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L’écoféminisme, contre toutes les formes d’oppression

Dimanche 7 juillet 2019, par Yveline Nicolas

Exploitation des femmes et exploitation de la nature : l’analogie entre ces deux modes de domination constitue encore aujourd’hui l’axe central des engagements et des analyses dites écoféministes.


  L’écoféminisme, contre toutes les formes d’oppression

« C’est une urgence que de souligner la condamnation à mort (…) de toute la planète et de son espèce humaine, si le féminisme, en libérant la femme, ne libère pas l’humanité tout entière, à savoir n’arrache le monde à l’homme d’aujourd’hui pour le transmettre à l’humanité de demain », écrit Françoise d’Eaubonne en 1974 dans « Le féminisme ou la mort » [1]. Selon elle, «  le drame écologique découle directement de l’origine du système patriarcal  », notamment de l’appropriation du corps des femmes par les hommes. Elle crée le groupe Écologie et féminisme au sein du Mouvement de libération des femmes (MLF) et est à l’origine du terme « écoféminisme ».

 Exploitation des femmes, exploitation de la nature

Exploitation des femmes et exploitation de la nature : l’analogie entre ces deux modes de domination constitue encore aujourd’hui l’axe central des engagements et des analyses dites écoféministes. Paradoxalement, en France, Françoise d’Eaubonne est restée peu connue (et reconnue) à la fois des milieux féministes et des milieux écologistes, lesquels ont très peu croisé leurs analyses et leurs mobilisations. Dans l’effervescence « gauchiste » post-68, Françoise d’Eaubonne renvoyait dos à dos les deux modes de développement, le capitalisme et « l’économie administrée », les considérant comme également patriarcaux et destructeurs de la nature, du fait de leur orientation productiviste. À l’époque, la bataille faisait rage entre ceux qui affirmaient que l’égalité femmes-hommes viendrait de surcroît après l’éradication de la domination capitaliste et ceux – plutôt celles – estimant que « l’ennemi principal [2] était le système patriarcal, transversal aux autres structures d’exploitation [3].

Pour les écoféministes, patriarcat, crise écologique (ainsi que militarisme, courses aux armements [4] vont de pair. Pour elles, la nature a été infériorisée et dominée, selon un mode similaire à la domination masculine sur les femmes et à l’infériorisation de celles-ci. Certaines se sont appuyé par exemple sur l’analyse de textes des XVIe et XVIIe siècles, quand l’Occident commence à développer une vision mécaniste de la nature, avec un langage métaphorique de domination évoquant la « conquête » d’une nature « vierge », sa mise en « exploitation » [5]. Silvia Federici, chercheuse états-unienne d’origine italienne, a donné un point de vue féministe sur la transition entre féodalisme et capitalisme dans son livre Caliban et la sorcière, Femmes, corps et accumulation primitive [6]. Selon elle, « la mise en place de ce système économique et politique [signe] leur plus grande défaite historique : on les sort du monde du travail (artisanes, paysannes, médecines…) et on les enferme à la maison pour qu’elles fassent des enfants » [7]. C’est l’époque du début du processus de privatisation des biens collectifs (ou biens communs, communaux), du colonialisme et de l’esclavage, sur fond de chasse aux sorcières [8].

L’exploitation du travail domestique et de soin exercé gratuitement par les femmes, ainsi que les violences sexistes, constituent les bases du système de genre, qui organise la domination et les inégalités. Pour Françoise d’Eaubonne, la « démographie galopante », comme on n’oserait plus dire aujourd’hui, était le produit de la culture patriarcale de « l’illimitisme » (qui se caractérise aussi par l’injonction à la croissance économique perpétuelle, vue comme seul horizon du "progrès"), conduisant à l’esclavage dans lequel étaient tenues les femmes. Selon elle, « dans un monde ou simplement un pays où les femmes (et non comme ce peut être le cas, une femme) se seraient réellement trouvées au pouvoir, leur premier acte aurait été de limiter et d’espacer les naissances ». Depuis, on est passé de 4 à 7,7 milliards d’humains. [9]

 L’égalité dans un système de domination, contradiction dans les termes ?

Ces débats, ce vocabulaire abrupt, sont oubliés ou méconnus de nombre de personnes qui se réclament actuellement du "féminisme". Le féminisme, revendication de l’égalité des femmes et des hommes dans le cadre de la mise en oeuvre des droits humains, est un des mouvements sociaux qui a le plus radicalement transformé la société depuis un siècle. Si ce mouvement n’a jamais cessé de produire débats et bouleversements, il n’existe pas un féminisme, mais des féminismes, qui mettent l’accent sur différentes approches. Parmi les fondamentaux de l’émancipation des femmes, figurent l’acquisition des « droits sexuels et reproductifs » (dont la base est l’accès à la contraception et à l’avortement sûr et légal) et « l’empowerment » des femmes (autonomisation civique, politique, économique). L’éradication de toutes les formes de violences de genre, l’égalité professionnelle, salariale et dans le travail, la parité en politique et décisionnelle en général sont les axes actuels de combat. Sans l’indépendance économique et de son propre corps, il n’y a en effet pas d’égalité possible.

