques territoriales sur les finalités de développement durable (sous l’angle des enjeux locaux et globaux) et permet l’application de modalités de mise en œuvre spécifiques (participation, transversalité, évaluation, amélioration continue, …).

L’objectif de l’étude est d’analyser comment l’action internationale intègre les enjeux et les modalités de mise en œuvre du développement durable et comment la conception et la mise en œuvre d’un agenda 21 locale, comme projet territorial de développement durable, intègre et est enrichie par l’action internationale des collectivités.

Ce travail fera l’objet d’une publication début 2010, intégrant à la fois les résultats de l’enquête auprès des collectivités territoriales et les acquis de ces Rencontres, ainsi que les apports de collectivités souhaitant encore mentionner leurs pratiques et leurs enseignements .

Une enquête a été effectuée entre mai et octobre 2009 auprès d’un échantillon d’une trentaine de collectivités françaises, villes, intercommunalités, conseils généraux, conseils régionaux, ainsi que quelques structures intervenant dans le champ de l’étude (cf. Annexe 1 la liste des collectivités et structures). Elle visait, par le moyen de questionnaires et d’entretiens avec les responsables des politiques d’agenda 21 et de l’action internationale, à recueillir des pratiques, interrogations, enseignements émanant directement de ces acteurs. Par ailleurs, un atelier s’est tenu pendant les journées de l’ARRICOD des 24 et 25 septembre 2009 à Dunkerque, permettant de tester la validité d’axes pour le débat.

Une échelle a été formulée initialement, mesurant les degrés d’articulation entre les deux politiques, allant d’une simple mention dans des documents de référence à une mise en cohérence réelle de ces politiques. Une grille de critères de ces articulations et un questionnaire indicatif sont venus en support des entretiens.

Les agendas 21 locaux

L’agenda 21 et plus généralement les projets territoriaux de développement durable font aujourd’hui partie intégrante du paysage politique français des collectivités et des habitant-es. En juin 2008, plus des deux tiers de la population vivait sur un territoire (région, département, intercommunalité, commune) engagé dans une démarche de développement durable, ce qui représente plus de 40 millions de personnes . Début 2009, 355 démarches d’agenda 21 sont recencées, à des stades divers de maturité .

L’agenda 21 est une démarche volontaire ayant pour ambition d’engager le territoire et ses habitant-es sur les principes fondateurs du développement durable : lutte contre le changement climatique ; préservation de la biodiversité, des milieux et des ressources ; cohésion sociale et solidarité entre territoires et entre générations : épanouissement des êtres humains et qualité de vie ; dynamique de développement suivant des modes de production et de consommation responsables. L’agenda 21 est un processus basé sur le principe de la participation des acteurs du territoire, la transversalité des approches, l’organisation spécifique du pilotage, l’articulation des niveaux de territoires tout en respectant le principe de subsidiarité et enfin le suivi et l’évaluation partagée permettant son amélioration continue. L’action des collectivités est aujourd’hui structurée par plusieurs cadres, outils et dispositifs de référence développés par le MEEDDM (cf. point 3).

L’action internationale des collectivités

La coopération à l’international concerne toutes les régions françaises, presque tous les départements et grandes villes, de nombreuses communes moyennes ou petites et un nombre croissant de structures intercommunales. Selon le MAEE, près de 3800 collectivités territoriales françaises et près de 8000 projets menés ont été répertoriés pour l’atlas français de la coopération décentralisée et des autres actions extérieures, mise en ligne en juillet 2009 . L’action internationale des collectivités recouvre la coopération décentralisée (conventions entre une ou plusieurs collectivités territoriales et une ou plusieurs autorités locales étrangères dans un intérêt commun), l’action extérieure (rayonnement économique et culturel, aide humanitaire), l’action de solidarité internationale mis en œuvre par des ONG du territoire, la coopération interrégionale et transfrontalière. La coopération décentralisée dispose d’un cadre juridique avec la Loi Thiollière de 2007 (possibilité de conclure des conventions de collectivités à collectivités), et la Loi Oudin-Santini (possibilité d’affecter 1 % du budget à des actions de coopération et de solidarité internationale). Notre étude traite de l’action internationale au sens large, essentiellement avec les pays du Sud.

