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Fiche pratique Adéquations "Prendre en compte une approche de genre dans l’information et la communication"

Mercredi 6 septembre 2023, par Yveline Nicolas

Cette fiche pratique propose quelques conseils et références documentaires pour toute structure soucieuse de prendre en compte une approche non sexiste dans les documents qu’elle produit. La version synthétique est téléchargeable en pdf en bas de l’article.


La communication constitue un outil important pour contribuer à une culture de l’égalité dans les organisations. Textes et visuels sont susceptibles de véhiculer des stéréotypes sexistes ou au contraire d’informer sur les enjeux de l’égalité des sexes et de la promouvoir de façon volontariste. L’utilisation du féminin dans la langue contribue à rendre les femmes visibles et à leur accorder une même importance qu’aux hommes.

La question peut être abordée de différentes façons : prendre en compte le genre dans la façon de s’exprimer, dans la typographie, féminiser les noms de métiers et de fonctions etc., mais aussi prendre en compte le genre dans les contenus informatifs eux-mêmes.

 Prendre en compte le genre dans la façon de s’exprimer

En français, le « neutre » se confond avec le masculin. Par exemple, quand on parle des « hommes » cela désigne à la fois l’espèce humaine en général et les hommes au sens du masculin, ce qui est susceptible de créer des confusions. Il y a plusieurs façons de résoudre ce problème.

Adopter un langage « épicène »

Celui-ci s’adresse d’emblée aux hommes et aux femmes, avec un choix de mots qui ne varient pas selon le genre, donnant une allure neutre à la communication. Les mots épicènes ne varient pas selon le masculin ou le féminin. Exemples : un ou une collègue, des collègues ; un ou une stagiaire ; le personnel administratif ; un ou une bénévole…

Ainsi on remplacera :
« Les formateurs » par « L’équipe de formation »
« Les européens » par « La population européenne »
« Les hommes » par « Les humains », « Les êtres humains », « l’humanité »
« Les hommes politiques » par « Les personnalités politiques »
« Les électeurs » par « L’électorat »
« Les adhérents » par « Les membres de l’association »
« Les paysans africains » par « La paysannerie africaine »
« Les agriculteurs familiaux » par « L’agriculture familiale » ou « les agricultures familiales »
« Les participants au colloque » par « Les personnes présentes… »
« Les demandeurs d’asile » par « Les personnes demandeuses d’asile »

On peut également employer des adjectifs et des pronoms épicènes, qui n’ont pas à s’accorder : « apte » au lieu de « qualifié » ; « aux prises avec » au lieu de « touché par » ; « au service de » pour « employés » ; « avec qui » au lieu de « lesquels »… Utiliser l’infinitif : « avoir 18 ans minimum » au lieu de « vous devez être âgé de 18 ans ».

Il existe des guides de rédaction épicène en français, développés notamment à Québec ou en Suisse (cf. liens internet en bas de cet article).

Adopter un langage « genré », qui rappelle qu’il y a des hommes et des femmes

Quand il est difficile d’utiliser des expressions neutres, on peut choisir de mettre les termes au féminin et au masculin : « bonjour à toutes et tous », « merci à celles et ceux », formateurs et formatrices, professionnels et professionnelles, actrices et acteurs, paysans et paysannes…

La typographie peut être mise à contribution pour signifier la mixité : agent-e, agent.e, agent/e, agent-e-s, agent-es ; en évitant l’usage officiel agent(e) qui met fâcheusement le féminin entre parenthèse. Certain-es optent pour « formateurs-trices », « actifs-ves ». Le point médian, neutre typographiquement, est de plus en plus apprécié, pour sa légèreté : agent·e·s ou agent·es ; il s’obtient en maintenant la touche Alt enfoncée et en tapant 250 sur le pavé numérique ; sur les claviers Mac, en tapant Alt+majuscule+F.

Si cela est jugé trop lourd, il peut être préférable de choisir « les actifs et les actives ». On peut décider d’accorder de la façon suivante : « les collègues sont impliqué-e-s ».

A chaque structure d’adopter la typographie qui lui convient et de la généraliser dans sa communication de façon homogène.