L’approche écoféministe, elle, reste peu connue, incomprise. En France, rares sont les féministes qui articulent leurs luttes avec la question de la crise écologique et climatique, malgré la prise de conscience progressive de la société à ce sujet, notamment les jeunes. On salue chaque avancée dans l’accès des femmes aux responsabilités dans les entreprises et en politique, la parité dans les conseils d’administration d’entreprises du CAC 40, la disparition des derniers lieux de non-mixité (comme l’interdiction de femmes dans les sous-marins nucléaires) ; on déplore l’insuffisante parité dans les armées, les nouvelles technologies, le numérique, l’intelligence artificielle… Ces derniers secteurs deviennent autant de nouveaux domaines à conquérir par les femmes. Mais la réflexion est rarement menée sur le modèle de "développement" et d’exercice du pouvoir dans lequel s’inscrit cette « émancipation ». Cela n’empêche pas que celle-ci soit réelle et souhaitable à court terme. Mais une émancipation à l’intérieur d’un système dominant qui ne serait pas émancipateur à long terme pour l’ensemble de l’humanité, voire qui la mènerait à disparaitre prématurément, n’est-elle pas une contradiction dans les termes ?

L’approche féministe "classique" est-elle soluble dans le libéralisme économique ? Le féminisme d’État légiférant pour l’égalité des droits, comme celui des institutions financières et de développement, prône depuis des années l’égalité femmes-hommes au nom de la croissance économique : plus de femmes au travail et l’égalité salariale, ce sont des points de croissance. Parallèlement, ces institutions déplorent que la concentration des richesses et le creusement des inégalités « impactent négativement » les "groupes sociaux vulnérables", dont "les femmes", qui forment « 70 % des pauvres dans le monde ».

En tant que groupe social historiquement dominé par un autre groupe social, dont les normes et pratiques ont été instituées comme un universel humain présenté comme « neutre », les femmes revendiquant leur émancipation se trouvent prises entre deux feux - comme les groupes sociaux "racisés" et autres groupes marginalisés et en situation de domination. Si l’égalité implique d’intérioriser les normes « masculines - neutres » dominantes, causes de leur domination, que devient l’émancipation des femmes – comme celle des hommes qui voudraient rompre avec cette masculinité dite "hégémonique" ou "toxique" qui s’est construite historiquement ? Cette construction sociale [10], en érigeant le progrès technique et la croissance économique comme des fins en soi, a entraîné la destruction de la nature, au point que le monde pourrait devenir invivable si le réchauffement climatique global dépasse les 3°C - ce qui est un des scénarios les plus probables. Si la promotion de l’égalité et des droits des femmes ne consiste finalement qu’à défendre leur participation décisionnelle et paritaire à ce modèle historiquement construit – qui s’exprime aujourd’hui par des rapports de domination géopolitique et post-coloniale, la compétition, un mode de développement au détriment des pays pauvres, la prédation sur les ressources et la destruction des équilibres écologiques – le risque n’est-il pas de déplacer les rapports de domination sans les supprimer ?

Concernant la crise écologique, les mouvements féministes majoritaires ne diffèrent pas d’autres mouvements sociaux, politiques ou syndicaux : leurs revendications se situent le plus souvent dans et pour un monde qui aurait du temps devant lui. La disparition accélérée des espèces animales et végétales, l’urgence à rompre avec les modes de production et de consommation, d’agriculture et d’urbanisation actuels, le risque même sur la survie de l’espèce humaine, restent un impensé ou impensable, pour beaucoup de ces mouvements, comme pour les humains en général - pris dans la "dissonance cognitive" propre au fonctionnement du cerveau humain. Même conscients ou confrontés à la perspective de leur propre disparition, la grande majorité des humains fait comme si de rien n’était [11] ; un exemple : l’utilisation "frénétique" des smartphones, d’internet et des réseaux sociaux par les militant-es du climat et des droits alors que cette industrie contribue de façon importante au réchauffement climatique et aux violations des droits humains dans les zones d’extraction des minéraux, que ces mêmes militants dénoncent.

Mais dans un contexte de crise économique, de crise de la démocratie, de montée d’extrémismes, la priorité est déjà de maintenir les acquis en matière de droits humains, et les droits des femmes restent particulièrement fragiles, même inscrits dans des conventions internationales et des lois nationales. Alors, en encourageant les femmes à être « des hommes comme les autres » dans des sociétés où les règles restent largement définies par des hommes, on leur donne des armes : rattrapage du retard dans le domaine de la création et de la direction d’entreprises, de la prise de décision politique, etc. [12].

La féministe afroaméricaine bell hooks a exprimé ce paradoxe : « Puisque les hommes ne sont pas égaux dans une structure de classe blanche suprémaciste, capitaliste, et patriarcale, de quels hommes les femmes veulent-elles être les égales ? [13]. » Ce qui fait écho à la parole d’Audre Lorde : "On ne détruira jamais la maison du Maître avec les outils du Maître". [14]

 En quête du « non-pouvoir » ?