 1. Le diagnostic global, exprimé par les collectivités

La mise en œuvre territoriale du développement durable par des projets de territoires, en particulier les agendas 21, partage de nombreux principes et valeurs avec l’action internationale des collectivités : la solidarité dans le temps et dans l’espace, l’équité, le principe de précaution et la réversibilité des actions, la liberté de choix pour les générations futures, la subsidiarité, l’ancrage sur un territoire, etc. La notion de coopération avec les parties-prenantes, les acteurs des territoires, est centrale à la fois pour les agendas 21 et pour l’action internationale.

L’action de coopération et de solidarité internationale met en évidence les impacts mondiaux des décisions locales – tout comme les impacts locaux d’évolutions et de mécanismes globaux (ainsi, la question des migrations, en particulier des migrations climatiques). Les démarches de commerce équitable et d’achats éthiques des collectivités se développent et constituent également un levier d’articulation dans la mesure où le commerce équitable vise à intégrer des dimensions économiques, sociales, environnementales, culturelles et participatives.

Dans le contexte de la crise écologique et économique mondiale, des problèmes de sécurité, des migrations, de la montée des inégalités et de l’augmentation du nombre de personnes souffrant de la faim, de nombreux textes et références se rejoignent autour des enjeux planétaires communs (Stratégie nationale et européenne de développement durable, Objectifs du millénaire pour le développement, plans de réduction des gaz à effet de serre (GES)…) ; ces textes peuvent servir de cadres à l’une et l’autre des politiques et constituer ainsi un facteur d’articulation.

Pourtant, malgré des évolutions très positives, notamment dans le cadre des agendas 21 de 2ème génération, les articulations opérationnelles entre agendas 21 (ou autres politiques territoriales similaires de développement durable) et les actions internationales des collectivités territoriales restent encore assez peu développées. La solidarité et la coopération internationales figurent dans les agendas 21 : dans la majeure partie des cas, l’action internationale est intégrée en tant qu’élément de l’axe stratégique de la solidarité et presque toutes les collectivités la font figurer comme une ou plusieurs actions. Mais cela ne signifie pas nécessairement qu’il y ait, dans la pratique, cohérence ou intégration effective des démarches, articulation entre les actions sectorielles « ici » et « là-bas », outils méthodologiques communs de mise en œuvre.

Une des raisons est le cloisonnement des services et en particulier de l’action internationale. La coopération reste souvent perçue comme un service un peu marginal, dont les responsables politiques et techniques sont souvent en déplacement. Ce problème est bien connu de la profession, les personnes concernées étant en même temps conscientes que les problématiques et les outils de développement durable et de coopération et solidarité internationale se rejoignent, et qu’il existe un potentiel d’une meilleure intégration et d’un enrichissement mutuel.

Le cloisonnement des relations internationales provient également de son double ancrage géographique et culturel. Aussi, est-il plus complexe et plus difficile pour les actions internationales de faire preuve de leur efficacité et de leur légitimité en tant que politique publique territoriale. Le fait d’être sur des contraintes de gouvernance, des contextes socio-économiques, des échelles de temps et des histoires différentes explique partiellement le manque d’articulation. Les actions de coopération sont généralement plus anciennes que les agendas 21, dont l’essor est récent. Les rapprochements tiennent beaucoup aux motivations d’élu-es et/ou de responsables techniques. Les changements de personnes expliquent que dans certains cas des expériences intéressantes ne soient pas pérennisées, d’autant que les démarches de capitalisation et de transmission de l’expertise et des savoirs constituent très souvent un maillon faible.

Le manque d’articulation tient aussi au fait que la notion de développement durable n’est pas toujours appropriée dans sa complexité. Des agendas 21 restent encore « environnementaux » ou sectoriels et n’intègrent que de manière partielle l’interconnexion des sphères du développement durable. Ils se contentent parfois de compiler les actions réalisées par les différents services. Dans certains cas, la connaissance effective de l’agenda 21 par les services n’est pas suffisamment développée, ce qui rend d’autant plus difficile la réinterrogation des autres politiques de la collectivité.

C’est dans le portage et la volonté politique que réside une des clés de l’articulation. Cette articulation doit ensuite être traduite en termes techniques et de pilotage, par les services.

