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Témoignage de Tony PorterMardi 13 septembre 2016 Educateur, activiste et co-fondateur de l’organisation américaine « A Call to Men » l’américain Tony Porter décrivait, dans une conférence pour TEDWomen en 2010, ce qu’il appelle « la boite à hommes » en s’appuyant sur son propre vécu. En voici quelques extraits. |
Mots-clé : Rapports de force • expression des émotions • dévalorisation des filles
« J’ai grandi à New York, entre Harlem et le Bronx. En tant que garçon, quand je grandissais, on nous apprenait que les hommes devaient être durs, devaient être forts, devaient être courageux, dominants, pas de douleur, pas d’émotions, à l’exception de la colère et c’est sûr, pas de peur. Et que les hommes commandent, ce qui signifie que les femmes, non (…). Les femmes sont faibles, les femmes ont moins de valeur. Elles sont la propriété des hommes et des objets, en particulier des objets sexuels (…)
Il fut un temps dans ma vie où nous avons vécu une mauvaise période dans ma famille. Mon frère, Henry, est mort de façon tragique quand nous étions adolescents. L’enterrement s’est déroulé dans un endroit appelé Long Island, c’était à environ deux heures de la ville. Et alors que nous nous apprêtions à revenir de l’enterrement, les voitures se sont arrêtées à des toilettes pour permettre aux gens de se rafraichir avant le long trajet retour vers la ville. Et la limousine s’est vidée. Ma mère, ma sœur, ma tante, elles sont toutes sorties, mais mon père et moi sommes restés dans la limousine. Et à peine les femmes sorties, il a éclaté en sanglots. Il ne voulait pas pleurer devant moi. Mais il savait qu’il ne tiendrait pas jusqu’à ce qu’on soit de retour en ville, et il valait mieux que ce soit devant moi plutôt que de se laisser aller à exprimer ses sentiments et ces émotions devant les femmes. Et c’est un homme qui 10 minutes plus tôt, avait enterré son fils adolescent. Quelque chose que je ne peux même pas imaginer. Ce qui m’a le plus marqué c’est qu’il s’excusait parce qu’il pleurait devant moi. Et en même temps, il me donnait son soutien, me remontait le moral, pour que je ne pleure pas (…)
J’en viens à considérer ça comme la peur que nous avons en tant qu’hommes, cette peur qui nous paralyse, nous garde en otage de "cette boîte à hommes". Je me rappelle avoir parlé à un garçon de 12 ans, un footballeur, et je lui ai demandé : "Comment te sentirais-tu si, devant tous les joueurs, ton entraineur te disait que tu jouais comme une fille ?". Je m’attendais à ce qu’il me dise quelque chose comme, je serais triste, je serais en colère, je serais fou de rage, ou quelque chose comme ça. Non, le garçon m’a dit : "Ça me démolirait." Et je me suis dit, "Mon dieu, si ça le démolirait d’être traité de fille, alors qu’est-ce que nous lui enseignons sur les filles ? »