Pour beaucoup d’écoféministes, la nécessaire transformation des rapports sociaux, de l’organisation du travail et de l’exercice du pouvoir passe par la valorisation de pratiques, de sentiments, d’aptitudes et de valeurs culturellement considérées comme féminines (mais dont, bien sûr, des hommes peuvent aussi être porteurs, tout comme des femmes peuvent avoir des comportements et occuper des positions qui ressortissent à la "masculinité hégémonique").

Mais les violences de genre restent massives et omniprésentes. Ce qu’on appelle dans la période « post-MeToo » la « libération de la parole » en témoigne sur tous les continents et dans tous les milieux sociaux : harcèlement, violences, viols, restent à la fois un symptôme universel du pouvoir patriarcal et un instrument de maintien de la subordination des femmes à ce système. Comment faire le lien entre ces violences et celle d’un modèle économique prédateur et de pouvoir que Françoise d’Eaubonne voulait déconstruire ? Pour elle, l’avenir n’était pas au « pouvoir aux femmes » mais au « non-pouvoir », à un autre mode de rapports humains et avec la nature. L’engagement à la fois dans l’écologie et dans la paix et pour le désarmement était et est resté un fondamental de l’écoféminisme. Or, cette question de la paix et du désarmement, de l’éducation à la paix et à la non-violence, semble devenue, elle aussi, inaudible, "démodée".

L’histoire de l’écoféminisme est celle d’une longue lutte fondée sur l’analyse des liens à la fois effectifs et analogiques entre ces différents enjeux, avec au centre, la réflexion sur le pouvoir. Des écoféministes ont développé leur modes d’expression propres, mêlant action politique, création culturelle et artistique, lors de l’occupation de sites nucléaires civils et militaires dans les années 1980, de manifestations contre des déchets toxiques et la pollution dans les quartiers défavorisés, particulièrement aux États-Unis, en Grande-Bretagne, en Allemagne [15].

En 1992, des mouvements de femmes et féministes élaborent « l’Agenda 21 des femmes pour une planète en bonne santé et en paix », texte assez radical qui prend en compte la santé environnementale, le climat, l’énergie, les questions de paix et de sécurité, etc., et se veut un apport à la Conférence de Rio sur l’environnement et le développement. Le programme pour le XXIe siècle ("Agenda 21" issu de ce Sommet de la Terre, comportera un chapitre et des engagements en faveur de de la participation des femmes à un développement soutenable et équitable". Il marquera aussi le début de la diffusion du concept de « développement soutenable » [16], considéré par certain-es comme un apport positif permettant d’alerter et d’intégrer les enjeux environnementaux, par d’autres comme un nouvel avatar du libéralisme économique défendant sa légitimité et sa pérennité.

Au niveau international, des mouvements féministes, dont beaucoup de groupes sont engagés dans des luttes « de terrain » pour la préservation de l’environnement, s’investissent en vue des « Objectifs de développement durable » (ODD), nouvelle feuille de route universelle adoptée par les Nations unies en septembre 2015. Des féministes sont de plus en plus actives dans les négociations climatiques pour faire reconnaître la nécessité de l’égalité entre les sexes et revendiquer l’accès des organisations de femmes aux financements. Cela débouche ainsi sur l’adoption d’un plan d’action « Genre et climat » à la COP 23 en 2017. Comme pour toutes les ONG et mouvements sociaux, se pose alors la question de leur récupération par la "machine onusienne" et de leur dépendance par rapport à « l’agenda officiel » des débats et des négociations internationales.

Cet arrimage d’organisations de la société civile à "l’agenda international" creuse aussi des inégalités au sein même des mouvements féministes, entre les groupes qui peuvent financer leur participation aux conférences et ceux qui ont beaucoup moins de moyens, notamment dans la sphère francophone et certains pays en développement, ainsi qu’entre les associations dont l’objet principal est de promouvoir l’égalité femmes-hommes dans une perspective féministe et les ONG "de développement" ou "humanitaires" qui intègrent progressivement un discours et des éléments de plaidoyer issus du féminisme ; ces organisations dialoguent directement avec les Etats et les institutions internationales, avec des moyens humains et financiers sans commune mesure avec les associations féministes et parmi elles, celles qui réfléchissent en terme d’écoféminisme, qui sont encore plus marginales. S’il est remarquable que les analyses féministes dans leur diversité constituent, encore et toujours, une source inépuisable d’inspiration et de pratiques concrètes, elles courent le risque de se retrouver dépolitisées et, au pire, mises au service des rapports de domination qu’elles voulaient initialement combattre.