En fonction de leur parcours professionnel, des responsables de l’action internationale d’une collectivité peuvent appliquer naturellement des principes qui, même non estampillés développement durable, relèvent de projet territorial (développement local, aménagement du territoire, politique de la ville, urbanisme, etc). Quand ils ont une expérience importante, leur expertise jumelée développement local / coopération gagnerait à être mieux mise à profit lors de l’élaboration des agendas 21.

L’antériorité de l’action de développement au Sud peut être un apport essentiel pour élargir et compléter la vision du développement durable au niveau territorial et rappeler que la dimension de coopération et de solidarité internationale figure parmi les fondamentaux du développement durable défini par la communauté internationale depuis le rapport Brundtland et la Conférence de Rio.

Par ailleurs, l’action internationale, comme la politique territoriale de développement durable, adopte aujourd’hui souvent une méthodologie en mode projet, favorisant la participation des acteurs, la prise en compte des aspects multi dimensionnels du développement, mettant en œuvre une nouvelle forme de management transverse. De même, ces deux politiques intègrent souvent l’éducation à leur propre politique, en la positionnant comme un objectif.

La participation citoyenne est un des éléments d’articulation essentiels du fait de son intégration dans l’une et l’autre des politiques. Elle peut mobiliser différents partenaires sur le territoire et créer des liens avec d’autres projets ou d’autres territoires. Par un maillage du territoire ici et là-bas, elle peut également constituer un facteur de cohérence, de pertinence et de pérennité des actions.

L’émergence récente des Plans climat énergie territoriaux, qui répondent à l’une des finalités du développement durable, à savoir la lutte contre le changement climatique, représente une opportunité pour l’articulation avec l’action internationale des collectivités, en permettant de mettre en avant la réponse territoriale aux enjeux mondiaux, face à l’impact international des décisions locales. La politique climatique peut aboutir à des actions de compensation volontaire directement liées à l’action internationale de la collectivité, à des transferts de lignes budgétaires, à la création de fonds destinés à des projets d’énergies renouvelables, etc. Mais n’y a t-il pas le risques d’une articulation insuffisante entre agenda 21 et Plan climat énergie territorial conduisait à une focalisation des agendas 21 sur le volet environnemental au détriment du social, de la diversité culturelle et de l’économique ? Les collectivités doivent réussir ce nouvel enjeu dans la complexité du développement durable : intégrer le Plan climat énergie territorial comme un volet opérationnel de l’agenda 21 local, et intégrer la dimension de coopération internationale à cet ensemble.

En matière d’articulation entre politique internationale et territoriale, la transposition de notre « schéma de développement durable » à des projets de développement au Sud est souvent évoquée comme non pertinente dans des situations où les mêmes conditions de gouvernance ne sont pas acquises et où les contextes socio-économiques et culturels sont très différents. D’autre part, le manque de culture interne du développement durable, notamment quand il n’y a pas encore d’agenda 21 interne de la collectivité, rend difficile des transpositions ou adaptations, vécues comme le fait de « donner des leçons » alors qu’on est soi-même confronté en interne à des situations loin d’être exemplaires.

Ce sont les principes et les méthodes (diagnostic territorial partagé, transversalité, participation, articulation d’échelles de territoires, évaluation, amélioration continue, etc) qui sont transposables, et non pas l’agenda 21 lui-même.

La démarche volontaire de l’agenda 21, quand elle est appropriée comme un système de gouvernance, visant à mettre en cohérence les politiques sectorielles et les instruments règlementaires de planification stratégique (PLU, SCoT, SRDDT, CUCS, …) est plus efficace pour intégrer et valoriser l’action internationale que si elle reste conçue comme un ensemble de projets sectoriels, voire une politique environnementale. Certaines collectivités estiment que l’action internationale partage avec le processus d’agenda 21 cette transversalité avec tous les secteurs d’activités d’une collectivité (ex. urbanisme, action sociale, éducation, achats…), et que la coopération internationale peut donc être conçue, elle aussi, comme un outil d’articulation des politiques territoriales.

Les collectivités considèrent d’une manière générale qu’il n’y a pas une échelle de territoire plus appropriée qu’une autre pour favoriser cette articulation. Tout dépend du contexte, des responsables politiques et techniques, du mode de gouvernance interne, de l’antériorité de l’expertise. L’objectif de développement durable au niveau territorial et international est un facteur de mise en cohérence des différentes échelles de compétences, par exemple entre communes et intercommunalités. La coopération décentralisée peut aider à cette mise en cohérence par une répartition des interventions selon les domaines de compétences.

