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Rapport Egalité entre les femmes et les hommes dans l’ESS, 2017

Vendredi 26 octobre 2018, par Yveline Nicolas

La loi du 31 juillet 2014 sur l’économie sociale et solidaire prévoyait dans son article 4-V, que le Conseil supérieur de l’ESS élaborerait tous les trois ans un rapport sur l’égalité entre les femmes et les hommes dans l’ESS et formulerait des propositions. Le premier rapport triennal réalisé sous la mandature du CSESS 2015-2018, a été approuvé à l’unanimité en séance plénière du 7 février 2017. On trouvera ci-dessous l’introduction ainsi que le résumé des propositions. Le rapport complet est téléchargeable en bas de l’article.


 Introduction

Si l’économie sociale et solidaire (ESS) a attendu le 31 juillet 2014 pour être reconnue par la Loi, elle est pourtant issue d’une longue histoire, où, au cours des siècles, ses acteurs ont pensé et mis en oeuvre certaines valeurs et d’autres rapports entre l’économie et la personne humaine.

Inspirée par des idées de liberté et d’égalité, basée sur des rapports de solidarité volontaires, l’économie sociale et solidaire a su inventer des modes d’organisation s’appuyant sur l’autopromotion des individus, l’émancipation collective et la recherche d’utilité sociale, voire d’intérêt général, retenant l’argent comme moyen et non comme finalité d’un développement à la fois économique et humain.

L’économie sociale, nourrie par divers courants de pensée parmi lesquels ceux des chrétiens sociaux et des socialistes utopistes, fait preuve d’une généreuse inventivité ; elle connaît son essor lors de la révolution industrielle du XIXème siècle et ses conséquences (organisations sociales et de travail, création d’une classe ouvrière et du prolétariat, débuts du syndicalisme etc..). Au tournant du XXIème siècle, l’économie sociale et solidaire enfin reconnue en tant que telle, est confrontée à de nouveaux enjeux : la mondialisation, le défi climatique et environnemental, les mutations technologiques, la question des inégalités, l’accès au logement et les modes de déplacement, l’évolution du monde du travail, etc. Là encore, l’économie sociale et solidaire démontre une véritable vitalité et présente une alternative : des acteurs plus anciens revisitent leurs valeurs, leurs projets pour actualiser leurs activités, leurs méthodes, leurs gouvernances tandis que de nouvelles formes d’organisations et de nouveaux projets émergent ou se déploient pour mettre en avant l’humain.

Cette reconnaissance et la vitalité de ce mouvement permettent de s’engager dans des chantiers fondamentaux pour les années à venir dont celui de la recherche d’une véritable égalité entre les femmes et les hommes. Ce chantier s’inscrit au croisement des valeurs et des pratiques, il doit faire bouger « dans les têtes et dans les faits ». L’égalité entre les femmes et les hommes, c’est : interroger les gouvernances et les rapports de pouvoir ; questionner les conditions de travail et les rapports de domination ; chercher à favoriser l’autonomisation des femmes, l’initiative et la responsabilité citoyenne de toutes et tous ; c’est reconsidérer les métiers et les emplois pour répondre aux enjeux sociaux et environnementaux. L’égalité entre les femmes et les hommes est une formidable clé d’entrée pour renforcer chaque organisation. L’économie sociale et solidaire dans sa volonté et sa capacité de transformation sociale doit en être le modèle pour que cette égalité se diffuse dans toute la société.

Les femmes sont au coeur des enjeux de l’ESS. Elles sont à la fois nombreuses parmi les bénéficiaires de leurs actions, largement majoritaires parmi les salariées de l’ESS et au coeur des questions de gouvernance qui interpellent l’ESS.

Si l’on analyse ces trois registres, les femmes apparaissent dans l’ESS dans une situation plus fragile qu’il n’y paraît au premier abord : une place prépondérante dans les forces de travail, mais concentrées sur des faibles qualifications et des métiers peu valorisés. De plus l’accès aux postes à responsabilités leur reste difficile.

A cet égard, une analyse plus poussée est indispensable de la part de l’ensemble de l’ESS sur certains décalages entre valeurs, principes et pratiques et en particulier au niveau de la gouvernance. Cette analyse permettrait sans doute à l’ESS de mieux comprendre les défis qu’elle doit affronter, notamment pour faire face à l’accroissement des besoins sociaux, qu’on demande souvent à l’ESS de « réparer », question qui « retombe » largement sur les femmes qui y travaillent.

