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Genre, économie informelle et travail décent

Jeudi 28 octobre 2010, par Bénédicte Fiquet


Genre, économie, travail informel

On estime que l’emploi informel englobe environ 65 % de l’emploi non agricole dans les pays en développement d’Asie, 51 % en Amérique latine, 48 % en Afrique du Nord, et 72 % en Afrique subsaharienne. Cette part serait nettement plus importante dans certains pays si l’emploi informel dans l’agriculture était inclus.

La représentation des femmes, des jeunes, des personnes âgées, des minorités, des travailleurs migrants et des peuples autochtones y est prépondérante.

Non reconnu-es et non enregistré-es, les travailleur-ses de l’économie informelle sont soumis-es à des conditions particulièrement précaires et vulnérables : lieux de travail exigus ou indéfinis ; faibles niveaux de qualification et de productivité ; revenus médiocres ou irréguliers ; longues heures de travail ; exclusion de la protection de la législation du travail et de la protection sociale, insécurité dans le domaine des droits de propriété, ce qui empêche d’accéder au capital et au crédit ; difficultés pour accéder au système judiciaire et légal ; difficulté d’accès aux infrastructures et prestations publiques.

S’il faut souligner la diversité des situations d’un secteur économique à l’autre (entre les zones rurales et les zones urbaines, d’une situation professionnelle à l’autre, et d’un contexte national à l’autre), s’affranchir de l’informalité ou organiser les travailleuses et travailleurs de l’informel est souvent considéré comme le principal défi en matière de développement dans les diverses régions.

La Conférence Internationale du Travail (90ème session, Genève) a adopté le 19 juin 2002 une Résolution et des conclusions concernant le travail décent et l’économie informelle. Le point de vue de la CIT 2002 constitue un cadre intégré au niveau mondial qui reconnaît et favorise le double objectif de préserver et développer le potentiel de l’économie informelle en matière d’emploi, de production de revenus et de réduction de la pauvreté tout en étendant la protection sociale à la grande majorité de la population qui travaille dans l’économie informelle.
Télécharger la Résolution (pdf, 11 pages, 70 ko)

Genre, économie informelle et travail décent

Dans la plupart des pays en développement, le pourcentage des femmes qui travaillent dans l’économie informelle est plus élevé que celui des hommes. Plus de 60 % des travailleuses sont dans l’emploi informel en dehors du secteur de l’agriculture, et lorsqu’on prend l’agriculture en compte, les chiffres sont encore plus élevés.

Même dans l’économie informelle, les femmes sont concentrées au bas de l’échelle, là où les déficits de travail décent sont les plus grands.

Lorsque les femmes établies à leur propre compte dans l’économie informelle travaillent à l’extérieur, leurs entreprises sont généralement plus petites et concentrées dans les secteurs à faible investissement et peu rémunérateurs, qui reposent sur des compétences traditionnelles. Mais les règles sociales qui limitent la mobilité des femmes dans certaines régions se traduisent aussi souvent par le fait qu’on trouve davantage de femmes travaillant à domicile.

Une approche intégrée prenant en compte les différences entre les sexes est donc essentielle. Au niveau microéconomique cela suppose de conjuguer la formation aux compétences de base en matiére de développement d’entreprise avec la formation à d’autres compétences (alphabétisation notamment) ; de fournir des services de soutien, notamment la sensibilisation aux questions juridiques, le soutien concernant les responsabilités familiales non rétribuées et l’accès à l’information dont l’information sur les marchés et le microfinancement ; d’encourager l’organisation des femmes entrepreneurs à mettre leurs ressources en commun afin d’augmenter leur pouvoir de négociation et leurs moyens de se faire entendre.

Au niveau mésoéconomique, la politique doit s’assurer que les soutiens au développement d’entreprise et au financement n’excluent pas les femmes, voire élaborent des approches les visant spécifiquement. Leur favoriser l’accès aux marchés est également essentiel et passe par toute une gamme de stratégies : encourager les femmes à participer aux salons commerciaux et aux programmes de commerce électronique, élaborer des initiatives en matière de commerce équitable, soutenir les femmes en matière de stratégies de design, dans le contrôle de la qualité et de la commercialisation, les mettre en relation avec les marchés d’exportation.

Au niveau macroéconomique, la législation et les politiques visant à améliorer l’accès des femmes aux ressources productives – terre, biens immobiliers, héritage, technologie, mise en valeur des compétences et crédit – sont incontournables. Les politiques fiscales et les politiques commerciales doivent éviter les distorsions en faveur des producteurs de sexe masculin, des grandes entreprises et des entreprises à capitaux étrangers.

Par ailleurs, la capacité des femmes à participer à l’économie rétribuée est subordonnée à l’exercice des responsabilités familiales non rétribuées qui leur incombent essentiellement dans la plupart des sociétés. Or le désengagement des Etats dans les domaines des services sociaux, des aides alimentaires, des soins de santé et de l’infrastructure, accroit la pression sur la capacité de celles-ci de générer un revenu.