 Luttes de terrain et solutions concrètes

Actuellement, dans de nombreuses régions du monde, des femmes – notamment issues des communautés « autochtones » – sont à la tête ou majoritaires dans des luttes souvent frontales face à l’exploitation des gaz de schiste très destructrice (en Amérique du Nord) et à l’économie de l’extractivisme [17] et de l’accaparement des terres en Amérique latine, en Asie, en Afrique. Certaines font le lien entre le viol des femmes et celui de la nature, avec le slogan "Ni les femmes, ni la terre ne sont des territoires à conquérir", très présent en Amérique Latine, à partir notamment de l’opposition d’un groupe féministe à un grand projet d’autoroute dans la forêt amazonienne [18]

Les défenseuses des droits environnementaux paient d’ailleurs le prix fort, car elles affrontent à la fois le sexisme et le modèle de développement capitaliste. Ces dernières années, plusieurs d’entre elles ont été assassinées, comme Berta Flores Càceres, cofondatrice du Conseil citoyen des organisations des peuples amérindiens du Honduras (COPINH), tuée le 3 mars 2016 à la Esperanza, Honduras. Peu de temps auparavant elle témoignait : « Dans la lutte contre la privatisation des rivières, la défense des forêts et contre les multinationales, les femmes du COPINH ont été majoritaires. Cela entraîne des menaces sur nos vies et notre sécurité physique, émotionnelle et sexuelle, des menaces contre nos enfants, notre famille proche. Ils disent que nous sommes des prostituées, des sorcières, que nous sommes folles. Nous avons travaillé nationalement et internationalement et gagné des victoires. Par exemple, la ratification par le Honduras de la Convention 169 sur les peuples autochtones. Nous sommes parvenu-es à obtenir des titres de propriété sur des terres communautaires, à créer des municipalités autochtones  ».

Comme l’indique le rapport de l’ONU sur les femmes défenseurs des droits, "la mondialisation et les politiques néolibérales ont provoqué une perte d’autonomie économique et des inégalités de pouvoir qui se répercutent sur l’exercice des droits des femmes. Des acteurs non étatiques − notamment des entreprises, des organisations criminelles, des investisseurs et des institutions financières − ont renforcé leur pouvoir et leur influence sur les États et les sociétés. Certains projets mis en oeuvre au nom du développement économique, notamment dans les secteurs extractif et agroalimentaire, ont entraîné des destructions de l’environnement, provoqué des déplacements de population et donné lieu à de nombreuses violations des droits humains ainsi qu’à des violences. Souvent, ces projets ont pour effet de marginaliser, d’appauvrir et de fragmenter les communautés et les familles. Les défenseuses des droits de la personne ont été parmi les premières à dénoncer ces bouleversements et à revendiquer leurs droits, le plus souvent avec beaucoup moins de moyens que les groupes auxquels elles s’opposent". [19]

Partout dans le monde, des groupes et réseaux de femmes travaillent sur les solutions à mettre en œuvre, par exemple dans le domaine de l’agroécologie, de la conservation de semences et de la biodiversité. Leur approche pragmatique de la protection de la nature mêle souvent des aspects techniques venus de savoirs expérientiels et des préoccupations éthiques, ainsi que la défense d’une diversité à la fois biologique et culturelle. Parfois, l’ancienne division du travail (les « petites » cultures vivrières aux femmes, les « grandes » cultures d’exportation aux hommes) finit par se retourner en avantage pour des femmes, face à la faillite du modèle agricole productiviste qui entraîne la ruine de nombreux paysans ainsi que l’érosion et la pollution des terres et des eaux [20].

 Les incompréhensions au sujet de "l’essentialisme"

Si l’écoféminisme – et peut être l’environnementalisme en général – est si suspect dans des pays comme la France, c’est qu’il a souvent, et à tort, été assimilé à la tendance essentialiste de certains courants du féminisme, laquelle représente un « épouvantail » pour le féminisme majoritaire universaliste. L’essentialisme, qui considère en effet les femmes comme dotées de qualités innées, qui les rendraient « par nature » plus proches de « la nature », les prédisposerait à des activités de « care » (prendre soin d’autrui et de l’environnement), qui seraient complémentaires de caractéristiques « masculines » (souvent liées à la recherche du pouvoir et l’agressité), est un piège. Certains courants féministes – mais pas particulièrement écoféministes – versent en effet dans l’essentialisation et la rhétorique de la complémentarité entre les hommes et les femmes (ce concept de « complémentarité » étant particulièrement promu par les églises monothéistes, attachées à la division sexuée des rôles sociaux et au modèle de famille classique hétéronormée). En face, des arguments sur une supposée « injonction » à l’allaitement et aux couches lavables ont été montés en épingle, pour montrer de façon caricaturale que l’écologie allait nuire à l’émancipation des femmes. Ce débat réducteur fait, plus ou moins consciemment, l’impasse sur le facteur clé de l’émancipation : la participation égale des hommes à l’ensemble des tâches parentales, éducatives, domestiques, de soins aux aîné-es dépendant-es ainsi que le maintien de services publics de qualité.