Les évolutions du système social et économique classique fragilisent de nombreuses femmes. En effet, les femmes sont davantage touchées que les hommes par la montée des inégalités que ce soit en matière de santé et d’accès aux soins, de précarité énergétique, de salaires (écarts de 25 à 30% entre femmes et hommes), de conditions de travail (temps partiel voire très partiel subi) de reconnaissance, d’accès à des postes de responsabilité, d’accès aux banques, de montants des retraites décents, d’adhésion à des assurances etc.

Il y a deux sortes d’enjeux pour l’ESS, au-delà des objectifs de développement et de performances économiques de ses entreprises. Le premier enjeu est d’ordre plutôt opérationnel et gestionnaire, c’est par exemple la question des départs à la retraite, le renouvellement des générations salariées et bénévoles, l’intégration de plus de jeunes. Le second enjeu est d’ordre stratégique. Face à la réalité du contexte socio-économique, de la montée des inégalités, comment l’ESS décide-t-elle de se développer en se distinguant, c’est-à-dire en pratiquant ses différences, en portant ses valeurs spécifiques, en faisant adhérer à ses projets les jeunes générations ? En apportant comme au XIXème siècle des réponses à l’ensemble de la société ? La réponse pourrait être : en créant en son sein, sur une base volontariste, les conditions d’une transformation sociale, d’un autre modèle de société, où les femmes avec les hommes participeraient à égalité de responsabilité et de pouvoir à la construction d’un mieux vivre ensemble, à une meilleure organisation du travail plus respectueuse des personnes. Mobiliser et dynamiser l’ESS, partout, sur l’imagination, l’anticipation et l’innovation intégrant pleinement les femmes comme des actrices d’un autre modèle de société. Pourquoi se priver de la force des femmes et ne pas considérer l’égalité femmes hommes comme un moyen et une preuve de la différence de l’ESS ?

Au moins deux évolutions majeures renforcent la nécessité de se préoccuper de façon volontariste de la question du rôle et de la place des femmes dans l’ESS et de leur capacité « politique » à agir au travers de l’ESS :
- la transformation des formes traditionnelles de soutien familial et le vieillissement de la population de nos sociétés européennes : l’ESS répond à ces enjeux, avec des services fondés sur la confiance, notamment dans les métiers du soin et de l’accompagnement. Ces métiers sont principalement exercés par les femmes : comment concilier l’accroissement des besoins de ce secteur avec la nécessité d’atteindre plus de mixité dans ces métiers, tout en luttant contre le travail dissimulé ou non déclaré ?
- la transformation du salariat et/ou du lien à l’entreprise et l’apparition de nouvelles formes de travail : l’ESS se fait parfois l’écho d’une aspiration affichée par certains jeunes à se libérer du lien de subordination lié au salariat, de la montée en puissance de la figure du.de la nouvel.le entrepreneur.euse social.e, qui pourraient signifier un moindre attrait pour des formes collectives de propriété et d’usage : quelles seront les conséquences pour les femmes ? Ces nouvelles tendances bousculeront-elles ou au contraire renforceront-elles les stéréotypes de genre ? Les femmes se saisiront-elles des opportunités pour créer de nouvelles formes d’emploi ou d’entreprises ou au contraire alimenteront un marché du travail précaire et atomisé dans l’ESS où elles n’auront guère de responsabilités ?

L’économie sociale et solidaire est dite fondée sur une structure plus décentralisée du pouvoir, exercée par et avec les parties prenantes, c’est-à-dire les personnes concernées. Mettre en oeuvre son projet politique propre – à savoir apporter, sur le plan économique, des réponses aux besoins de la société – passe, pour l’ESS, par une réflexion sur le rôle et la place des femmes en son sein, ce qui va bien audelà des seules questions de parité dans les instances.

Les challenges sont aussi des opportunités. C’est dire l’importance des encouragements apportés aux forces motrices, femmes et hommes, qui oeuvrent pour que la promotion des femmes dans l’ESS serve à tou.te.s, femmes et hommes, persuadés que la pertinence et la spécificité de l’ESS y gagneront, au bénéfice du mieux vivre ensemble demain.

Le législateur de 2014 n’a pas retenu toutes les mesures en faveur du rôle et de la place des femmes dans l’ESS qui avaient été suggérées, notamment par les parlementaires, elles-mêmes saisies de propositions par le collectif FemmESS. Outre la parité dans les Conseils représentatifs de l’ESS (Conseil supérieur de l’ESS, Conseil supérieur de la Coopération, Haut Conseil à la vie associative) et les Chambres régionales de l’ESS, la loi a retenu le principe d’un rapport du Conseil supérieur de l’ESS (CSESS), tous les trois ans pour formuler des propositions.