Pour traiter la question de la dimension sexuée de l’informalité, il faut que les politiques, programmes et projets reconnaissent que l’offre de services de garde d’enfants par exemple doit s’inscrire dans une perspective de politique publique et non pas comme une question concernant exclusivement les besoins des femmes.

SOURCE : L’économie informelle : permettre une transition vers la formalisation, document de travail de l’OIT pour la préparation du colloque interrégional tripartite sur l’économie informelle. Genève, 27-29 Novembre 2007
Télécharger le document (pdf 125 ko)

Dialogue social

Alors que le dialogue social est un outil essentiel pour progresser vers l’égalité de genre dans le monde du travail la participation des femmes aux institutions du dialogue social reste en général faible y compris au sein des syndicats.


Région % de femmes dans les institutions de dialogue social % de femmes dans les gouvernements % de femmes dans les organisations d’employeurs % de femmes dans les organisations de travailleurs % de femmes dans d’autres groupes d’intérêt
Afrique 12,34 15,29 5,00 4,07 28,40
Asie 11,21 11,11 11,43 8,33 22,22
Europe 16,76 18,03 14,02 20,67 13,68
Amérique Latine et Caraïbes 14,16 26,11 7,37 7,14 24,24
TOTAL 14,68 18,93 10 12,95 20,15

SOURCE : Breneman Pennas, T. et M. Rueda Catry, 2008. Women’s participation in dialogue social institutions at the national level, page 10.

Certains syndicats se sont cependant donné comme mission de relever le niveau. Ainsi la CSI (Confédération Syndicale Internationale) http://www.ituc-csi.org/+-women-+.html a lancé en 2002 une campagne de sensibilisation avec le slogan « Les syndicats pour les femmes, les femmes pour les syndicats » dans le but d’augmenter la participation des femmes au sein des syndicats. La CSI cible tout particulièrement les travailleuses du secteur informel. Les syndicats affiliés ont été priés d’obtenir un tiers de participation féminine à des postes de décision, certains syndicats optant pour l’objectif de la parité.
Site de la CSI

En 2010 la campagne de la Confédération, « Un travail décent, une vie décente pour les femmes », se concentre sur les décisions des jeunes travailleuses en matière de droits au travail, de planification familiale et de choix de l’emploi pour équilibrer le travail et la vie familiale. Le mouvement syndical fait également campagne en faveur d’une nouvelle convention de l’OIT pour protéger les travailleurs et travailleuses domestiques, en particulier les femmes migrantes exposés à des risques d’exploitation et d’abus, parfois extrêmes http://www.ituc-csi.org/travail-domestique-mobilisation.html.
Site de la campagne

L’UITA (Union internationale des travailleurs de l’alimentation, de l’agriculture, de l’hôtelerie-restauration, du tabac et des branches connexes), une fédération syndicale internationale représentant les travailleurs de l’agriculture et des plantations, dans la préparation et la fabrication d’aliments et de boissons, dans les hôtels, restaurants et cafés et dans la production des tabacs est également engagé dans ce processus. En 2007, elle a adopté une résolution appelant à renforcer les efforts et les ressources pour syndiquer les travailleuses occupant des formes d’emplois précaires et à encourager l’égalité entre les sexes à tous les niveaux des syndicats et sur le lieu de travail.
Lire en ligne la Résolution UITA

A titre d’exemple, au Burkina Faso, les cinq syndicats affiliés à l’UITA ont fait une campagne pour promouvoir la ratification des conventions de l’OIT n° 183 sur la protection de la maternité et n° 184 sur la santé et la sécurité dans l’agriculture, qui s’inscrivait dans le cadre d’un programme de santé et sécurité soutenu par l’UITA et l’OIT et du projet régional pour les femmes de l’UITA. Le 25 février 2009, Le Conseil des ministres du Burkina Faso a autorisé le gouvernement à ratifier ces conventions. Le Burkina Faso est le deuxième pays africain, après le Mali, à ratifier la Convention n° 183 sur la protection de la maternité et le deuxième à ratifier la Convention n° 184 sur la santé et la sécurité dans l’agriculture, après Sao Tome et Principe.
convention de l’OIT n° 183 sur la protection de la maternité
convention de l’OIT n° 184 sur la santé et la sécurité dans l’agriculture

Le fonctionnement du réseau WIEGO (Women in Informal Employment : Globalizing and Organizing (Femmes dans l’emploi informel : globalisation et organisation) mérite également d’être mis en valeur.