Autres recommandations  :
- Féminiser les noms de métiers, titres et fonctions : l’ingénieure agronome, la chercheuse, la plombière, la ministre, l’ambassadrice, la sénatrice… (Cf. ci-dessous)
- Respecter l’ordre alphabétique : F/H, les collaborateurs et les collaboratrices.
- Choisir d’accorder avec le dernier mot (« règle de proximité » qui était en vigueur autrefois dans la langue française) : les animatrices et les animateurs présents ou les animateurs et animatrices présentes.
- Reformuler, supprimer les anciennes expressions sexistes, telles que « le panier de la ménagère », « la fée du logis », « Mademoiselle » (qui constitue une discrimination en différenciant des statuts civils selon qu’on est femme ou homme et a été interdit dans les documents administratifs en France en 2012) ou les expressions androcentrées : « chef de famille », « tout le monde a répondu présent comme un seul homme », « un homme de paille »… « gérer une affaire en bon père de famille » (la loi pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, publiée le 4 août 2014, remplace dans le code civil et autres codes l’expression juridique « en bon père de famille » par « raisonnablement »).
- Ne jamais dire "LA femme" mais "Les femmes", car il n’y a pas une "essence féminine" et les femmes sont aussi diverses que "les hommes".)

Ne pas hésiter à rompre avec d’anciennes formulations. Le langage est vivant et évolutif. Exemples :
- Droits humains au lieu de Droits de l’homme ou droits de l’Homme.
- Journée internationale des droits des femmes (et non pas "Journée de la femme »).
- Commission des Nations unies sur le statut des femmes (pour CSW, Commission on status of Women), au lieu de Commission pour la condition de la femme, qui était historiquement une traduction erronée.
- Réfléchir aux euphémismes et à l’utilisation de formes passives, comme "les violences faites aux femmes", qui suggèrent qu’il n’y a pas d’auteur aux violences... Expression un peu plus forte : "les violences à l’encontre (ou contre) les femmes". Autre exemple : "Elle s’est faite agresser" ; en fait : "Elle a été agressée" !
- Un exemple d’initiative pour faire évoluer le langage : la version française genrée de la Convention internationale des droits de l’enfant (CIDE) réalisée par Adéquations, considérant que la CIDE est le premier des instruments internationaux relatifs aux droits humains qui recourt systématiquement au double usage des pronoms masculins et féminins.
- Une initiative d’enseignant-es : « Nous n’enseignerons plus que "le masculin l’emporte sur le féminin »

A l’attention des médias : ne pas définir une femme par son physique... Si l’on est tenté de le faire, remplacer par un homme et juger du résultat comique. Exemple : "Petit bout de femme aux yeux pétillants, une telle est directrice de la communication" = "Grand gaillard aux cheveux blonds bouclés, untel est directeur marketing".

 Règles de base pour la féminisation des noms de métiers

- Noms se terminant par « e », pas de changement : un ou une secrétaire
- Noms se terminant par « é »ou « i », ajouter « e » : apprentie, députée
- Noms se terminant par « eur », mettre « euse » : chercheuse, camionneuse…
A noter : on ajoute souvent un « e » : chercheure, proviseure, assesseur, mais la logique grammaticale voudrait que ce soit "chercheuse", "assesseuse" etc.)
- Noms se terminant par autre que « eur », ajouter « e » : agente, référente, encadrante, conseillère, menuisière
- Noms se terminant par « teur », mettre « trice » : formatrice, agricultrice, conductrice, factrice, autrice (féminin de "auteur", plus logique que "auteure".)

Circulaire du 11 mars 1986 relative a la féminisation des noms de métier, fonction, grade ou titre ; Circulaire du 6 mars 1998 relative à la féminisation des noms de métier, fonction, grade ou titre

"Femme, j’écris ton nom... : guide d’aide à la féminisation des noms de métiers, titres, grades et fonctions". La Documentation française, 1999

 Prendre en compte le genre dans les contenus informatifs

La dimension de genre permet d’enrichir les messages et d’apporter plus de précision sur les contenus, en apportant des informations utiles.