Par ailleurs, doit-on universellement et définitivement dévaloriser et rejeter le « biologique », et par extension la « nature », ainsi que les compétences de "prendre soin" ou le domaine des sentiments et des émotions, au motif qu’ils ont été assimilés par la pensée occidentale patriarcale à du « féminin » inférieur ? Des écoféministes pensent qu’il est urgent, au contraire, de se réapproprier ce « féminin » et ces compétences sociales et humaines historiquement construites et de renouer avec la nature et l’ensemble du vivant non humain. Quoi qu’il en soit, la critique essentialiste est réfutée par la plupart des théoriciennes écoféministes comme Carolyn Merchant, qui considère le féminin comme construction sociale [21].

Au Sud, on entend parfois des discours sur les femmes « gardiennes de la terre, de la nature », car « donnant la vie ». Si de tels propos ont été tenus par Vandana Shiva, une des écoféministes les plus connues pour son combat en faveur d’une agriculture paysanne [22], dans nombre d’interviews elle souligne que ce rôle des femmes est lié à la place qui leur a été réservée dans les sociétés : « Les femmes de Chipko se sont élevées non pas parce qu’elles donnaient la vie mais parce qu’elles étaient responsables de la nourriture et de l’eau ! La division du travail a laissé les femmes dans l’économie du soin aux autres (’caring’), qui a été traitée, pendant des décennies comme une non-économie. L’oppression des femmes et de la nature relève des mêmes processus. Il faut donc se tourner vers une pensée qui libère la nature, qui défend l’idée que la nature est vivante, intelligente, avec ses propres capacités d’organisation… L’homme doit se rendre compte de tout ce que la nature, mais aussi les femmes, les autres cultures, les petits paysans, sont capables de lui apporter. Nous devons valoriser la vie et les savoir-faire  » [23].

Aussi, de même qu’il n’y a pas un seul féminisme, n’y a-t-il donc pas un seul écoféminisme. De plus, de nombreuses organisations de femmes et de féministes dans le monde articulent les composantes paix, écologie, et genre, sans se référer au concept d’écoféminisme. Aujourd’hui, des groupes beaucoup plus jeunes et encore peu entendus travaillent sur le lien entre exploitation des femmes et exploitation industrielle des animaux : il existe un écoféminisme « anti-spéciste » ou vegan. Ces sensibilités sont aussi affaire de générations [24].

 Écoféminisme et décroissance

Un sujet mériterait d’être exploré : l’articulation entre féminisme et pensée de la décroissance. Le journal Silence avait publié en novembre 2007 un dossier intitulé « Décroissance côté Femmes  ». Il constatait « que les débats autour de la décroissance se font surtout autour d’hommes ! Que l’on prenne les articles parus dans la presse spécialisée, les intervenants dans les colloques, dans la revue La Décroissance ou dans Silence, on retrouve toujours une large majorité d’hommes ». En 2017, dans l’anthologie « Aux origines de la décroissance, 50 penseurs », seules deux femmes figurent sur les 50 (Hannah Arendt et Simone Weil) [25]. Certes, les femmes avaient autrefois moins voix au chapitre. Mais les textes de nombre de féministes ont été porteurs d’analyses de l’organisation sociale, du travail et du pouvoir, qui préfigurent aussi la critique du développement [26]. Et quid de la biologiste Rachel Carson, qui a été l’une des premières à dénoncer les pollutions aux pesticides, remettant en question l’approche techniciste des questions environnementales ? Son livre Printemps silencieux, paru en 1962, est souvent considéré comme le début de la prise de conscience écologiste aux États-Unis et y a conduit à l’interdiction du DDT : « Nous avons laissé employer ces produits chimiques sans s’interroger outre mesure sur leurs effets sur le sol, sur l’eau, les animaux et plantes sauvages, sur l’humain lui-même. Les générations à venir nous reprocheront probablement de ne pas nous être souciés davantage du sort futur du monde naturel, dont dépend toute vie. Notre époque est celle de la spécialisation ; chacun ne voit que son petit domaine et ignore ou méprise l’ensemble plus large dans lequel il vit. C’est au public de dire s’il désire poursuivre la route actuelle, et pour qu’il puisse parler en connaissance de cause, il doit être informé ».

Comme il y a différentes sensibilités féministes, sans doute y a-t-il différents courants de la décroissance. En France, le journal La Décroissance, dont les analyses constituent un pôle de résistance d’une vraie "écologie politique", a une rédaction exclusivement masculine ou presque. Une intéressante rubrique d’inspiration féministe, « La Madelon », a eu une existence éphémère, et si la question du « genre » semble devenue une préoccupation récurrente, c’est maintenant sous la forme d’une crainte de la confusion généralisée entre les sexes. Les attaques contre « le genre » sont peut-être dues à une méconnaissance de cette approche (confondant le genre dans son acception identitaire relevant de la liberté individuelle et « l’approche genre », étude sociologique de la division sexuée du travail et des inégalités socialement construites) comme aussi de l’histoire du féminisme et de ses positionnements [27]. Le lien reste obscur entre cet engagement « anti-genre » et celui pour la décroissance, si ce n’est peut-être certaines rhétoriques « freudo-lacaniennes ». La société de consommation est ainsi désignée comme une sorte de perversion de l’attachement à la figure d’une mère « toute-puissante », parfois c’est « l’État mère » qui est épinglé…