L’article 4-V de la loi sur l’économie sociale et solidaire du 31 juillet 2014 prévoit que le CSESS est chargé d’établir tous les trois ans un rapport sur l’égalité entre les femmes et les hommes dans l’ESS et de formuler des propositions pour :
- 1 – assurer l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans l’ESS, en permettant notamment une meilleure articulation entre la vie personnelle et professionnelle des salariés de l’ESS ;
- 2 – favoriser l’accès des femmes à tous les postes de responsabilité, de dirigeant.e.s salariés comme de dirigeants élus ;
- 3 – assurer la parité entre les femmes et les hommes dans toutes les instances élues des entreprises de l’ESS.

Ce rapport vise à déterminer les inégalités entre les femmes et les hommes dans l’ESS, sensibiliser et inspirer les acteurs et actrices de l’économie sociale et solidaire et les pouvoirs publics afin de faire respecter et progresser l’égalité entre les femmes et les hommes et, au-delà, une approche plus juste, solidaire et durable de l’économie et de la société. Il est conçu pour rendre possible des débouchés sur des mesures concrètes constituant une « feuille de route » pour une politique d’égalité femmes hommes au coeur de l’ESS.

L’ensemble des acteurs concernés et les pouvoirs publics ont leur part de responsabilité dans l’amélioration de l’égalité et de la parité au sein de l’ESS. Ils doivent s’emparer de cet enjeu et mener des actions déterminantes, à leur initiative et de manière collective.

Le Conseil supérieur de l’Economie sociale et solidaire se doit, quant à lui, de promouvoir, impulser et évaluer les grandes orientations retenues dans le cadre de ce rapport. Le deuxième rapport triennal du CSESS, qui sera remis en 2020, s’appuiera notamment sur le bilan de ce premier plan d’action pour dresser de nouvelles perspectives.

 Préambule

Ce rapport rassemble un certain nombre de préconisations parmi lesquelles l’élaboration d’un glossaire. Cette préconisation est plus importante qu’il n’y parait à première vue. En effet, les mots parité, égalité, mixité, diversité que chacun.e utilise partout et quotidiennement sont, trop souvent, perçus comme synonymes, et leur sens n’étant pas partagé, engendrent inévitablement des incompréhensions et des difficultés dans le dialogue. Ainsi dans les remontées de l’enquête menée par la Commission Egalité entre les femmes et les hommes du CSESS au chapitre Ier, il apparaît clairement que ces mots - qui ne sont pas équivalents - sont pourtant utilisés comme tels.

Afin de faciliter cette nécessaire compréhension entre les un.e.s et les autres et de progresser ensemble sur ces questions, une même définition référente pour toutes et tous s’impose. D’où la préconisation d’un glossaire à introduire dans toutes les organisations et entreprises de l’ESS et à utiliser de manière générale par toutes et tous.

A cet égard, et dans un premier temps, le glossaire produit par l’UDES dans le cadre de l’accord du 27 novembre 2015, dans son annexe 1 (cf. annexe), propose des définitions courtes et claires tirées en partie du site internet femmes.gouv.fr et du glossaire de la Charte de la diversité.

Dans un deuxième temps, pour des raisons stratégiques en interne, tel mot peut être privilégié par rapport à un autre, notamment pour faire progresser ces questions au sein des entreprises et organisations de l’ESS. De même les plans d’actions sectoriels sur la mixité proposés par le service des droits des femmes - DGCS, ne peuvent qu’accompagner et compléter cette démarche en faveur de l’égalité.

La lecture du Guide de la Parité proposé par le Haut Conseil à l’Egalité entre les femmes et les hommes est ici recommandée : « La parité (…) ne se limite pas à une représentation 50/50 dans les instances décisionnelles. Elle doit également permettre de s’interroger sur les conditions de travail, sur le partage des tâches, sur les stéréotypes sexistes, et sur l’ensemble des obstacles structurels qui empêchent les femmes de pouvoir pleinement exercer les fonctions à responsabilités pour lesquelles elles sont aussi compétentes que les hommes ».

 Synthèse du Plan d’action en faveur de l’égalité femmes-hommes dans l’ESS

Le CSESS formule, en adoptant ce rapport triennal prévu par la loi du 31 juillet 2014, un plan d’action pour l’ESS à travers onze propositions :

Parité et égalité femmes hommes dans les modes et pratiques de gouvernance de l’ESS

PROPOSITION N° 1 – Se donner pour objectif d’atteindre la représentation équilibrée des femmes et des hommes dans les instances dirigeantes élues des entreprises de l’ESS : cet objectif, entendu comme l’atteinte d’une proportion d’au moins 40% des sièges pour chacun des sexes, sera évalué à échéance de la publication du second rapport triennal prévu par la loi, soit en 2020.