Intégrer des statistiques sexuées

On pourra ainsi proposer, chaque fois que c’est possible ou pertinent, des données sexuées, apportant des informations complémentaires utiles. Par exemple : « En 2023, environ 2,3 % de la population mondiale — ou 184 millions de personnes, dont 37 millions de réfugiés — vivent en dehors de leur pays de nationalité ». « Environ 2,3 % de la population mondiale — ou 184 millions de personnes, dont 37 millions de réfugiés — vivent en dehors de leur pays de nationalité. 48% sont des femmes. »

Mentionner des disparités et inégalités de genre

En plus des données quantitatives sexuées, on peut apporter quelques éléments d’analyse montrant que les femmes et les hommes sont touchés différemment. Exemples :

- « Les conditions de vie dans les prisons françaises sont régulièrement dénoncées. On compte 72 350 détenus pour 60 750 places en 2021 » ; « La situation se dégrade dans les prisons françaises. On compte 72 350 détenus pour 60 750 places. Si les femmes ne représentent que 3,59% des détenu-es (2 057 femmes), leur situation est souvent difficile en raison du manque d’infrastructures adaptées  ».

- « Selon la FAO, la faim ou sous-alimentation chronique ( défini comme ne pas avoir accès à une alimentation suffisante pour mener une vie active a touché 735 millions de personnes dans le monde en 2023, soit 9,2 % de la population (contre 7,9 % en 2019). "L’insécurité alimentaire" (le fait de ne pas avoir de façon régulière une alimentation adéquate (réduction des portions, sauts de repas, alimentation déséquilibrée…), touche 2,4 milliards de personnes, soit 29,6 % de la population mondial. Ce sont les paysans et les personnes en milieu rural qui sont les plus affectés, alors qu’elles produisent des aliments pour nourrir le monde ».
« Selon la FAO, la faim ou sous-alimentation chronique ( défini comme ne pas avoir accès à une alimentation suffisante pour mener une vie active a touché 735 millions de personnes dans le monde en 2023, soit 9,2 % de la population (contre 7,9 % en 2019). Ce sont les paysans et les personnes en milieu rural qui sont les plus affectés . En 2021, l’écart entre les femmes et les hommes dans le domaine de l’insécurité alimentaire s’est accentué : 31,9 % des femmes dans le monde étaient en situation d’insécurité alimentaire modérée ou grave, contre 27,6 % des hommes (un écart de plus de 4 points contre 3 points en 2020). Ce sont les paysans et les personnes en milieu rural qui sont le plus touchés et parmi eux les femmes, dont l’accès aux facteurs de production et au crédit est moindre. Si les femmes rurales avaient le même accès que les hommes à la terre, aux technologies, aux services financiers, à l’instruction et aux marchés, il serait possible d’augmenter de 20 à 30 % la production agricole des femmes et de réduire de 100 à 150 millions le nombre d’affamés dans le monde (rapport La situation mondiale de l’alimentation et de l’agriculture 2011). »

- « Le nombre de déplacés atteint un niveau record dans le monde en mai 2022, avec 100 millions de personnes déplacées de force (à comparer aux 37 millions il y a dix ans). En particulier, plus de 6 millions d’Ukrainiens ont fui leur pays à cause de la guerre ».
« Le nombre de déplacé-es atteint un niveau record dans le monde en mai 2022, avec 100 millions de personnes déplacées de force (à comparer aux 37 millions il y a dix ans). En particulier, plus de 6 millions d’Ukrainiens ont fui leur pays à cause de la guerre, dont 90% de femmes et d’enfants. Depuis le début de la guerre, les hommes de 18 à 60 ans ont l’obligation de rester pour défendre le pays. »

Avoir une vigilance particulière quant aux visuels

De nombreux stéréotypes se glissent dans les représentations visuelles : sur-représentation des hommes en situation professionnelle, femmes avec des enfants ; métiers sexués ; femmes choisies pour leur aspect « décoratifs » (vêtements, cheveux…) ; choix des couleurs (pastels ou rose pour les femmes ; couleurs plus tranchées pour les hommes…

Il faut prendre l’habitude d’analyser les brochures, dépliants, sites web, en vue de rééquilibrer s’il y a lieu, en jouant sur les informations sexuées, sur les images, les signatures d’articles etc. Cf. quelques questions à se poser :