L’étude a montré que beaucoup de collectivités sont demandeuses d’informations, de contacts, de connaissance d’outils et de pratiques développées ailleurs, et donc une mise en réseau sur ces questions pourrait constituer une réponse à ces attentes. Un intérêt certain s’est manifesté pour cette thématique de l’articulation entre politiques territoriales et actions internationales.

 2. Les enseignements de l’étude

Les premiers enseignements ont fait émerger trois grandes problématiques. Celles-ci rassemblent différentes expériences concrètes et permettent d’approfondir des questionnements et de tirer des enseignements : la gouvernance, la cohérence, les outils et réseaux.

  2.1 Le mode de gouvernance interne des collectivités, facteur d’articulation

La structure institutionnelle et organisationnelle interne aux collectivités en ce qui concerne les politiques d’agenda 21 et internationale a des répercussions directes sur l’articulation de ces politiques : positionnement des deux services dans l’organigramme, hiérarchie des services et des responsables, existence de structures transversales, modes de concertation, par exemple, dans le cadre d’un agenda 21 interne ou de son évaluation, etc. Par exemple la ville de Rosny sous Bois s’est dotée d’une Mission des Relations internationales et du Développement durable, cellule transversale dirigée par un même responsable au statut hiérarchique de directeur. Dans d’autres collectivités, l’élu peut être chargé à la fois de l’Agenda 21 et de la coopération (Conseil général des Côtes d’Armor, Vice-président chargé de l’Agenda 21, la prospective et la coopération internationale).

Le portage et la volonté politique sont essentielles, et peuvent être mesurés par leur traduction opérationnelle : moyens mis en œuvre, financiers, humains, en termes de communication…

La dimension pluri-sectorielle de la coopération internationale et le fait que des directions diverses aient la possibilité de co-construire des projets et d’aller « sur le terrain » est un facteur très favorisant de l’articulation. La transversalité de la coopération internationale peut être un nouvel outil de management et de motivation des services. Si la coopération décentralisée est perçue positivement, l’investissement des services et des personnes peut être un nouveau levier de motivation ou de gratification (telle est la volonté de l’action internationale de la ville d’Angers, par exemple). Les expériences de congés solidaires proposés aux agent-es sont une autre façon d’impliquer les services (Conseil Général du Cher, Conseil Général d’Ile-et-Villaine). Cependant le problème de la mobilisation des experts territoriaux est connu, la Région Ile de France mène actuellement une réflexion sur la mise en place d’un fichier d’experts territoriaux disposant de compétence spécifiques et consultables par des bailleurs potentiels. Malgré cette nécessaire transversalité, les collectivités doivent veiller à ce que l’action internationale ne s’éparpille pas entre services, au risque de perdre sa cohérence et sa vision politique globale.

Le positionnement dans l’agenda 21 et les objectifs des relations internationales auront des répercussions sur les modes d’articulations. La priorité peut être mise sur les accords de coopération décentralisée, sur la mobilisation des associations du territoire pour une solidarité Nord/Sud (Conseil général de l’Essonne) et une éducation au développement. L’action internationale peut être intégrée sous l’angle de l’« animation et rayonnement » de la collectivité (Angers), du « vivre ensemble » au niveau du territoire (Nantes) ou alors être positionnée comme une finalité en soi (Bordeaux) ou enfin ne pas être citée mais être déclinée dans l’ensemble des finalités de l’agenda 21 (projet à Lille). Ces différents positionnements et objectifs sont un témoin évident de la richesse de l’action internationale et de sa transversalité. Dans le cadre de référence du MEEDDM , la coopération décentralisée est intégrée dans la finalité « Cohésion sociale et solidarité entre territoires et entre générations ».

La question de la crise économique, de la réforme des institutions, des restrictions budgétaires et des restructurations est de plus en plus à prendre en compte, portant des collectivités à s’investir dans des coopérations à forte valeur ajoutée et en relation avec l’identité de la collectivité et du territoire. Ces coopérations sont d’autant plus perçues comme pertinentes et appropriées par les parties prenantes et la population quand les territoires ont des affinités (coopération transfrontalière, expertise maritime, agricole, identité fluviale, de montagne…), la coopération de fleuve à fleuve Loire/Niger en est un exemple, comme les coopérations euro-méditerranéenes.