Pour les écoféministes radicales, la forme actuelle de la plupart des États, portés par des oligarchies qui s’emploient à marchandiser le vivant pour entretenir une classe sociale prédatrice – ressortirait plutôt à la « masculinité hégémonique » ou "toxique" : compétition, chacun pour soi et responsable de sa situation économique, refus de la prise en compte des rapports sociaux de pouvoir, insensibilité à ceux qui sont vulnérables ou en difficulté, criminalisation des plus précaires, des étrangers... Par ailleurs, loin de favoriser l’indifférenciation des sexes, la société de consommation promeut un « marketing genré » toujours agressif, malgré les critiques formulées sur les "publicités sexistes". Il s’appuie sur des stéréotypes attachés aux différences supposées entre « féminin » et « masculin » pour vendre plus : vélos et cartables roses (impossibles donc à transmettre au frère cadet à qui il faudra racheter ces équipements dans une autre couleur), vêtements différenciés, jouets pour garçons et pour filles, produits d’hygiène différents pour femmes et hommes, etc. Tout en produisant plus de pollution et de gaz à effet de serre, cela conforte le sexisme, en général au détriment des filles, qui continuent à se déguiser en princesses ou en « marchandes » – quand elles ne se maquillent pas à 10 ans – tandis que les garçons font des expériences scientifiques et des explorations.

La critique du scientisme, de la surpuissance du « progrès technique », appelé à résoudre tous les problèmes, centrale pour les « objecteurs de croissance », fait aussi partie des fondamentaux des écoféministes, puisque, pour elles, cette idéologie est issue de la masculinité dominante et colonisatrice, qui s’est exacerbée à partir de la fin du XVIIIe siècle en Occident, creusant la dichotomie nature/culture, renvoyant les femmes à la nature, à la sphère domestique et à leurs émotions. Au bout du compte, s’inquiéter des dérives possibles de la « théorie du genre », n’est-ce pas une diversion par rapport à certains enjeux plus importants mais jamais abordés ? Un champ d’étude pragmatique pourrait être : comment mettre en pratique la décroissance (des productions et des consommations d’objets inutiles) tout en poursuivant le mouvement vers la réduction des inégalités entre les femmes et les hommes et notamment le fait que les femmes continuent à assumer une « double journée » (triple, quand elles ont des responsabilités associatives ou politiques), effectuant 70 à 80 % des tâches d’entretien de la maison et de soins aux proches ?

 Conclusion

Que reste-il du "féminisme" quand tous les acteurs privés ou publics se déclarent "féministes", à commencer par les Etats, les entreprises multinationales, les grosses institutions "de développement", etc. Et comment qualifier les luttes féministes quand ces Etats eux-mêmes affirment désormais mener une aide publique au développement "féministe" et une diplomatie "féministe" (tout en affirmant que le modèle économique libéral qu’ils promeuvent préservera le climat) ?

Et dans combien de temps ces mêmes acteurs se déclareront-ils "écoféministes" ? Très prochainement, sans doute.

Donc la question est urgente : comment définir l’écoféminisme ou plutôt les écoféminismes ? On pourrait considérer que, parmi les mouvements et les initiatives qui s’attachent à la déconstruction des rapports de pouvoir entre genres – imbriqués aux autres rapports de domination, dont ceux coloniaux, de classes, d’origine ethnique, de « races » [28] –, ceux qui intègrent une réflexion critique sur le mode de « développement » et font de la crise écologique et des enjeux de paix et de non-violence un axe central se rattachent d’une façon ou d’une autre aux écoféminismes.

Si ses filiations multiples et anciennes sont parfois oubliées, l’écoféminisme ressurgit toujours, continuant à inspirer des questionnements novateurs et radicaux, à la fois sur ce qu’est le féminisme et sur la façon d’aborder l’écologie et la nature. L’écoféminisme pose la question suivante aux féministes : comment parvenir à l’égalité femmes-hommes autrement qu’en s’alignant sur le modèle économique et de pouvoir des hommes dominants, qui a historiquement évolué vers une destruction accélérée de la base même de la vie sur la planète ? Parallèlement l’écoféministe oblige les écologistes à s’interroger sur la vision théorique d’un "humain" abstrait dominant et oppresseur de la nature, et à prendre en compte les oppressions multiples à l’intérieur même de la société humaine, à commencer par le système de genre qui constitue un facteur de domination et d’oppression premier.

Enfin, l’écoféminisme est inséparable des expériences concrètes des luttes et des initiatives pour préserver, valoriser ou réparer des espaces vivables et des liens sociaux, une production matérielle et culturelle qui permette à une société de se maintenir sans détruire d’autres sociétés ou d’autres espèces vivantes. De ce point de vue, il est difficile de juger ou de critiquer l’écoféminisme, sans se référer à tel ou tel contexte et pratique, mis en oeuvre et analysés par des groupes de femmes spécifiques, qui s’expriment à partir de leur savoir, expérience et environnement.