- Le langage utilisé désigne-t-il les femmes comme les hommes, est-il épicène (cf. ci-dessus) ?
- Y a-t-il autant de femmes et que d’hommes représenté-es dans les illustrations, dessins, photos, affiches, tracts ; sites web et blogs ?
- Dans quelles attitudes et activités sont-ils et sont-elles représentées ? Exemple : premier plan ou arrière-plan, actifs ou passifs, en situation de responsabilité / d’exécution / d’action / de discussion…
- Peut-on repérer des stéréotypes associés aux hommes ou aux femmes ? Exemple : métiers stéréotypés ; attitudes et valeurs attribuées aux femmes (douceur, minutie, compassion...) et aux hommes (esprit d’entreprise, énergie, rationalité, agressivité)…
- Est-ce que le document approfondit de façon sexuée ses chiffres et ses statistiques ? Exemple : pas seulement "les producteurs de fruits et légumes", mais le nombre de femmes et d’hommes dans la filière de production.

 Ressources pour aller plus loin

Intégrer le genre dans la façon de communiquer

- Guide pratique pour une communication publique sans stéréotype de sexe, Haut Conseil à l’égalité, 2015. Télécharger (pdf 36 p.)
- Intégrer le genre dans l’éducation au développement et à la solidarité internationale. Fiche pratique Adéquations
- Intégrer le genre dans la communication fédérale, Belgique (pdf 84 p.) ; http://www2.cfwb.be/franca/femini/feminin.htm
- Le genre en éducation au développement. ITECO pdf 4 p.
- Communiquer le genre pour le développement rural, intégrer le genre dans la communication pour le développement ; FAO projet DIMITRA. Télécharger (guide pratique) (pdf 80 pages)
- Le traitement médiatique des violences faites aux femmes. Fiche pratique pour les journalistes

- Petit guide de communication inclusive et non sexiste pour service communaux. Ville d’Esch-sur-Alzette (Luxembourg), 2022. Télécharger (pdf, 22 p.)
- Guide de communication inclusive, Université Québec, 2021. Télécharger pdf, 62 p.
- La charte de la communication inclusive à Mediapart

- Ressources en ligne, rassemblées par https://www.mcgill.ca/library/

Rédaction non sexiste

- Le langage inclusif : pourquoi, comment. Eliane Viennot, Editions iXe, 2018
- Langage épicène, histoire de la féminisation du langage  ; sur le site égalité dans la Francophonie
- Office québécois de la langue française, féminisation et réaction épicène
- Guide de rédaction non sexiste, Ontario (Canada), voir en ligne ; Télécharger le dossier en pdf 68 p.
- Université du Québec UQAM, Guide de féminisation, en ligne
- Petit guide pour un langage non sexiste. FPS, 2012 (pdf 9 p.)
- Guide Unesco L’Egalité des sexes dans le langage, en pdf
- Guide d’aide à la féminisation des noms de métiers, titres, grades et fonctions, La documentation française, 1999. (Téléchargement en pdf, 119 pages)
- Manuel utile pour un usage non sexiste de la langue, FIT, Equal, FSE (pdf 28 pages)
- Décalogue pour une rédaction non sexiste, construire une langue égalité pour négocier l’égalité professionnelle, CGT. Télécharger pdf 43 pages
- Guide de formulation non sexiste des textes administratifs et législatifs de la Confédération Suisse
- Communication non sexiste en espagnol (Manual de lenguaje no sexista, ACSUR) (pdf 8 pages)
- Un document instructif : "Histoire d’autrice, de l’époque latine à nos jours". Télécharger (pdf 9 p.) ; http://siefar.org/la-guerre-des-mots/
- Un livre incontournable : Non, le masculin ne l’emporte pas sur le féminin ! Petite histoire des résistances de la langue française, Eliane Viennot, éd. iXe, 2014. Nouvelle édition 2022. Interview Eliane Viennot sur "l’approche genre et la langue française"
- Le (la) ministre est enceinte, ou la grande querelle de la féminisation des noms. Bernard Cerquiglini, Seuil 2018

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