PROPOSITION N°2 – Constituer à cette fin un groupe d’expert.e.s, placé sous l’égide de la Commission Egalité femmes hommes du CSESS et en lien avec le Haut Conseil à l’Egalité femmes hommes, chargé de mener une analyse des conditions d’application, aux entreprises de l’ESS visées par la loi du 31 juillet 2014, des obligations législatives et réglementaires existantes relatives à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des instances de décision ; il étudiera la pertinence et la faisabilité de proposer des dispositions législatives, réglementaires et/ou de mesures d’autorégulation pour les entreprises de l’ESS qui ne sont assujetties à aucune disposition en la matière, ainsi que les actions de communication et sensibilisation à mettre en place pour faire levier. Il rendra ses conclusions au plus tard un an après l’adoption de ce rapport à savoir en février 2018.

PROPOSITION N° 3 – Créer un processus de remontée et de capitalisation des informations sur « l’amélioration continue des bonnes pratiques des entreprises », telles que prévue par l’article 3 de la loi du 31 juillet 2014, pour mesurer les évolutions et nourrir les rapports triennaux du CSESS sur l’égalité et la parité, notamment « en matière de diversité, de lutte contre les discriminations et d’égalité réelle entre les femmes et les hommes », et en matière d’égalité professionnelle et de présence dans les instances dirigeantes élues. Les informations recueillies sont traitées dans le cadre de la proposition 9.

Egalité dans l’emploi et les métiers

PROPOSITION N° 4 – Organiser auprès des branches, entreprises, fédérations et réseaux de l’ESS, la diffusion des outils permettant de mettre en oeuvre l’égalité salariale et d’évolution professionnelle femmes-hommes dans l’ESS, notamment dans le cadre de la négociation d’accords de branche et d’entreprises, et référencer et collecter les accords et avenants signés.

PROPOSITION N° 5 – Créer un recueil des pratiques dans la lutte contre les stéréotypes de genre liés aux métiers et à l’accession aux postes à responsabilités dans l’ESS. Les valoriser et diffuser dans le cadre de la proposition 9. Création d’entreprises et initiatives au féminin dans l’ESS

PROPOSITION N° 6 – Sensibiliser et former les structures d’accompagnement à la création d’entreprises et d’activités au sein de l’ESS, sur les stéréotypes, la mixité des secteurs, les obstacles rencontrés par les femmes dans la création d’entreprises ou d’activité, et inclure l’ESS dans le cadre des initiatives prises en faveur de la création d’entreprises par des femmes.

PROPOSITION N° 7 – Appuyer la dynamique de promotion de la création d’entreprises par des femmes qui choisissent l’ESS auprès des financeurs (banques, sociétés de capital-risque et investisseurs solidaires, …), faire connaître et diffuser les bonnes pratiques et financements spécifiques concernant l’égalité femmes hommes.

PROPOSITION N° 8 – Sensibiliser les jeunes sur l’opportunité d’entreprendre collectivement au sein des entreprises de l’ESS, dans tous les cursus et toutes les disciplines confondues, en abordant spécifiquement l’intérêt de l’entrepreneuriat collectif pour les femmes.

Des moyens pour rassembler, soutenir et dynamiser les ressources existantes pour l’égalité entre les femmes et les hommes dans l’ESS

PROPOSITION N° 9 – Créer un Observatoire dynamique de l’égalité et la parité femmes hommes dans l’ESS, rattaché à l’Observatoire national de l’ESS – CNCRESS, avec des moyens et un comité de pilotage dédiés, pour définir et mettre en oeuvre un recueil statistique sexué, piloter et animer une dynamique pour la bonne mise en oeuvre des propositions du Rapport.

PROPOSITION N° 10 – Intégrer des volets « ESS » dans les Conseils et Observatoires transversaux existants sur l’égalité et la parité entre les femmes et les hommes, en articulation avec l’Observatoire de l’égalité et la parité femmes hommes dans l’ESS.

PROPOSITION N° 11 – Intégrer les enjeux d’égalité femmes hommes dans les stratégies régionales de l’ESS et dans les Conférences régionales et nationales de l’ESS prévues à l’article 8 de la Loi du 31 juillet 2014

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