La question de la crise économique rend plus aigüe la problématique de la légitimité de l’action internationale qui exerce son activité sur d’autres territoires que le territoire local. Cette critique doit trouver réponse dans l’évaluation des projets d’action internationale, dans les études d’impacts au Nord et au Sud des actions réalisées au Sud et enfin dans une communication efficace sur les enjeux et les objectifs de l’action. L’éducation au développement (durable) doit également trouver sa place dans cette problématique.

C’est au travers de l’évaluation, au regard du développement durable, que ces impacts seront les plus flagrants. D’ailleurs, le nouveau référentiel pour l’évaluation des projets territoriaux de développement durable et agendas 21 locaux consacre une partie à l’évaluation des coopérations décentralisées sous l’angle du développement durable. Cette problématique de la gouvernance intègre l’enjeu fondamental de la participation des acteurs des territoires dans leur diversité (organisations de la société civile, acteurs économiques, chambres consulaires, entreprises, administrations, autres collectivités, etc). Cette participation, est un facteur de décloisonnement interne des actions internationales et de cohérence territoriale accrue. Des expériences innovantes en matière de participation existent : le conseil des sages de la ville de Bessancourt, les ambassadeurs de la solidarité du Conseil Général de Seine et Marne, les budgets participatifs… en constituent un échantillon.

 2.2 La mise en cohérence des politiques et des échelles de territoires

Fondamentalement les agendas 21 posent la question de la cohérence des politiques en vue d’un objectif de développement durable. Même si les démarches visant explicitement la cohérence restent parcellaires - ce point sera à approfondir en sollicitant l’apport d’un nombre plus important de collectivités - l’objectif de mettre en œuvre une stratégie de développement durable intégrée et transversale apparaît comme un facteur de renforcement de la cohérence, et donc, sans doute, de l’efficacité des politiques par de meilleures synergies. Il s’agit ainsi de la cohérence interne à la politique sectorielle elle-même, de la cohérence entre différentes politiques sectorielles, de la cohérence entre les actions mises en œuvre à différentes échelles de territoire.

La diffusion et la mise en pratique de principes, et méthodes de développement durable sont de nature à contribuer à différents niveaux de cohérence :

La cohérence interne de l’action internationale

Le développement durable comme facteur de cohérence des différents volets de cette action : financements des associations locales, jumelages, coopération décentralisée avec les pays du Sud et émergents, « diplomatie climatique », rayonnement international et partenariats économiques…

Ainsi, les outils pratiques et grilles d’évaluation intégrant le développement durable sont un facteur de renforcement de l’efficacité des différents projets et aides, en permettant de formuler des exigences communes basées sur une vision plus claire de ce que doit être l’objectif de développement. (cf. point 4.3)

La cohérence interne des projets territoriaux

Une question se pose fréquemment depuis quelques années : celle des Plans climat territoriaux, qui se développent, notamment au niveau des métropoles et des régions, en réponse aux engagements de réduction des émissions de GES au niveau international, sous-régional et national. Comment articuler les plans climats aux agendas 21 ? Ici, l’action internationale peut jouer un rôle important de cette mise en cohérence en étant le trait d’union Nord-Sud de la politique climatique et énergétique de la collectivité. Par son soutien à CLIMSAT, antenne du PNUD installée à Brest, Brest métropole océane s’engage dans la mise en œuvre de partenariats avec les régions impactées par les changements climatiques. La région Ile de France dispose également d’un programme de mise en place d’une filière « Charbon vert » en région de Kayes (Mali) au titre de la compensation volontaire des émissions de CO2. La ville de Bordeaux réfléchit à un projet (en cours d’élaboration) de fonds de compensation qui serait affecté à des projets « énergie » au Nord et au Sud.

La cohérence entre actions sectorielles internationales et territoriales

L’intégration du développement durable favorise la cohérence interne aux actions sectorielles par des allers-retours et des enrichissements mutuels. L’exemple des actions pour freiner l’érosion de la biodiversité, objectif international de développement durable, en témoigne. En Bourgogne, une coopération avec la Province du Cap Occidental en Afrique du Sud autour des enjeux de biodiversité favorise à la fois le rapprochement du service des relations internationales et de la direction de l’environnement et du développement durable, et le transfert d’expertise Sud-Nord.