Cet article ne prétend pas donner une analyse exhaustive de ce qu’est ou pourrait être l’écoféminisme ni rendre compte des nombreuses autrices qui ont publié à ce sujet. Il reflète la vision et les interrogations de l’association Adéquations, qui va développer progressivement une rubrique documentaire et des références sur les écoféminismes.

Liens vers les autres articles du dossier

L’article ci-dessus est une version complétée et actualisée de l’article publié dans le numéro 16 - Printemps 2018 de la revue Les Possibles d’ATTAC sur "Le(s) féminisme(s) aujourd’hui".

- Accès à l’ensemble du dossier de la revue d’ATTAC Les possibles sur Le(s) féminisme(s), Printemps 2018
- Article Carmen, le pistolet, le metteur en scène et le ministre ou Comment lire autrement ?
- Article Exister, c’est désirer, par Chantal Jaquet
- Femme ou bien homme : doit-on choisir ? par Marie Duru-Bellat
- Le mouvement « Ni Una Menos » (pas une de moins) en Argentine, par Isabelle Bourboulon
- Féministe tant qu’il le faudra ! par Nathalie Arguin
- Féminisme et syndicalisme, par Annick Coupé
- Le féminisme : une dimension essentielle de l’altermondialisme, par Stéphanie Treillet
- Femmes musulmanes dans la modernité contemporaine, par Sonia Dayan-Herzbrun
- En finir avec la théorie de la plus-value, par Christine Delphy
- Le langage enfin vu sous l’angle des violences sexistes, par Éliane Viennot
- Le genre des choses et les choses de genre, par Jean-Marie Harribey
- La bioéthique en révision : quelques réflexions sur les pratiques actuelles et à venir dans la procréation médicalisée, par Jacques Testart
- Pourquoi la GPA ne peut pas être éthique, par Geneviève Azam

Notes

[1Camille Badoux, « Françoise d’Eaubonne, Le Féminisme ou la Mort », Les Cahiers du GRIF, n°4, 1974, p. 66-67, éd. P. Horay. Le livre de Françoise d’Eaubonne, Écologie et féminisme, Révolution ou mutation, paru en 1978 a récemment été réédité aux éditions Libre & Solidaire.

[2L’article de la sociologue Christine Delphy « L’ennemi principal » fait date en 1970, analysant notamment comment l’organisation de la famille et le travail domestique incombant aux femmes est une base du système d’exploitation patriarcale. Cette analyse est ensuite développée dans deux ouvrages : L’ennemi principal, tome 1 : économie politique du patriarcat, Paris, Syllepse, 1998. L’ennemi principal, tome 2 : penser le genre, Syllepse, 2001.

[3À l’origine, « le patriarcat désigne une mode d’organisation sociale où le père, le chef de famille et par extension les hommes, sont dépositaires de l’autorité. Cette domination s’est traduite par un ensemble de dynamiques qui façonnent encore en partie notre société : l’accaparement par les hommes du pouvoir symbolique (élaboration des concepts, écriture de l’histoire, art), la dévolution des femmes à la fonction reproductive ainsi que la subordination de leur sexualité à celle des hommes et la division sexuée du travail. Les femmes assurent ainsi à titre gratuit la fonction de reproduction domestique et le travail de care, les hommes le pouvoir politique et économique. Tandis que le droit et les institutions viennent conforter cette division hiérarchisée, la religion, la science et la médecine la légitiment. Quant à la langue, elle entérine et renforce cet état de choses : « le masculin l’emporte sur le féminin », « Questionner les masculinités », Adéquations 2016. Par « patriarcat » les féministes entendent, non « les hommes », mais un système d’exploitation et de domination.

[4L’expression "course aux armements parait presque désuète, alors que cette "course" a repris de façon inquiétante. En 2017, les dépenses militaires mondiales ont atteint 1 739 milliards de dollars, soit 2,2% du produit intérieur brut mondial. « Pour la période 2013-2017, les États-Unis, la Russie, la France, l’Allemagne et la Chine étaient les cinq plus grands exportateurs d’armes majeures et comptabilisent ensemble 74% du volume total des exportations d’armes ». Dépenses militaires, production et transferts d’armes - Compendium 2018, GRIP https://www.grip.org/fr/node/2591, conflits armés)

[5Exemple du philosophe Francis Bacon (1561-1626) dans « The Death of Nature » par l’historienne des idées et philosophe américaine Carolyn Merchant, 1980.

[6Paru en anglais en 2004, traduit en français aux éditions EntreMonde par le collectif Senonevero en 2014.