Fondé en 1997, c’est un réseau international d’action, de recherche et de réflexion politique qui cherche à améliorer la situation des travailleurs pauvres, tout spécialement des femmes, dans l’économie informelle. WIEGO met en évidence la contribution de l’économie informelle par des meilleures statistiques et par la recherche, aide les organisations de travailleuses de l’économie informelle à se renforcer, et promeut l’inclusion des organisations de travailleuses informelles partout où des politiques qui les concernent sont discutées et décidées. La motivation commune de ceux qui participent à ses activités est d’obtenir la reconnaissance, la compréhension et le soutien des cadres politiques, des planificateurs économiques et des agences internationales de développement pour les travailleuses pauvres de l’économie informelle.
www.wiego.org

Un certain nombre de syndicats qui organisent des travailleurs informels, sont membres du WIEGO, notamment l’Association des femmes auto-employées de l’Inde (SEWA), le TUC du Ghana, GEFONT (Népal), l’UITA et les syndicats qui sont affiliés à StreetNet, à son tour affilié au WIEGO.

WIEGO soutient le réseau international des travailleuses domestiques (ou employées de maison) , en coopération avec l’UITA. La contribution du WIEGO a également été essentielle dans la constitution de HomeNet Asia, le réseau des travailleuses à domicile en Asie et de StreetNet, l’organisation internationale des syndicats de vendeurs et vendeuses de rue et de marché. L’objectif de StreetNet est de promouvoir l’échange d’informations et d’idées sur les enjeux critiques des vendeurs de rue et du marché et les colporteurs (vendeurs mobiles) et sur les stratégies pratiques d’organisation et de défense des droits.
réseau international des travailleuses domestiques
StreetNet

Résolutions, conventions et recommandations clés de L’OIT dans les domaines de l’égalité entre les sexes, du dialogue social et du travail décent

La Convention sur l’égalité de rémunération, 1951 (n° 100)
La Convention concernant la discrimination (emploi et profession), 1958 (n° 111)
La Convention sur les travailleurs ayant des responsabilités familiales, 1981 (n° 156)
La convention sur la protection de la maternité, 2000 (n° 183)
La recommandation N°191 de l’OIT sur la protection de la maternité (elles font toutes deux l’objet de campagne pour leur ratification).
Convention sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 (n°87)
Convention sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949 (n°98)
Convention sur les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail, 1976 (n°144)
Convention sur la négociation collective, 1981 (n°154)
Convention concernant les représentants des travailleurs, 1971 (n°135)
Convention sur les organisations de travailleurs ruraux, 1975 (n°141)
Recommandation concernant la promotion des coopératives 2002 (n° 193)
Dans cette recommandation l’OIT invite les gouvernements à « promouvoir le rôle important des coopératives dans la transformation d’activités qui ne sont souvent que des activités de survie marginales (parfois désignées par les termes "économie informelle") en un travail bénéficiant d’une protection juridique et qui s’intègre pleinement à la vie économique."
Résolution concernant l’économie informelle et le travail décent, 2002
Résolution concernant la promotion d’entreprises durables (2007)
La discussion sur l’entreprise durable dans le cadre de la CIT (Conférence internationale du travail) en 2007 a souligné l’importance de la primauté du droit et du fait d’avoir des droits de propriété garantis, y compris pour faciliter la formalisation.

Autres :

→ Adoptée en 2006, la Déclaration ministérielle sur le travail décent du Conseil économique et social des Nations Unies (ECOSOC) a mis l’accent sur les politiques qui favorisent l’intégration de l’activité économique informelle dans l’économie principale.

Documentation

Plan d’action du BIT pour l’égalité entre hommes et femmes 2010-2015
Brochure de l’OIT « Egalité de genre au cœur du travail décent / Dialogue social au travail : donner une voix et donner le choix aux hommes et aux femmes, 2009
Guide des ressources de l’OIT sur l’égalité des genres dans le monde du travail
Guide des ressources de l’OIT sur l’économie informelle
Livres et articles de Labordoc, la base de données de la Bibliothèque du BIT sur le monde du travail, qui traitent l’économie informelle sous l’angle du genre (dans la page de ressources, choisir le thème "genre")
Article de l’OIT/ 30 juillet 1996 : De plus en plus de femmes parmi les travailleurs pauvres
Guide de la campagne de la CSI Un travil décent, une vie décente pour les femmes (de nombreuses informations sur les conditions de vie des travailleuses en zones franches)
Rapport de mars 2009 sur l’(in)égalité de genre sur le marché du travail, la Confédération syndicale internationale (CSI)
Campagne du CSI en faveur d’une résolution de l’OIT dans le domaine du travail domestique
Maillon économique vital, le travail domestique est peu reconnu et très mal protégé. Les risques d’exploitation et d’abus, parfois extrêmes, touchent des millions de travailleurs et travailleuses domestiques, en particulier les femmes migrantes. Tout en poursuivant les efforts d’organisation, le mouvement syndical fait campagne en faveur d’une nouvelle convention de l’OIT : une étape cruciale sur la voie du travail décent. Témoignages et tour d’horizons de bonnes pratiques syndicales encourageantes dans les différentes régions du monde.
Guide de l’UITA sur l’Egalité publié en 2008 : TOUS/TES pour UN/E = UN/E pour TOUS/TES
Plate-forme d’action du Caire pour le développement de l’entrepreunariat féminin en Afrique
Rubrique genre de la BAD (Banque africaine de développement)

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