Cohérence des différent leviers permettant de nouvelles articulations à dimension participative

Le développement durable favorise la synergie entre l’ancrage territorial et la dimension internationale : action d’éducation au développement, action d’éducation à l’environnement vers un développement durable, soutien au commerce équitable et aux achats éthiques, consommation responsable, politique de co-développement et intégration des migrant-es, agriculture de proximité et les circuits courts… L’initiative Territoires de commerce équitable (et ses seize collectivités pilotes) comporte des « conseils locaux pour le commerce équitable », composés des acteurs engagés (collectivité, entreprises, associations, commerçants…). La démarche entreprise par la Bretagne pour développer une filière de soja « non OGM » avec le Brésil et impliquant les acteurs économiques et sociaux du territoire en est un autre exemple.

Cohérence des échelles de territoire « ici et là-bas »

Les agendas 21 comme les actions internationales peuvent être le lieu d’expériences intéressantes d’articulations des politiques et des projets dans le cadre notamment des intercommunalités, et d’articulation « en cascades » entre communes, département, région. Cette pratique peut aussi enrichir les partenariats de coopération, même si les croisements d’Agenda 21 Nord / Sud sont encore rares. Le partenariat de longue date avec la ville de Saint Louis du Sénégal a aboutit en 2003 à un jumelage des agendas 21 des collectivités respectives, ce jumelage aujourd’hui s’accompagne d’articulation entre échelles de territoire puisque la Communauté urbaine de Lille s’y adjoint également. La coopération décentralisée Côtes d’Armor/Gouvernorat de Gabès s’inscrit dans les Agenda 21 respectifs du Conseil Général des Côtes d’Armor et du Conseil Régional de Gabès. Le nouveau programme de coopération du Conseil régional du Limousin avec Oubritenga au Burkina Faso intégrera les 7 communes de la Province en lien avec 7 communes ou communautés de communes du Limousin. Le Conseil Général de l’Essonne développe pour sa part une mise en réseau des collectivités territoriales françaises et maliennes « pour le développement durable des territoires », impliquant différentes échelles de territoires « ici » et « là-bas ».

Cohérence des dimensions du développement durable

La compréhension interne du développement durable, l’appropriation de sa complexité amène différentes formes d’intégration de celui-ci dans les projets internationaux. Quelque fois, l’interdépendance des thématiques du développement durable est recherchée dans toutes les actions mises en œuvre à l’international (comme c’est le cas pour le projet de coopération entre Bessancourt et la commune rurale de Ze ; de même la Communauté urbaine de Dunkerque cherche à intégrer les différentes composantes du Développement Durable dans ses projets de coopération avec une ville portuaire brésilienne). D’autres fois, les composantes sociales, environnementales, économiques doivent faire l’objet d’au moins une action, mais sans que ces composantes ne soient nécessairement croisées, ce qui ne constitue pas en soi une réelle démarche de développement durable.

L’intégration de la diversité culturelle comme « 4ème pilier du développement durable » - conformément à l’évolution des textes internationaux (plan d’action du Sommet mondial du développement durable, Convention internationale sur la diversité culturelle) apparaît, au niveau territorial, comme un facteur de cohérence et de dynamisme accru de l’agenda 21. Ici, les projets des collectivités à l’international comme au niveau inter-culturel dans les territoires, pourraient être un enjeu majeur à développer.

 2.3Outils et réseaux

L’étude a fait apparaître un questionnement et une demande sur « l’outillage » (méthodologique, de sensibilisation, en termes de réseaux d’échanges, etc.) à faire connaître, à améliorer, voire à susciter en matière de prise en compte du développement durable dans les actions de coopération internationale .