[7Ces analyses situées du point de vue des dominé-es avaient déjà été développés par des écoféministes, comme l’américaine Starhawk, qui s’est elle-même nommée « sorcière ». Un classique : son livre Dreaming the Dark : Magic, Sex and Politics, 1982, traduit en français en 2003 par Femmes, Magie et Politique (Les Empêcheurs de penser en rond / Le Seuil) et réédité sous le titre Rêver l’obscur, Femmes, Magie et Politique (Cambourakis, 2015).

[8Durant la période de l’inquisition, surtout de la deuxième moitié du XVIe siècle au début du XVIIe, ce « délire » contre les femmes (et contre des hommes qui n’entraient pas dans les normes sociales), aurait causé entre 40 000 et 100 000 victimes.

[9La population augmente de 1,2% par an, soit 89 millions de personnes supplémentaires (solde des naissances et des décès). Selon les projections de l’ONU, la population atteindrait 8,5 milliards en 2030, 9,7 milliards en 2050 et 11 milliards en 2100. Le taux de fécondité mondial est passé de 3,2 naissances par femme en 1990 à 2,5 en 2019 et devrait reculer à 2,2 en 2050. Deux personnes sur trois habiteraient dans des villes à partir de 2050.

[10Pour une présentation du concept des différentes masculinités, développés notamment par Raewyn Connell, sociologue australienne, et publication d’Adéquations « Vers l’égalité des femmes et des hommes, questionner les masculinités, enjeux, témoignages et pratiques », 2016 ; téléchargeable.

[12La « masculinité hégémonique » pouvant aussi être portée par des femmes, dans le contexte où ce modèle domine.

[13Bell hooks, Feminist Theory : From Margin to Center (1984), [Traduit en français : De la marge au centre. Théorie féministe (Cambourakis, 2017)]. Autre ouvrage important : Ain’t I a Woman ? : Black women and feminism (1981) [Traduction : Ne suis-je pas une femme ? Femmes noires et féminisme (Cambourakis, 2015). Née en 1952, bell hooks est morte le 15 décembre 2021].

[14"The Master’s Tools Will Never Dismantle the Master’s House", Sister Outsider : Essays and Speeches, The Crossing Press, 1984. Extrait de l’intervention où figure la citation. Audre Lorde (1934 - 1992), poètesse afro-américain, féministe, lesbienne.

[15Une anthologie de ces textes d’écoféministes américaines est parue en 2016 « Reclaim, recueil de textes écoféministes », choisis et présentés par Emilie Hache. Le terme « reclaim » utilisé à la fois en écologie et par les écoféministes renvoie à la revendication de la réhabilitation et réappropriation (de l’espace, des terres, de la culture, de valeurs historiquement dévalorisées car affectées au « féminin », etc.).

[16« Sustainable development », mal traduit en français par « développement durable ».

[17Actuellement l’extraction de matériaux est devenue le principal responsable du changement climatique et de la disparition de la biodiversité, selon le Rapport du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) "Perspectives des ressources mondiales 2019"

[18Présentation de ces luttes via un projet de documentaire sur la convergence des luttes entre féminisme et écologie en Argentine et en Bolivie, dans la Revue Multitudes 2017/2 (n° 67)

[19Situation des défenseuses des droits de la personne, Rapport du Rapporteur spécial sur la situation des défenseurs et défenseuses des droits de la personne, Nations unies, Conseil des droits de l’Homme, 22 février-25 mars 2019

[20Cf. dans Le Monde diplomatique de mars 2018 l’article de Jack Fereday sur le dynamisme de femmes qui, « dans une Inde rurale qui ploie sous la sécheresse et les dettes, où les paysans se suicident par milliers, les femmes prennent désormais la relève et réhabilitent une agriculture durable et solidaire ».

[21Philosophe, écoféministe américaine ; parmi ses publications « The Death of Nature : Women, Ecology and the Scientific Revolution » ; Earthcare : Women and the Environment, 1996.

[22Vandana Shiva, Maria Mies, Ecoféminisme, L’Harmattan, 1999.

[23Interview dans la revue Terre Sauvage, mars 2016.

[24Ces liens avaient déjà été pointés, par exemple le concept de « carnophallogocentrisme » de Jacques Derrida, dont se réclament certaines écoféministes et pour lequel le primat absolu accordé à la raison, à la parole, était au centre de la domination virile et de la mise à mort des « animaux non humains ». Cf. par exemple Jeanne Burgart-Goutal, « Déconstruire le ’carno-phallogocentrisme’ : l’écoféminisme comme critique de la rationalité occidentale », 2016.

[25« Aux origines de la décroissance, Cinquante penseurs », coordonné par Cédric Biagini, David Murray et Pierre Thiesset, co-édité avec Le Pas de côté et Écosociété, 2017.

[26Et pour ce qui est de l’époque présente, sur les personnes qui écrivent les notices introductives aux « précurseurs », on ne compte toujours que deux femmes pour quinze hommes.

[27Les réflexions ci-dessous sont issues d’une lecture assidue de ce journal. On pourra se référer pour avoir des exemples, aux numéros de janvier et mars 2018.

[28« Races » définies aussi en tant que constructions sociales.

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