En particulier, des chartes et des outils d’aide à la décision pour intégrer développement durable et coopération ont été créés, notamment dans la dynamique du Sommet mondial du développement durable et de la première Stratégie nationale du développement durable (Cités unies France ou le Haut conseil de la coopération internationale, San de Sénart, Resacoop…). Ces outils ont eu un impact sur un certain nombre de collectivités, en les sensibilisant et en les aidant à intégrer des principes et des critères de développement durable. Des collectivités ont adapté ces outils, s’en inspirant pour créer leur propre charte et grilles de critères – par exemple pour l’instruction des projets des associations qui demandent des financements. D’autres chartes orientent les pratiques des collectivités : Charte européenne pour l’égalité des femmes et des hommes dans la vie locale, du Conseil des communes et régions d’Europe (cette charte comporte un objectif en matière de la coopération décentralisée, et plusieurs collectivités intègrent un objectif d’égalité femmes-hommes dans leurs critères de sélection de projets), Charte européenne de la coopération en matière d’appui à la gouvernance locale…

Des collectivités expriment un besoin d’outils plus opérationnels pour la mise en œuvre pratique du développement durable dans les actions internationales des collectivités dans une démarche de qualité, d’amélioration continue et d’évaluation.

Le MEEDDM a mis en place progressivement depuis quelques années des outils et des cadres qui facilitent l’appropriation et valident des démarches d’agenda 21 pour les collectivités locales. Ces outils et cadres sont les suivants :
- Le cadre de référence qui précise les caractéristiques d’un agenda 21 local, dans lequel la coopération décentralisée tient sa place comme réponse à l’une des cinq finalités du développement durable (cohésion social et solidarité entre territoire et entre générations)
- Le dispositif de reconnaissance des agendas 21, lancé en juillet 2006 et les outils d’accompagnement. La grille de lecture du projet intègre la coopération décentralisée dans l’un des seize domaines du cadre de référence : solidarité et coopération décentralisée.
- Le référentiel pour l’évaluation des agendas 21 qui propose un ensemble de questions évaluatives. Celui-ci intègre également la coopération décentralisée par la question évaluative suivante : la stratégie territoriale intègre-t-elle un ambition en termes de coopération entre territoire au service du développement durable ? L’indicateur stratégique est le budget de la collectivité affecté à la solidarité internationale et au développement et les indicateurs secondaires portent sur le nombre d’acteurs ou d’habitants investis ou bénéficiaires, sur le nombre de projets formalisés …

Les centres de ressources « solidarité internationale » en régions s’adressent pour certains à un public mixte d’associations et de collectivités (Horizons Solidaires en Basse Normandie, Résacoop en Rhône Alpes…), pour d’autres uniquement aux associations (CASI Bretagne ; par ailleurs une plate-forme collaborative ABCIS a été créée pour la concertation de toutes les familles d’acteurs impliqués dans la solidarité internationale : associations, collectivités, migrants, éducation, santé, entreprises, culture…). La mixité des acteurs paraît pouvoir être un facteur pour aller vers une culture commune, pour améliorer et concerter les pratiques et l’outillage.

En lien avec ces centres de ressources, les collectivités développent de plus en plus des formations méthodologiques pour les associations locales et les acteurs qui sollicitent et reçoivent des appuis pour les projets à l’international. Il serait important d’y intégrer de façon plus systématique les aspects de développement durable, notamment les méthodes de diagnostics territoriaux, d’évaluation participative, etc.

De plus en plus de collectivités créent leurs grilles d’instruction et d’évaluation des projets de solidarité internationale – et de leurs projets de coopération – pour intégrer le développement durable (Conseil Général de l’Essonne, Conseil général de l’Isère, Conseil Général des Côtes d’Armor, Communauté urbaine de Dunkerque, Conseil Général de Seine et Marne, Conseil Régional de Bretagne, etc.). Ces outils pourraient être mutualisés pour aider les nouvelles collectivités qui s’engagent dans de telles démarches.

L’appartenance des collectivités à des réseaux de développement durable paraît être un moyen de renforcer les compétences et la cohérence territoriale et internationale notamment dans des domaines d’expertise thématique : au niveau local (achats responsables grand ouest), national (comité 21, 4D, observatoire des Agendas 21), internationale NRG4SD (Network of Regional Governments for Sustainable Development) qui rassemble des gouvernements régionaux engagés dans la lutte contre le réchauffement climatique, Effinergie, Réseau Energie-cités, et convention des Maires sur le changement climatique, Conférence des villes de l’arc atlantique (charte atlantique de San Sebastian pour un développement urbain durable), Conférence des régions périphériques maritimes, etc.

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